Dimanche dernier, vernissage «en grande pompe» de la nouvelle exposition personnelle de Aïcha Filali. A ne rater sous aucun prétexte ! Ras-le-bol des mauvaises nouvelles, de la morosité ambiante et des deuils ! Enfin, le mois de décembre sera «inauguré» par un mariage. Un mariage oui, probablement plusieurs, mais certainement pas comme les autres ... A la Galerie Ammar Farhat, Aïcha Filali nous propose, en effet, une installation matrimoniale agrémentée, thématique oblige, d'une âwada (troupe musicale) populaire et d'une joute oratoire signée Raja Farhat. Une première, si notre mémoire est bonne ! Nous l'avons déjà dit plus d'une fois, Aïcha Filali ne semble pas encore près d'arrêter de nous surprendre, de nous étonner,... et ce n'est pas pour nous déplaire. Tout au contraire ! Chbabek wa 3teb (fenêtres et seuils) est l'intitulé de sa nouvelle exposition personnelle, un projet sur lequel elle travaille et s'attelle depuis maintenant un bon bout de temps. Comme d'habitude, c'est dans la société tunisienne dans laquelle elle est fortement ancrée, dans l'ordinaire, dans le banal, que l'artiste puise la «matière» et les «matériaux» de son Art. Cette fois-ci, c'est la cérémonie de mariage qui est appréhendée. Par un jeu de décompositions et de recompositions, les objets, les artifices, les codes vestimentaires, les traditions, les conventions, les stéréotypes et les clichés qui forment et entourent ce moment solennel de la vie sont déployés, mis en œuvre — ou mis en question ? — pour (re)construire tout un univers sémantique qui pousserait à réfléchir sur l'essence et le sens mêmes de cette fête telle qu'elle est pratiquée sous nos cieux et, surtout, sur son caractère kitsch. Tissus, formes iconographiques et objets ont été soumis à des interventions plastiques, allant du numérique à l'artisanal pour former un langage esthétique à plusieurs dimensions, conjugué au «passé contemporain», faisant fusionner réel et imaginaire et amplifiant les signes...La méthode paraît très simple, d'ailleurs, l'artiste n'entend point cacher le secret de son œuvre et présentera dans les détails les étapes de ce qu'elle a appelé la «procédure de mise à plat de la société tunisienne». Dans Chbabek wa 3teb, Aïcha Filali toujours habitée par cette verve, on ne peut plus originale, nous invite donc à découvrir et à (re)voir, sous un autre angle (pas d'angle mort cette fois), le temps de l'exposition ou peut-être à tout jamais la cérémonie du mariage. Le regard décalé que porte l'artiste sur la société et son ton narquois, un brin provocateur, caractéristiques de l'engagement artistique sobre et intelligent auquel elle nous a habitués, seront certainement au rendez-vous. Quant à l'homme de théâtre et de lettres, Raja Farhat, il présentera, dix minutes durant, une lecture personnelle, à caractère humoristique, des œuvres de l'artiste, à travers un poème théâtral en arabe tunisien. Il scellera ainsi par les liens sacrés de l'Art, théâtre et arts plastiques. A découvrir... Enfin, si le mariage du citoyen lambda dure une nuit (ou un jour), celui que nous propose Aïcha Filali s'étale du 1er décembre 2013 au 14 janvier 2014. Le 14 janvier ? Certainement, cela ne pourrait être qu'une coïncidence !....