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Du monde du théâtre au théâtre du monde
Propos esthétiques
Publié dans La Presse de Tunisie le 27 - 06 - 2014


Par Raouf SEDDIK
Depuis que Nietzsche en a fait le thème inaugural de sa philosophie, beaucoup d'entre nous savent que le théâtre est né en Grèce et qu'il ne ressemblait guère à ce que nous connaissons. Il s'agissait d'une manifestation à caractère religieux, en l'honneur de Dionysos, où le chant et la danse avaient une place prépondérante... Les intermèdes parlés représentaient de brèves parenthèses pour recentrer le propos à l'adresse des spectateurs : ce dont s'acquittait le coryphée, qui dirigeait le chœur...
Autrement dit, le théâtre, en ces temps reculés, n'avait rien à voir avec un quelconque divertissement de l'esprit et n'avait aucunement la prétention non plus de servir de miroir critique de la société... Ce qui correspond à peu près aux deux facettes du théâtre d'aujourd'hui... A moins que l'on y ajoute les grandes œuvres de la tradition universelle, qui ont un caractère presque métaphysique et dont le propos est de nous peindre l'homme face à son destin.
En fait, il n'est pas tout à fait exact de dire que le théâtre est né en Grèce : c'est le théâtre tel qu'il s'est développé en Europe depuis la Renaissance qui l'est. Car il existe dans le monde des expériences dont on ne voit pas de quel autre vocable on pourrait les désigner si ce n'est par celui de «théâtre». L'exemple le plus éloquent, de ce point de vue, est ce qui s'est justement appelé le «théâtre» Nô... Or le Nô, qui nous vient du Japon, a également une origine religieuse. Il relève d'une logique du cérémonial. On y trouve également ce qui a caractérisé le théâtre grec à ses débuts : le chant et la danse... Bien que, en fait de chant, il faudrait plutôt dire qu'il s'agit d'un parler stylisé, dépouillé de ses intonations personnelles. Inutile, par conséquent, d'y chercher la douceur d'une mélodie. Les spectateurs japonais qui, par attachement à la tradition ou par goût, continuent de fréquenter le théâtre Nô, trouveraient certainement très déplacé le fait qu'on cherche à les charmer par des accents agréables ou qu'on essaie de les séduire par des traits d'esprit dans l'air du temps. Et c'est précisément ce qui frappe, d'ailleurs : la fidélité du Japon aux formes originelles de son théâtre, par opposition à la façon dont, en Occident, on a enseveli les anciennes formes sous de nouvelles.
Nietzsche, qui était remonté contre la culture de son temps, a cru déceler à travers la perte, subie par le chœur, de sa place centrale dans la tragédie les tout débuts de la décadence de la culture européenne. Le pendant d'une telle évolution, c'était l'arrivée de Socrate : du raisonneur, du dialecticien Socrate, qui mettait un terme au souffle métaphysique de penseurs comme Héraclite ou Empédocle... Pour lui, ce glissement vers un théâtre qui se tourne davantage vers la raison, et vers la morale, est une trahison de l'âme originelle du théâtre : âme dont on pourrait dire, en paraphrasant le titre d'une des œuvres plus tardives du philosophe allemand, qu'elle est « par-delà le bien et le mal » !
Mais la thèse de la trahison ne saurait même avoir de valeur que si on envisage aussi l'autre thèse, celle qui nous dit qu'en réalité, à partir d'un théâtre qui se confond avec un culte rendu à une divinité, on va progressivement s'acheminer vers un théâtre humanisé, à travers lequel l'homme met en scène sa propre condition et en fait l'instrument d'une sorte de lucidité sur soi... Thèse d'une sorte d'appropriation par l'homme d'un outil par quoi, de façon collective et festive, il énoncerait ou dénoncerait la vérité de son existence, par-delà le voile de la quotidienneté et les hypocrisies de la cupidité.
D'autant que l'expérience du théâtre engage une double attitude, qui détermine peut-être la personnalité moderne. En quel sens ? Dans le sens où, par le théâtre, l'homme est non seulement pris dans un effort de vérité en direction de son existence, mais il est aussi poussé dans une sorte de déréalisation du réel... Puisque sa vie de tous les jours, celle qui se déroule en dehors de la scène du théâtre, finit elle-même par prendre l'aspect d'une pièce improvisée... Mais improvisée, peut-être parce qu'on a simplement oublié qu'on en a appris le texte un jour : qui sait ! C'est, selon l'expression de l'Espagnol Calderon de la Barca, le «Grand théâtre du monde»... Shakespeare dira de son côté : « Le monde est un théâtre et chacun y joue son rôle ! »
Dire de la vie qu'on mène, avec toutes ses aventures et mésaventures, qu'elle n'est en somme qu'une sorte de pièce qu'on joue, c'est s'en déprendre. Comme s'il y avait, avant elle ou après elle, une autre vie à laquelle on ferait retour, à l'image du comédien qui fait retour à sa vraie vie une fois le rideau tombé et le public des spectateurs rentré chez lui. Sauf qu'en réalité, l'homme moderne est précisément celui qui vit sa vie comme si c'était une pièce qu'il jouait, mais sans du tout être sûr qu'il existe autre chose en dehors d'elle... Cette pièce qu'il joue, c'est peut-être bien tout ce qu'il a ! Quand le rideau tombe, il n'y a pas de retour chez soi. Mais c'est quand même une pièce et il est l'acteur d'un rôle...
Nous disons que cela correspond à une caractéristique de l'homme moderne parce que ce dernier est par définition sans illusion : il n'accepte plus de se donner des raisons de vivre en dehors de ce que la vie peut lui apporter comme consolations, ou comme satisfactions... Reste à savoir si cette modernité lui interdit de réapprendre à chanter et à danser, ou au moins de comprendre à quel besoin profond répondaient chants et danses chez ceux qui, en Grèce comme au Japon, ont inventé le théâtre...


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