Ceux qui s'apprêtent à acheter les gâteaux de l'Aïd doivent faire face à la contrefaçon et à la hausse des prix. C'est mi-Ramadan, les familles tunisiennes commencent à penser aux gâteaux de l'Aïd. Au terme d'un mois de jeûne, la fête de l'Aïd El Fitr marque la fin du mois saint par la dégustation des pâtisseries traditionnelles dites «hlou» qui enchantent les papilles des enfants et des adultes. Faute de temps, la plupart des Tunisiens achètent ces sucreries chez les pâtisseries qui affichent parfois des prix exorbitants par rapport à leurs bourses. Vendus généralement en pièces de 50 ou 60 dont les prix varient selon la réputation des pâtisseries. La moyenne gamme se situe entre 25 et 60 dinars en fonction du genre de fruit sec que contiennent ces gâteaux. Un kg de baklawa au pignon atteint les 100 dinars. Autrefois, les femmes : cousines, voisines et autres parentes et amies préparaient elles-mêmes les gâteaux de l'Aïd. Elles achetaient les fruits secs, la farine et autres ingrédients et se réunissaient, souvent le soir après la rupture du jeûne, pour confectionner toutes sortes de variétés de gâteaux, allant de la «baklawa du Bey» à la «baklawa turque» en passant par «kaâk El warka», «Ghraïba aux pois chiches», «Ghraïba aux amandes» et «ghraïba de sorgho», «sablés» et «samsa». Cela se passait dans une ambiance conviviale où fusaient les youyous et les rires. Les hommes avaient, pour leur part, la charge de porter ces pâtisseries aux fours des boulangeries pour la cuisson. Plus de sucre que de fruits secs Autres temps, autres mœurs, depuis quelques années, de plus en plus de Tunisiens recourent aux pâtisseries pour acheter les gâteaux. «C'est plus pratique, même si les gâteaux faits maison restent plus savoureux», reconnaît Ilhem, fonctionnaire dans une entreprise privée. Toutes ces variétés de gâteaux sont disponibles chez les pâtissiers à des prix jugés parfois par certains consommateurs «très chers». «Même celles qui sont préparées à la maison reviennent cher en raison du coût élevé des fruits secs : amandes, pistaches, noisettes et pignons», fait remarquer Chedlia, qui travaille depuis 12 ans dans une pâtisserie du centre de Tunis. Son collègue, Mohamed, dit travailler plus de 16 heures pour parvenir à réaliser les commandes de plus en plus nombreuses au mois de Ramadan. Un rythme de travail accéléré, exigeant une forte concentration et une solidité physique pour satisfaire une clientèle de plus en plus exigeante du point de vue qualité. S'agissant justement de qualité, les nutritionnistes s'accordent à dire que pour comprimer les prix, certains pâtissiers augmentent la quantité de sucre au détriment des fruits secs, ce qui fait augmenter le poids. La consommation abusive de ces confiseries peut être nuisible à la santé. «Mieux vaut réaliser des pâtisseries traditionnelles moins coûteuses, mais meilleures pour la santé comme le "makroudh" à base de semoule et de dattes ou la "ghraïba" à base de pois chiche et de sorgho», conseille un nutritionniste. Eviter la contrefaçon Les familles moyennes et nombreuses ont des soucis pour concilier achat des vêtements de l'Aïd pour les enfants et gâteaux. Fatma, 48 ans, mère de quatre enfants et aux ressources financières modiques, se limite juste à la confection des «Makroudhs aux dattes, ghraïba à la farine et aux pois chiche et aux biscuits. L'essentiel est de ne pas se priver et d'avoir une table bien garnie le jour de l'Aïd», se contente-t-elle de dire. Préserver les traditions et les coutumes ancestrales, tout en faisant plaisir aux enfants qui attendent fébrilement ce jour de fête. Sana, jeune étudiante en sociologie, explique que «la fabrication des pâtisseries à la maison est certes exténuante pour les mères de famille, mais cela permet de raffermir les liens entres les familles et mêmes les voisins. Cela évite, d'autre part, l'achat de gâteaux contrefaits, notamment en cette période de fièvre acheteuse», note-t-elle. Malgré cela, Hanan, cadre dans une entreprise, se plaint de la hausse des prix de cuisson dans les boulangeries. «Un plateau de baklawa peut atteindre plus de 20 dinars, ce qui n'est pas à la portée de tout le monde. Mais étant donné que je n'ai pas le temps, je préfère commander mes gâteaux à la pâtisserie car je pense que côté financier cela revient au même. Pour ce qui est de la contrefaçon, je fais confiance à mon pâtissier. Je sais qu'il est honnête». Un niveau de consommation élevé La consommation annuelle de sucre en Tunisie dépasse la moyenne mondiale. Selon les chiffres de l'Institut national de la consommation (INC), la consommation nationale est estimée à environ 36 kg de sucre par an. Elle dépasse de loin la moyenne mondiale qui est de l'ordre de 23kg par an, soit une hausse de 13 kg. En moyenne, le Tunisien consomme 15 kg de sucre par an, soit 40 grammes par jour, sans compter les glucides contenus dans les aliments (fruits, légumes, lait et céréales). Durant les quinze dernières années, la consommation de sucre a augmenté de 2,5 kg par personne et par an, cela est dû, selon plusieurs experts, à l'influence de la publicité sur le comportement des Tunisiens. De ce fait, les Tunisiens sont appelés à être conscients de leurs comportements, notamment face à la consommation abusive du sucre. Plusieurs questions liées à l'alimentation devaient être aussi traitées afin de protéger la santé et l'économie