Plus de 30 % du poids et 50 % du volume des poubelles sont constitués d'emballages. Pourtant, papier, carton, bois et verre coûtent plus ou moins cher. Si les Allemands ont pris l'initiative d'ouvrir des super-marchés pour y vendre des produits en vrac et non emballés, c‘est qu'il y avait assurément une raison. Les emballages finissent la plupart du temps dans les poubelles et étant donné que l'intelligence est la qualité la moins partagée par ceux qui ne voient pas plus loin que leur nombril, nos amis allemands ont trouvé, pour ce qui les concerne, qu'il n'y avait aucune raison de jeter leur argent surtout par les temps qui courent. Ils se munissent de leurs sacs traîneau, boîtes et bocaux nécessaires et se rendent dans ces établissements qui poussent partout. Et ils ont bien raison. Consultez le tableau (à la fin de l'article) où figurent certains prix pratiqués pour les produits en vrac et pour les produits emballés, et faites-vous une idée de ce que nous coûtent ces emballages que nous importons en totalité et qui finissent dans les poubelles. Qu'en pensez-vous ? Assurément, nos aïeuls avaient bien raison de constituer des provisions saison par saison et dans les légendaires «matmoura» (greniers) il y avait de tout pour toute l'année. Ce n'est plus le cas, ou pour éviter d'être catégorique, très peu de familles surtout citadines, ont recours à ces provisions que l'on constitue et qui sont d'un grand secours pour les familles à revenus modestes. Ce n'est pas seulement le citoyen qui y perd, mais aussi la communauté nationale qui souvent s'approvisionne en emballages à l'étranger, moyennant des devises sonnantes et trébuchantes. Si nous prenons en considération qu'un emballage (en majorité importé)est destiné à «protéger» un produit, il n'y a aucun doute que cet élément, qui est aussi un argument de vente, doit être pris en considération dans le calcul du prix de vente. Lorsque trop, c'est trop Un emballage, et nous savons qu'il est indispensable, peut être en papier, en carton, en bois, en verre, en matériaux composites etc., coûte plus ou moins cher. Sa principale fonction est la protection du produit au cours du transport ou du stockage. Il le préserve de la poussière, des micro-organismes, de l'humidité, de l'air, etc. Il doit être résistant et pratique. Il représente aussi un argument de vente puisqu'il doit donner aux consommateurs des informations spécifiques à propos des caractéristiques du produit, son mode d'emploi, sa conservation. C'est là un tout autre problème. N'empêche,l'emballage pose problème à plusieurs niveaux: -Plus de 30% du poids (et 50% du volume des poubelles)sont constitués d'emballages. - Qu'un kilo de café en mini-doses utilise 10 fois plus d'emballage qu'un kg du même produit. – Que la vente par lots exige beaucoup plus d'emballages, alors que les dosettes, capsules, portions individuelles appellent le suremballage Dans la fabrication des emballages, on administre des additifs pour plus d'attrait dans les couleurs, l'éclat, la souplesse. Ces additifs, qui coûtent aussi de l'argent, peuvent être ultérieurement toxiques ou mauvais pour la nature, donc source de pollution pour l'air ou le sol. Leur utilisation n'est jamais exempte de calculs et de stratégie commerciale. C'est ainsi que pour plus d'attrait, les emballages pour céréales en carton sont à moitié vides par rapport au sachet contenant le produit. Un jouet emballé dans un carton bien plus grand dupe en premier lieu les enfants et force la main des parents. Ces volumes constituent des handicaps pour le rangement, le transport et la manipulation. Et comme ils sont plus volumineux, ils sont plus lourds, ce qui suppose plus de véhicules et de carburant. Manque d'information Indépendamment de tout calcul économique portant sur les dépenses supplémentaires pour la trésorerie du pays, on constate sur le marché de véritables aberrations. C'est ainsi que le consommateur, mal informé, s'en va acheter du yaourt à boire, qui est en fait du yaourt normal, auquel on ajoute de l'eau et qu'on remplit dans des bouteilles ou pots bariolés de couleurs et franchement tentants. Le client qui ne voit que les couleurs et les oreilles résonnant sous les campagnes publicitaires paie un produit dilué et un emballage supplémentaire qui finira dans la poubelle. Combien a coûté cet emballage ? Multipliez par le nombre d'unités écoulées, la valeur du produit servant à la fabrication de ces pots, bouteilles, et autres paquets de lait et laitages pour vous rendre compte à combien reviennent ces emballages perdus. Il va sans dire qu'il n'est pas question de la qualité de ces emballages et de leur faculté à conserver les produits. Il ne pourrait être question que du prix de revient du produit brut et du produit fini mis sur le marché, d'où des choix stratégiques. Ce qui nous intéresse, c'est bien le manque d'information vis-à-vis du consommateur face à la démarche quelque peu cavalière qu'empruntent certains industriels, lesquels donnent l'impression d'ignorer ces coûts exogènes et qui grèvent l'économie nationale et soumettent les consommateurs à une incroyable pression. Dans les pays développés, les organisations de défense des consommateurs ont des moyens énormes pour mettre en garde la population ciblée, contre certains abus. Les écarts qui apparaissent sur le tableau ci-dessus sont énormes. En Tunisie, il y a beaucoup à faire. Néanmoins, c'est avec plaisir que nous avons constaté ces derniers temps ce qui ressemble à une initiative visant à éduquer le consommateur et à le pousser à réfléchir. Ces campagnes doivent être soutenues, régulières et à de grandes heures d'écoute. Un créneau à exploiter Certaines grandes surfaces font de leur slogan « le moins cher» un argument de vente. Franchement, une baisse de prix dans les serpillières, une casserole ou un sachet de jus de fruits n'aide en rien à supporter la hausse qui a gagné tous les secteurs, favorisés par le manque de contrôle (faute de moyens humains et logistiques suffisants) par les temps qui courent. Si ces grandes surfaces veulent concrétiser leurs slogans, elles pourraient envisager d'ouvrir des rayons où elles offriront des prix réellement plus conséquents. Si à Berlin ou à Francfort cela existe désormais, c'est que c'est faisable et qu'on a compris qu'une action de la sorte ne peut être que volontaire, irrésistiblement portée par un élan citoyen. Nous n'en dirons pas plus.