Ouvrières agricoles, Kaïs Saïed, Mourad Zeghidi... Les 5 infos de la journée    Kaïs Saïed insiste sur le rôle de la fonction législative dans la « libération nationale »    Temps instable : pluies orageuses au nord et centre-ouest, sable au sud    Classico Club Africain – Etoile du Sahel à Radès : 25 000 supporters attendus    Tunisie – Développement des liaison aériennes entre la Tunisie et le Ghana    Disney Land bientôt à Abu Dhabi : immersion totale pour les familles du monde arabe    Back to basics : Délit d'initié    Le tourisme intérieur, un levier de développement sur lequel mise la Tunisie    Brillant exposé oral de la Tunisie devant la Cour internationale de Justice sur les obligations d'Israel dans le Territoire palestinien occupé    Saisie d'or à l'aéroport de Tunis-Carthage : deux voyageuses en flagrant délit de dissimulation    Pénurie d'eau : l'Observatoire tunisien de l'eau alerte sur un été difficile à venir (vidéo)    Zaghouan : La 39ème édition du Festival Nesri aura lieu du 17 au 25mai 2025    Espérance de Tunis : El-Sobki et Omri recrutés pour la Supercoupe et la Coupe d'Afrique    Ahmed al-Charaa à Paris : une visite sous haute tension diplomatique    CAN U20 – Groupe B (3e journée) – Tunisie-Maroc (Cet après-midi à 16h00) : Rien ne vaut la victoire...    Al-Bireh (Palestine): Un boulevard baptisé au nom du "martyr du drapeau" l'étudiant tunisien Fares Khaled (Photos)    « Le Retour des Phéniciens » : La 2e édition se tiendra dimanche au vieux port de Bizerte    Divorce à l'amiable : Bientôt possible chez le notaire en Tunisie ?    L'Allemagne entre recomposition interne et responsabilité européenne : les enjeux d'un mandat fragile    Un Tunisien à la tête de la Fédération panafricaine des experts comptables    Fiscalité des Tunisiens à l'étranger : Ce que dit la législation tunisienne    LTDH et FTDES : appel à un Congrès national pour les droits, les libertés et la démocratie    Tunisie : Ariana célèbre sa 29e édition du Festival des Roses du 09 au 25 mai 2025    L'arrivée de Xi Jinping à Moscou perturbée par des drones ukrainiens    "Les Enfants Rouges" de Lotfi Achour doublement primé au Festival de Malmö en Suède    Fathi Triki présente "Philosopher en terre d'islam" à l'IFT ce jeudi 8 mai    Projet d'aménagement de l'entrée sud de Tunis: Le taux d'avancement des travaux a atteint 70 %    À ce jour, aucune nouvelle taxe n'a été établie entre la Tunisie et la Libye    Sfax privée d'électricité ce dimanche : voici les zones concernées    En vidéo : La MAE Assurances poursuit son engagement pour l'innovation et annonce la 2e édition du MutualHack    Tunisie Autoroutes : 5 grands chantiers en cours et jusqu'à 7 nouveaux postes de péage d'ici fin 2025    Evadés de Mornaguia : le procès des terroristes impliqués dans un braquage bancaire reporté    La Chambre Tuniso-Espagnole trace sa feuille de route pour 2025    Les ouvrières agricoles manifestent à l'avenue Habib Bourguiba    L'usage des traites a triplé en un an, affirme Mohamed Nekhili    Les aéroports de Sfax, Tozeur, Gafsa, Tabarka et Gabès offrent un accès gratuit au Wifi    Météo : Pluies parfois intenses attendues l'après-midi sur les régions ouest du nord et du centre    Les Etats-Unis envisagent d'expulser des migrants vers la Libye    Paris Saint-Germain – Arsenal : heure du match et chaînes de diffusion    Le déficit commercial américain atteint un niveau record en mars    Crise Inde-Pakistan : Israël soutient New Delhi, l'ONU et la Chine appellent à éviter une guerre    Tensions accrues entre l'Inde et le Pakistan : des dizaines de morts et de blessés    Décès de Fathi Ennaïfar : l'ingénieur polytechnicien, le poète, et le soufi    Natation : la Tunisie accueille le 8e Open Masters avec 18 pays représentés    Masters 1000 de Rome : Ons Jabeur espère rééditer son exploit de 2022    Par Habib Ben Salha : La Bsissa prend la route de l'UNESCO    Classement WTA : Ons Jabeur chute à la 36e place après son élimination à Madrid    Gymnastique rythmique : la Tunisie en lice au Championnat d'Afrique au Caire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Divines, les femmes
Littérature
Publié dans La Presse de Tunisie le 16 - 01 - 2014

«Toutes les peines sont permises, toutes les peines sont conseillées ; il n'est que d'aimer» «Le futur intérieur», Françoise Leroy
On a tellement parlé de « La Liste de mes envies » que, par curiosité et en ce début d'année, nous avons voulu comparer les nôtres avec celles de la narratrice qui se décrit d'emblée et sans aucune complaisance comme une femme ordinaire, menant une vie tout à fait ordinaire , mais ayant un cerveau empli par des rêves. Elle découvrira plus tard que ses rêves coïncident avec ce qu'elle vit et que la déception n'est jamais loin de l'illumination.
Elle se rêvait styliste à vingt ans, rêvait du même coup de Solal, le prince pas si charmant de «Belle du Seigneur» d'Albert Cohen, et des acteurs américains. Elle aime aussi les mots, les phrases longues et «les soupirs qui s'éternisent» : «J'aime bien quand les mots cachent parfois ce qu'ils disent».
A quarante-sept ans, elle découvre que sa vie n'a pas la «grâce parfaite» que sa maman lui souhaitait le soir, en lui murmurant : «Tu as du talent Jo, tu es intelligente, tu auras une jolie vie». N'anticipons pas. Notre narratrice s'appelle Jocelyne, n'est pas jolie, n'a pas les yeux bleus « dans lesquels les hommes se contemplent, dans lesquels ils ont envie de se noyer pour qu'on plonge les sauver », n'est même pas mince, elle est grassouillette, quelconque.
Jo épouse Jocelyn —une chan Divines, les femmes
ce sur des millions—, qui lui susurre en la voyant pour la première fois qu'elle est belle. Elle sait qu'il lui ment, décide de faire un accroc dans la soie de ses rêves en acceptant la petitesse d'une existence qui se profile déjà. Ne lui dit-il pas «t'es gentille toi Jo, t'es une bonne petite» et elle de fondre de tendresse : «La finesse, la légèreté, la subtilité des mots, il ne connaît pas bien. Il préfère les résumés aux raisonnements, les images aux légendes et les épisodes de Colombo «parce que dès le début, on connaissait les assassins», tout comme les opéras où l'on meurt en chantant.
On perd la tête !
La vie passe dans la monotonie la plus crasse. Entre la mercerie, la bien-nommée «dixdoigtsd'or» - cela ne s'invente pas -, les clientes qui papotent, le manque lancinant de ses enfants partis vivre leur propre vie, les désillusions cruelles et l'ennui, Jocelyne laisse couler les vagues à l'âme des femmes qui attendent, des Pénélope qui aimeraient juste avoir la chance de décider de leur vie, «le plus grand cadeau qui puisse leur être fait». Jo découvre qu'à quarante-sept ans, elle n'a pas décidé de sa vie ; elle en est , néanmoins et tout compte fait , satisfaite. Va-t-elle rester mercière toute sa vie ? «T'a pas envie d'autre chose ?», lui demande , un jour, son amie Danièle. Alors, elle fonce, achète un bulletin de l'Euro Millions, une envie comme ça... Et , contre toute attente, elle gagne. Une chance sur soixante-seize millions ! Dix-huit millions d'euros plus tard et quelques centimes, elle aura la certitude qu'aucune somme d'argent, jamais, ne vaudrait de perdre un quotidien , somme toute acceptable, et «l'amour avec un grand A, notre rêve à toutes ». Le chèque, le Graal, en poche, elle réalisera la vanité des choses, à ce que l'argent ne répare jamais, «à ce que maman n'a pas eu, dont elle rêvait et que je pourrais lui offrir désormais». N'est-elle pas riche maintenant ? Ne va-t-elle pas pouvoir acheter ce qu'elle veut et faire des cadeaux et se méfier parce que, «quand on a de l'argent, soudain, on vous aime, on vous demande en mariage, on vous envoie des poèmes, des lettres d'amour, des lettres de haine, on vous demande de l'argent pour soigner la leucémie d'une petite fille qui s'appelle Jocelyne , comme vous... ». Les doutes s'installent. Elle se tait, elle cache le chèque sous la semelle intérieure d'une vieille chaussure. Et dresse la liste de ses besoins : une lampe, un porte-manteau, des poêles, un micro-ondes, un presse-légumes, un couteau pour le pain...
Une flaque de lumière
Dans sa tête, elle ne se sent pas riche. Elle possède juste la tentation. Une autre vie possible. Une nouvelle maison. Une nouvelle télévision. Plein de choses nouvelles et une liste de ses envies, de ses folies : «Arrêter la mercerie et reprendre des études de stylisme, une Porsche Cayenne...».
Tout au long de cette lecture, on se demande ce qu'elle va faire Que va-t-elle devenir ? Ses enfants voudraient-ils leur part ? Son mari l'empoisonner ? La convoitise ne brûle-t-elle pas tout sur son passage ? Va-t-elle dévaliser les boutiques, se déplacer en limousine ? Oui et non et pas avec tous les siens. Elle va s'abandonner aux délices de la sagesse et de l'oubli après avoir digéré la trahison de son mari : «Voilà pourquoi j'avais tu l'incroyable. Retenu l'hystérie( ...) Réaliser les rêves des autres, c'était prendre le risque de les détruire».
Elle comprendra surtout que nos besoins sont nos petits rêves quotidiens : «Ce sont nos petites choses à faire, qui nous projettent à demain, à après-demain, dans le futur ; ces petits riens qu'on achètera la semaine prochaine et qui nous permettent de penser que la semaine prochaine, on sera encore vivants».
Après la déception, après son errance et ses secrets, elle rôdera sans une fausse note et avec une agilité de cœur et d'esprit au plus près de sa vie et, dans une flaque de lumière, elle dressera une dernière liste, rien que pour elle, pour ces petits plaisirs qui font du bien, comme aller chez le coiffeur , partir ailleurs , choisir une nouvelle garde-robe...
Qui dira qu'une mercière et la littérature ne font pas de la bonne dentelle ? Ce roman nous rappelle «L'Elégance du hérisson» de Muriel Barbery : même souplesse d'esprit, même cynisme, même autopsie de l'âme humaine. «La Liste de mes envies» est un roman écrit par un homme si près des femmes. Grégoire Delacourt les aime et les comprend et , pour elles, il leur tricote de l'amour et apaise ainsi leur douleur, leur souffrance, leur fragilité, leur force, lorsque le souvenir martèle sa présence et que le temps et les blessures saturent la mémoire.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.