Investi par l'Assemblée nationale constituante, serment prêté le jour-même pour les nouveaux ministres et secrétaires d'Etat, le nouveau gouvernement formé par Ali Larayedh n'attend plus que la cérémonie officielle de passation de pouvoirs jeudi à la Kasbah pour se mettre aux commandes. Trois heures seulement après le vote de confiance de l'ANC mercredi peu avant 13H, le président de la République a tenu à présider la cérémonie de prestation de serment « pour gagner du temps », nous dit son entourage. Depuis la révolution, c'est la quatrième cérémonie du genre qu'accueille le palais de Carthage, deux avant le 23 octobre 2011, sous Foued Mebazaa, s'agissant des gouvernements de Mohamed Ghannouchi (janviers 2011) et Béji Caïd Essebsi (mars 2011) deux, sous Moncef Marouzki, pour les gouvernements de Jebali (décembre 2011), puis de Larayedh. Aucune des trois précédentes ne s'était tenue dans la grande salle du palais. Cette fois-ci, la scénarisation a été perfectionnée. Ne connaissant pas suffisamment à l'avance, jusqu'à la toute dernière minute, ni le jour exact ni l'heure précise de la cérémonie, tout devant dépendre de la clôture des débats et du vote au Bardo, les services de la Présidence ont dû préparer plusieurs scénarios possibles. Si le cérémonial lui-même ne fait pas problème, c'est la photo de groupe du nouveau gouvernement autour du président de la République qui a requis le plus d'efforts. Faut-il la prendre, sur le même perron extérieur donnant sur la mer, comme pour Jebali, ou devant la porte d'honneur où il n'y a pas de marches ou sur une autre porte officielle d'entrée dotées de quelques marches ? Mais, aussi, il faudrait tenir compte des conditions climatiques. Décision finale fut prise pour une prise de vue intérieure, dans une autre partie de la grande salle, en aménageant des estrades et allumant de gros projecteurs. Un cérémonial désormais rôdé Dès 15H30 ce mercredi après-midi, les membres du gouvernement commencent à affluer au palais de Carthage, les nouveaux, pour la plupart dans leurs petites voitures personnelles. Reçus dans un salon, le temps de se regrouper tous, ils sont ensuite introduits dans la grande salle où photographes et caméramen avaient déjà pris position. Les chargés du protocole s'affairent à placer les officiels, « chacun à ses son rang et grade », selon la formule appropriée. Quelques absences remarquées, notamment celles de Noureddine Behiri, en mission à l'étranger et Mehdi Mabrouk (Culture). A 16H25, le président Marozuki fait son entrée avec à ses côtés, le chef du gouvernement Ali Larayedh, celui-ci avait sous le bars un porte-document que son protocole, attentif à l'mage pour les médias, lui reprendra rapidement. Cette fois-ci, Marzouki n'est pas suivi par son directeur de Cabinet, Imad Daïmi (retenu par une urgence, il arrivera plus tard ), son conseiller politique, Aziz Krichen et son porte-parole, Adnen Manser, tous deux en mission. La cérémonie commence : chacun des nouveaux membres du gouvernement s'avance devant le pupitre, pose la main droite sur le Coran et prête serment, avant d'aller serrer la main au président de la République et au chef du gouvernement. Tout se passe bien, sauf pour Leila Bahria, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères. Les chargés de protocole ayant noté que prise par l'émotion, elle avait omis de poser la main sur le Livre sacré, l'invitent à reprendre le serment. Dans la bonne humeur générale. Un nouveau Bouazizi qui donne des ressorts Prenant la parole, le président Marouzki devait prononcer un discours d'usage auquel il a su mettre une note très émotive en faisant du décès le matin même du vendeur ambulant qui s'était immolé par le feu mardi matin, en pleine avenue Bourguiba, un nouveau symbole devant donner à réfléchir à tous. Il commencera par faire l'éloge d'Ali Larayedh : « j'ai eu à le connaître durant la lutte contre la dictature puis dès la révolution et à apprécier sa patience et sa capacité d'endurance, un responsable fort dédié à la consolidation de la Tunisie et sa stabilité », affirmera-t-il. Il rend hommage au gouvernement sortant « conduit par le frère et l'ami, le militant Hamadi Jebali, qui a démontré à tous son sens de la démocratie, procédant à cette transmission fluide des pouvoirs ». Puis il enchaînera sur le drame enregistré le matin-même. Très secoué par ce décès, qu'il impute à «l'héritage des années de la marginalisation et de l'iniquité», il lance un double appel. Le premier aux jeunes livrés à la misère et à l'abandon, pour leur demander « de ne pas perdre espoir, ni dans la miséricorde divine, ni dans le nouveau gouvernement qui, s'il n'a pas une baguette magique, il est animé par une volonté d'acier ». Le second, à tous et surtout au gouvernement pour avoir constamment en mémoire, ce cri détresse et ceux qui l'avaient précédé, afin de hâter l'action attendue. Marzouki confirmera la mission du gouvernement telle que précisée par Ali Laryedh mardi devant les élus de la Nation, plaçant la restauration de la sécurité intérieure et extérieure, en première priorité, appelant la lutte contre la contrebande, la compression de la hausse des prix et la relance économique et invitant la classe politique à l'apaisement des discours et des esprits. S'adressant à l'opposition, il l'exhorte à « mettre fin aux tensions et à garder les canaux du dialogue ouverts ». Applaudissements et hymne national, puis on passe dans l'autre moitié de la grande salle pour la photo officielle. Sur les estrades, les emplacements sont numérotés et chacun avait été avisé de sa place. Le temps d'ajuster la cravate, pour tous, le pull pour le président, à la demande des photographes, et clic-clac… Dernier acte, la passation collective des pouvoirs, ce jeudi après-midi au palais de la Kasbah. Au travail ! Cest ce que tous les Tunisiens appellent de leurs vœux.
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