Les participants au Dialogue national prennent les choses en main, alors que la commission des compromis n'a pas encore tout résolu C'était dans l'air depuis le démarrage des discussions, au sein de la Commission de législation générale, du projet de loi relatif à la loi électorale sur la base de laquelle se tiendront, avant fin 2014, les élections présidentielle et législatives. On s'attendait, en effet, à ce que les constituants membres de la commission ne s'entendent pas sur l'assise fondamentale de la loi électorale à l'instar de l'interdiction de la publicité politique, du financement public de la campagne électorale, du parrainage des candidats à la présidentielle et aux législatives, de l'exclusion des anciens rcdistes, à l'accompagnement des électeurs analphabètes, etc. Les premières séances plénières ont donné le ton et l'on s'est retrouvé dans l'obligation de réactiver la Commission des compromis qui a déjà fonctionné lors de la finalisation de la Constitution fin janvier dernier. Ainsi, les points de discorde (au nombre des vingt ajournés lors de la discussion générale) ont-ils été transférés à la Commission des compromis qui se réunit quotidiennement sans pour autant parvenir au consensus escompté. Pire encore, la commission en question est depuis samedi dernier boycottée par les constituants du Bloc démocratique (à l'exception des représentants d'Al Joumhouri) qui estiment que ses délibérations ne mèneront à aucun consensus dans la mesure où elle est sous la coupe d'Ennahdha et des partis gravitant dans son sillage. Les constituants du Bloc démocratique vont plus loin en menaçant de ne pas participer au vote du projet sur la loi électorale, dans sa totalité, «étant convaincus que la loi électorale ne fera que reproduire le paysage politique né à la faveur des élections du 23 octobre 2011 ayant enfanté l'actuelle Constituante». Le Dialogue national saisi Avec le retour des réunions du Dialogue national à la suite d'une période d'hibernation qui a duré près de trois mois, voilà que les points de discorde sur la loi électorale sont désormais du ressort des partis politiques qui statuent au siège du ministère de la Justice, de la Justice transitionnelle et des Droits de l'Homme, à quelques mètres de l'ANC. Pas plus tard qu'hier, les participants au Dialogue national ont tenu deux réunions. La première a été consacrée à l'audition des experts sur le principe de la concomitance ou la séparation des élections présidentielle et législatives. La deuxième, tenue l'après-midi, était consacrée à la définition de la proposition que le Dialogue national va soumettre à l'ANC concernant l'article en question. Pour en savoir plus sur la mission confiée à la commission des compromis et au Dialogue national pour trancher la question des points de discorde, La Presse a sollicité l'avis des Pr Abdelmajid Ibdelli et Amine Mahfoudh, connus pour leur suivi continu de tout ce qui se passe au sein de l'ANC et du Dialogue national. On va s'habituer au système de l'illégalité «Nous sommes actuellement dans une phase hors la loi. N'ayant pas de statut juridique, la commission des compromis n'a le droit ni de proposer ni de recommander quoi que ce soit. Malheureusement, on est en train de glisser dans un système que j'appelle système de l'illégalité. Ce système consiste à convaincre l'opinion publique, via les médias, que les illégaux ont acquis là une certaine légalité qui leur permet de statuer sur des questions qui ne sont pas de leur ressort. On oublie également que les constituants n'ont de consignes à recevoir de personne dans la mesure où c'est à l'ANC que revient la responsabilité d'élaborer le texte final de la loi électorale. Ni le Dialogue national ni aucune autre structure n'ont le droit d'y intervenir», fait remarquer Abdelmajid Idbelli, professeur de droit public. Quant à Amine Mahfoudh, expert en droit constitutionnel, il estime que «le vrai débat relatif au mode de scrutin a été marginalisé aussi bien par les constituants que par les participants au Dialogue national. En agissant ainsi, on fait le nid aux crises permanentes». Volet points de discorde sur la loi électorale, Amine Mahfoudh estime que le Dialogue national «n'a aucune chance de parvenir au consensus attendu puisque ce sont les calculs partisans qui finiront par prévaloir». «Malheureusement, conclut-il, avec les agendas contradictoires, l'on ne sait pas si nos partis politiques ont décidé d'assainir le climat politique général ou de l'envenimer davantage avec la création d'instances comme celle de la Vérité et de la dignité qui je considère comme un monstre juridique qui ne fera que rendre les choses plus difficiles, contrairement aux choix d'autres pays à l'instar de l'Afrique du Sud».