Les ouvrières dans le secteur du textile vivent dans des conditions précaires et perçoivent un salaire assez bas qui ne leur permet pas d'améliorer leur productivité L'objectif de toute stratégie de développement est de préserver les intérêts de tous les intervenants au sein de l'entreprise, à savoir les travailleurs qui constituent le pilier du système productif et le chef d'entreprise qui est le gestionnaire et l'investisseur. Or, on constate parfois que des problèmes surgissent au sein de l'entreprise entre les employés et le chef d'entreprise et peuvent aller jusqu'à la grève et l'arrêt du travail. Des facteurs exogènes liés à la diminution de la demande - récession économique oblige - justifient parfois les décisions prises, relatives aux salaires et aux recrutements. Dans le secteur du textile, par exemple, les travailleuses notamment souffrent d'une situation déplorable. Le Forum tunisien pour le développement économique et social (Ftdes) a mené une étude sur le textile dans le gouvernorat de Monastir en vue de tirer quelques conclusions au niveau des conditions de travail des travailleuses. Cette région connaît, en effet, plusieurs unités de production employant en majorité des jeunes filles comme ouvrières sur machine. Il s'est avéré que la suppression, en 1995, des quotas des accords multifibres et la cessation totale de leur application à partir de 2005 ont été à l'origine de nombreuses répercussions sur le secteur du textile. La baisse des importations et l'intensification de la concurrence ont mis nos entreprises dans une situation embarrassante. Un manque d'encadrement et de mise à niveau Le tissu industriel dans le domaine du textile est dominé par les petites et moyennes entreprises qui emploient de 100 à 300 ouvriers. Elles représentent 21% de l'ensemble des entreprises et emploient 36% de l'ensemble des ouvriers. Les grandes entreprises qui emploient plus de 300 ouvriers ne représentent que 5% de l'ensemble mais emploient environ 30% des ouvriers du secteur. De 2007 à 2012, pas moins de 87 entreprises ont fermé dans la région de Monastir, ce qui a eu pour conséquence le licenciement d'environ 4.500 ouvriers qui se sont trouvés du jour au lendemain au chômage. Au mois de janvier 2013, on a enregistré aussi la fermeture de trois entreprises, des protestations d'ouvriers et ouvrières... Pas moins de 86% de la main-d'œuvre du secteur du textile est féminine, notamment dans les entreprises spécialisées dans la confection. Les ouvrières âgées de 16 à 35 ans constituent environ 80% de l'ensemble des travailleuses, contre 20% qui ont plus de 35 ans. Les jeunes occupent donc la grande partie des effectifs. L'étude évoque même «le caractère discriminatoire dans le recrutement des ouvrières et le renouvellement de leur contrat à durée déterminée tout en accentuant la précarité de l'emploi dans ce secteur». Les chefs d'entreprise n'apprécient pas les ouvrières assez âgées à cause de leur faible productivité et de leurs absences motivées souvent par les maladies. Il y aussi des adolescentes qui sont déjà entrées dans la vie active, obligées d'aider leurs parents pour améliorer leurs revenus. Il va de soi qu'elles perçoivent un salaire insignifiant. Pourtant, elles font un travail ardu et sont occupées toute la journée. Certains parents insistent auprès des employeurs pour que leurs filles travaillent. Les ouvrières célibataires représentent 61% de l'ensemble des ouvrières dans ce secteur et dans la région, contre 37% d'employées mariées, dont 91% ont des enfants à charge. Certaines ouvrières sont employées dans des domaines qui ne nécessitent pas de grandes qualifications. La majorité des ouvrières (76,5%) viennent de zones urbaines, tandis que 24% habitent dans les zones rurales. Le taux des ouvrières de zones extérieures au gouvernorat et aux zones côtières plus généralement est de l'ordre de 53.85%. C'est dire le temps consacré au transport qui n'est pas toujours disponible. Le secteur se distingue aussi par un manque d'encadrement et de mise à niveau pour une main-d'œuvre dont le niveau d'instruction est plutôt bas, puisque 7% des ouvrières sont analphabètes, 44% n'ont pas reçu d'éducation au-delà de l'enseignement primaire, 45% ont le niveau du second cycle de base ou secondaire et 2% seulement ont atteint l'enseignement supérieur. Les conditions de vie des ouvrières sont considérées comme misérables. Et l'on ne s'étonne pas dès lors que leur rendement soit faible. Plus de 42% d'entre elles sont responsables de familles constituées, en général, de cinq membres. Elles perçoivent un salaire mensuel de 300 dinars en moyenne. Cela constitue un avantage pour les entreprises étrangères qui cherchent à comprimer le coût de production pour augmenter leur compétitivité. De plus, 57% des ouvrières ne sont pas propriétaires de leur logement et sont obligées de recourir à la location de maisons anciennes manquant de salubrité. Même la couverture sanitaire n'est pas généralisée à tout l'effectif, puisque le quart des ouvrières ne sont pas affiliées au régime de sécurité sociale. On note à ce propos que 74,3% sont affiliées à la caisse nationale de sécurité sociale (Cnss), alors que 25,87% ne le sont pas.