Ennahdha fait la promotion de son initiative pour un candidat unique à l'élection présidentielle garantissant la cohésion nationale autour de sa personne. Les partis politiques dénoncent «un acte de spoliation du droit du citoyen de choisir son futur président» Comme l'on s'y attendait, Ennahdha, hier, est revenu à la charge pour faire la promotion médiatique de sa proposition exprimée, dimanche dernier, par le Conseil de la choura du parti appelant au choix d'un candidat consensuel à l'élection présidentielle. Hier, Ali Laârayedh et Abdelhamid Jelassi se sont partagé les tâches pour expliciter les fondements de l'initiative de leur parti. Pour Laârayedh, «l'initiative n'est pas contraire aux principes démocratiques et si nous avons opté pour cette démarche, c'est pour éviter l'éparpillement des voix, réduire les tiraillements politiques et garantir la cohésion nationale autour d'un symbole». Quant à Abdelhamid Jelassi, il révèle qu'«Ennahdha n'a pas encore de candidat, ni issu de ses rangs, ni en dehors du parti, mais cherche le consensus autour d'une personnalité unique». En plus clair, Ennahdha propose aux Tunisiens de trouver, à travers leurs partis politiques et organisations nationales, «une personnalité politique ou indépendante» ayant la qualité «d'un symbole» et garantissant la cohésion nationale autour de sa personne. Seulement, ce qui est certain pour le moment, cette personnalité ne se trouve ni au sein d'Ennahdha ni parmi les partis qui soutiennent généralement ses orientations. Ennahdha impose son agenda «Il est clair qu'Ennahdha vise à imposer son agenda sur la scène politique nationale et orienter les événements en fonction des chances qu'il estime détenir, que ce soit pour l'élection présidentielle ou pour les législatives», commente Abderrazak Hammami, secrétaire général du Parti du travail patriotique démocratique. «Aujourd'hui, ajoute-t-il, avec l'appel à dénicher un symbole et une personnalité unique pour diriger la Tunisie au cours des cinq prochaines années, ils reviennent à la pensée unique de Ben Ali et à son faux consensus dont les Tunisiens ont souffert plus de deux décennies. L'on se demande alors: pourquoi organiser des élections présidentielle ou même législatives ?» Pour Abderrazak Hammami, «ce type de consensus auquel appelle Ennahdha viole le droit à la citoyenneté, ferme la porte à la compétition loyale et saine et vide la démocratie de son essence même». «Au sein du Parti du travail patriotique et démocratique, nous estimons que l'heure est plutôt à la consécration du droit absolu du citoyen à choisir ses gouvernants sur la base de programmes politiques et économiques proposant de véritables solutions aux problèmes du pays», conclut-il. Ils veulent prendre le futur président en otage Abdeljelil Bédoui, universitaire et vice-président d'Al Massar, considère qu'Ennahdha «cherche à travers son initiative, sous le prétexte du consensus, à transformer son échec après sa sortie obligée du gouvernement, en une volonté de faire éviter au pays les dangers du chaos ou du désordre, en faisant prévaloir l'intérêt national aux dépens des règles du jeu démocratiques et de la compétition loyale». «Il est clair maintenant que les nahdhaouis n'ont pas de candidat qui représentera le parti. Ils n'ont pas également un candidat proche de leurs choix. C'est la raison pour laquelle ils veulent participer au choix d'un candidat unique qui sera leur otage. Seulement, ils oublient que l'ère du candidat unique et du candidat-symbole, le candidat qui assure l'unanimité, est révolue à jamais. Cette initiative confisque, en réalité, le droit du citoyen à choisir son futur président et constitue un déni du droit à la différence et à la diversité». Pour Noureddine Ben Ticha, membre du comité directeur de Nida Tounès, «les arguments développés par Ali Laârayedh et Abdelhamid Jelassi ne résistent pas à l'analyse sérieuse dans la mesure où l'élection présidentielle se déroulera à deux tours et il n'y aura pas d'éparpillement de voix lors du second tour». Quant au choix d'une personnalité unique ou d'une personnalités symbole, il précise : «C'est tout simplement un acte de spoliation qualifiée du droit du citoyen à choisir librement et démocratiquement son futur président. C'est le retour à la pensée unique qu'on croyait révolue avec la chute de Ben Ali. Aujourd'hui, ils veulent nous faire revenir à la case départ». «Avec cette initiative, Ennahdha essaye de maintenir, à tout prix, son leadership sur la scène politique nationale et oublie que la donne générée par les élections du 23 octobre 2011 a vécu. Nous sommes en période préélectorale et aucun parti politique ne peut s'arroger le droit de conduire l'opération électorale. Ce sont les résultats des élections qui auront le droit de déterminer qui va conduire le pays. En tout état de cause, au sein de Nida Tounès, nous rejetons catégoriquement ces initiatives qui cachent des intérêts partisans qui ne disent pas leurs noms», insiste-t-il.