Finance Le Japon veut s'attaquer aux inégalités sociales Le gouvernement japonais, qui a décidé de plafonner les dépenses de l'Etat pendant trois ans au niveau de celles de cette année (71 000 milliards de yens, soit 634 milliards d'euros), va s'attaquer à l'impôt sur les revenus des plus riches. Dans une interview au Wall Street Journal, le nouveau ministre des Finances, Yoshihiko Noda, estime que l'Archipel est à «un moment où un peu plus d'égalitarisme (...) doit guider notre politique fiscale» et il affirme que les réformes en cours seront «conçues avec l'idée de régénérer la fonction de redistribution de l'impôt». Si le Japon figure, avec les Etats-Unis et l'Allemagne, parmi les trois pays qui comptent le plus de millionnaires (1,65 million de personnes sur 10 millions dans le monde), il est aussi celui qui affiche le taux le plus élevé d'habitants vivant sous le seuil de pauvreté parmi les pays développés. Un Japonais sur six est dans ce cas. L'écart entre les riches et les pauvres ne cesse de croître et la classe moyenne a tendance à disparaître. La restaurer, estime Yoshihiko Noda, est «la clé pour reconstruire la force du Japon». Actuellement, l'impôt sur le revenu, dont une partie est déclarée et l'autre prélevée à la source, comporte six tranches, de 5 % à 40 %. C'est cette dernière qui est plus particulièrement visée et concerne les revenus annuels supérieurs à 18 millions de yens, soit 163 600 euros. Portée politique Economiquement, cette mesure risque d'être d'une portée limitée. Mais, politiquement, elle vise à mieux faire passer auprès de l'opinion publique la hausse de la taxe à la consommation que le premier ministre, Naoto Kan, promet pour cet été. De 5 %, l'une des plus basses du monde, elle pourrait passer à 10 %. Toutefois, le gouvernement doit se montrer prudent. C'est la raison pour laquelle il souhaite qu'elle fasse l'objet d'un débat national après les élections sénatoriales du 11 juillet et Naoto Kan affirme qu'elle n'interviendra «pas avant deux ou trois ans, voire plus». Endetté à hauteur de plus de 200 % de son PIB (produit intérieur brut), le Japon n'a pas le choix. Même s'il n'est pas dans la situation de la Grèce puisque 95 % des bons du Trésor du pays sont détenus par des Japonais et non par des étrangers, il a d'ores et déjà prévenu que «la réforme fiscale sera drastique». Mais en même temps il se veut rassurant. Il révise sa prévision de croissance de 1,4 % à 2,6 % pour l'année budgétaire 2010-2011. Il promet un plan de soutien sur dix ans aux entreprises qui investiront dans un certain nombre de secteurs phare, l'environnement et la santé notamment, avec, à la clé, la création de 5 millions d'emplois. Un exercice d'équilibre difficile pour Naoto Kan. (Source: Le Figaro) Conjoncture Les investissements européens dans le monde chutent d'un quart La crise économique et financière a donné un sérieux coup d'arrêt aux investissements directs réalisés par les pays de l'Union européenne dans le reste du monde. Ils ont reculé d'un quart (24 %) l'an dernier, selon Eurostat et se sont montés à 263 milliards d'euros au lieu de 348 milliards en 2008. Leur principale destination est restée les Etats-Unis mais les montants se sont effondrés passant de 121 milliards d'euros en 2008 à 69 milliards l'an dernier. L'Union européenne a également considérablement réduit ses placements industriels et commerciaux en Russie (où elle réalise un désinvestissement de 1 milliard d'euros au lieu d'investissements de 26 milliards en 2008). Même tendance baissière au Canada (3 milliards au lieu de 8), à Hong Kong (3 milliards au lieu de 6) et au Japon (0,1 milliard au lieu de 6). A titre de comparaison, les IDE vers la Chine ont représenté 5 milliards d'euros en 2009. La Suisse, destination prisée A noter en ces temps d'extrême volatilité et de grande incertitude que les investissements directs vers les centres financiers off shore, type Liechtenstein ou Bahamas, ont gonflé l'an dernier de 39 à 60 milliards d'euros et, vers la Suisse, de 34 à 45 milliards d'euros. A l'inverse et en dépit de la crise cette fois, les investissements étrangers dans l'Union à 27 se sont accrus de 12 %, de 199 à 222 milliards, faisant toujours de l'Europe un investisseur net dans le monde. Largement premiers de la liste, les Etats-Unis ont presque doublé leurs flux de 2008 avec 95 milliards d'euros investis contre 50. Les flux en provenance du Canada, du Brésil et du Japon ont, pour leur part, baissé. Analyse de la conjoncture Philippe CHAUMEL (Rothschild & Cie Gestion ) Au bout du compte, l'Europe va bénéficier de la croissance mondiale avec une monnaie plus faible. Nous sommes trop obnubilés par des déficits qui, en grande partie, sont conjoncturels. Ils se réduiront essentiellement grâce à la reprise des recettes liées à la croissance. Comme à chaque début de cycle, les marchés sont inquiets sur la vigueur de la reprise, alors que les exemples de rechute de l'activité sont extrêmement rares dans l'histoire économique. Au fil des mois, les entreprises révisent leurs perspectives bénéficiaires à la hausse, et ce, sur un marché où les niveaux de valorisation sont très attractifs, avec des primes de risque exceptionnelles par rapport aux marchés obligataires. Emmanuel MORANO (UFG LFP) Par défaut, les actions sont attractives, parce que les rendements sur les classes d'actifs sans risque sont faibles. Donc, il y a des poches d'opportunités, notamment à moyen/long terme sur la zone émergente. Mais attention, le monde concurrentiel est en train d'évoluer. Les grands groupes de ces zones commencent à « damer le pion » aux entreprises européennes et américaines. Donc, la toile de fond est assez difficile à cerner, avec une conjoncture macroéconomique en ralentissement et un risque non négligeable, me semble-t-il, de révision à la baisse des prévisions de croissance globale sur l'Europe et les Etats-Unis. S'agissant des perspectives bénéficiaires des entreprises, il faut tempérer, car il existe des écarts de valorisation relativement importants entre les secteurs d'activité. On a peut-être trop misé sur la thématique de croissance de certains secteurs d'activité et de certaines entreprises. Isabel LEVY (Métropole Gestion) La question qui se pose pour l'Europe n'est pas la taille de ses déficits, mais la déficience de politique économique commune. Aux Etats-Unis, lorsque des Etats fédéraux sont dans une situation difficile, cela ne choque personne que le coût du crédit de l'Etat de Californie soit supérieur à celui auquel emprunte un Etat riche aux Etats-Unis. Qu'il y ait une restauration des primes de risque à l'intérieur de l'Europe, en particulier sur les spreads que les Etats subissent, cela n'a rien de choquant mais, ces temps-ci, l'information prend des proportions importantes , parce que les marchés sont tout simplement en train de tester la solidité de la politique économique européenne. Pour ma part, je ne crois pas du tout à une implosion de la zone euro, car personne n'y a intérêt. L'harmonisation reste donc le défi pour les politiques européens. Par ailleurs, on ne peut que mentionner l'adaptation exceptionnelle des entreprises et il faut admettre que, depuis quinze ans, le monde des sociétés cotées a complètement changé. Elles ont revu leurs process de production et toute leur structure de coûts. Les législations européennes, de réputation difficile, ne semblent pas avoir été une entrave. Isaac CHEBAR (DNCA) Les entreprises européennes sont en très bon état et ne sont pas trop endettées. Pendant la crise, elles ont procédé à des ajustements massifs. De vrais coûts ont disparu, qui ne reviendront plus. Les entreprises sont donc devenues plus efficaces et ce sont elles qui vont nous sortir de cette nasse. Ce n'est pas tellement la demande, mais les entreprises qui vont créer les conditions de la croissance. (Source: Les Echos)