En général, les festivals et les différentes grandes manifestations sont la création d'une ville ou de toute une région. Ils sont en quelque sorte une résultante de l'ensemble des éléments et des facteurs humains, sociaux, culturels et économiques qui leur sont antérieurs et qui composent la cité. Tabarka ou Le Kef, par exemple, existaient bel et bien en tant que villes, avant d'avoir leurs festivals de jazz et Boumakhlouf. Ce n'est pas le cas de Douz… En effet, c'est le festival du Sahara de Douz qui a créé sa ville… dans une large mesure. Conçu à partir de 1910 en défilé de chameaux et de méharis, lors de la saison de la cueillette des dattes, il permettait aux nomades qui étaient les gens de la région de se «sédentariser» pendant la période qu'il durait. La création du souk et des oasis a fini par les installer définitivement. La ville a commencé à naître… C'est un peu tout cela qu'on apprend en visionnant le court métrage (22 minutes) de Karim Aouadi, intitulé Douz, la rose des sables. Le texte fort édifiant écrit par le Pr Marzougui, notre confrère Noureddine Bettaïeb y apporte des éléments supplémentaires sur l'importance économique, culturelle et sociale du festival, hier comme aujourd'hui, dans la mesure où au-delà de sa rentabilité de la promotion du secteur touristique qu'il assure, il réduit, sinon abolit, au moins le temps qu'il dure, plusieurs clivages sociaux. C'est ainsi que l'on voit des femmes sortir en toute liberté, de jour comme de nuit, assister aux différents programmes et se créer des relations avec les autres visiteuses. En fait, c'est toute la ville qui prend des couleurs festives inhabituelles. Ce documentaire, on le doit à l'association Arts et Patrimoine de Douz. Créée en 2005, à l'initiative d'un groupe de créateurs et d'artistes de la région, avec le soutien du comité culturel régional de Kébili, cette association s'attelle à collecter et à réunir tout ce qui a trait au patrimoine oral, à sauvegarder la musique traditionnelle et les métiers d'artisanat, à soutenir les jeunes artistes, dans le sens de la promotion des activités à aspect anthropologique dépassant le «folklore touristique» en faveur de la dimension universelle des valeurs des déserts du monde. Aussi, l'association a-t-elle, entre autres, participé à des rencontres internationales qui se sont tenues autour de ce dernier thème dans plusieurs pays : France, Espagne, Italie… Malgré son jeune âge, elle organise, d'ores et déjà, des manifestations régulières dont la rencontre des arts plastiques et de la photographie, des mini-festivals pour enfants («enfance et création») et des ateliers d'écriture. Elle contribue ainsi à ne pas limiter le culturel dans la ville de Douz au seul festival du Sahara qui demeure, malgré tout, l'aïeul et la manifestation phare de tous les festivals.