La campagne électorale pour les législatives de 2014 a officiellement démarré le samedi 4 octobre. A minuit et une minute du vendredi 3, les premières affiches ont été collées aux emplacements prévus, pour chaque liste et pour chaque circonscription. Sans surprise, Nida Tounès et Ennahdha ont été les premiers à se lancer dans la course en occupant les lieux et en annonçant le démarrage officiel de leur campagne. «Ce sont les deux plus grandes machines du paysage politique actuel; rien ne sert de les concurrencer sur leur terrain, celui de la mobilisation; il faudra en revanche innover et agir intelligemment pour se faire une place dans cette bataille où l'argent politique a coulé à flots et déformé les règles du jeu démocratique électoral», témoigne Kamel Kasbi, tête de liste du Mouvement destourien sur Tunis 2. Malgré tout, Nida et Ennahdha ont été vite rattrapés par d'autres partis parmi les plus connus, bien sûr — n'oublions pas qu'il y a plus de cent partis politiques reconnus en Tunisie — comme Al Moubadra, Afek, Al Joumhouri, Alliance démocratique, Mouvement destourien, Tayyar Al Mahabba, Wafa, etc. On est tout de même très loin de la ruée. Les deux premiers jours de l'Aïd El Idha ont été plutôt calmes et il faudra s'attendre à une occupation progressive du terrain à partir d'aujourd'hui. Toutefois, force est de constater qu'aucune étape du processus électoral n'est épargnée par la violence, quelle que soit sa nature. C'est ainsi que des actes de vandalisme ont été constatés en différents endroits visant les listes électorales qui ont été arrachées et souillées. Ce type de violence, s'il revêt une connotation politique, n'en est pas moins une violence physique et morale qui exprime l'intolérance et le rejet de l'autre et par ricochet, de l'exercice démocratique pour lequel tous les candidats sont en lice. Après près de quatre ans de transition démocratique, de luttes, de déceptions et d'espoirs, on en arrive encore à observer ce genre d'abus, voire d'interdits (loi électorale 2014), qui laissent croire que le rêve démocratique n'est pas près de se réaliser. Rappelons, en effet, que ces actions d'intolérance, ces agressions contre le processus électoral ont fait légion en 2011. Le contexte révolutionnaire de l'époque avait justifié les dépassements, toléré les dérapages et expliqué les interdits. Mais que penser aujourd'hui ? Quoi justifier, expliquer ou tolérer? Il est temps que les politiques prennent conscience de leurs responsabilités dans le contrôle du comportement de leurs militants ou sympathisants. L'enjeu est de taille: il s'agit de réussir les premières véritables élections démocratiques, libres, intègres et transparentes — celles de 2011 l'ont été également — mais des infractions et des irrégularités, il y en a eu aussi. Aujourd'hui, la Tunisie, en grandes difficultés économiques et sociales, s'apprête à s'engager dans une nouvelle étape de son histoire, avec un nouveau modèle de gouvernance politique. Et quel que soit ce modèle, la Tunisie n'a plus droit à l'erreur. Le terrorisme attend un seul faux pas des futurs gouvernants pour prendre le pays en otage. Ce sont là des pronostics d'experts en sécurité, approuvés par les responsables du gouvernement actuel. Et même si, comme certains autres observateurs le pensent, ces pronostics sont exagérés, les Tunisiens gagneraient à être vigilants et à se prémunir des effets directs et indirects des guerres fratricides qui sévissent en Libye, en Syrie, en Irak... La campagne électorale pour les législatives du 26 octobre va certainement s'emballer au fil des jours. Les partis politiques sont appelés à faire preuve d'ingéniosité pour que cette campagne soit vécue comme une fête par tous les Tunisiens, parce que c'en est une.