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Mehdi Jomaa a-t-il un avenir politique ?
Publié dans Leaders le 04 - 10 - 2014

«Ils croyaient ramener un joli poisson d'aquarium, juste pour le décor, et ils sont tombés sur un loup d'océan !» D'une seule phrase, un politologue réputé résume la situation. Mehdi Jomaa qui a volontairement laissé planer le suspense, sinon l'entretenir, ne se présentera pas à la présidentielle. «Même si la voie est pavée», comme il le dira dans son adresse à la nation, très attendue ce soir-là. Il avait, en effet, tenu en haleine toute la classe politique. Les pressions augmentaient de part et d'autre. Les siens, y compris parmi les membres de son gouvernement, le poussaient à postuler à la magistrature suprême. Les sages l'en dissuadaient. Les compétiteurs qui le craignent lui hurlaient dans le dos, quand ce ne n'est pas ouvertement, dans les médias ou par voix interposées.
Si sa non-candidature a déçu nombre de Tunisiens et d'amis de la Tunisie à l'étranger, elle a, par contre, soulagé les états-majors dans les quartiers généraux politiques en pleine effervescence. Et suscité nombre de questions et de commentaires. Sept questions et des réponses.
1. Mehdi Jomaa a-t-il été tenté de se
présenter ?
2. Quelle a été la position des membres du gouvernement ?
3. Pourquoi Jomaa refusait l'idée de se présenter ?
4. Pourquoi a-t-il scénarisé son annonce?
5. Comment se conduira-t-il désormais?
6. Que compte-t-il faire après son départ de la Kasbah ?
7. Et son avenir politique ?
Mehdi Jomaa avait-il été tenté de se présenter ?
Cela remonte au mois de juin dernier, lors de sa visite en Allemagne. Angela Merkel ne lui a pas posé directement la question mais avait fait la moue lorsque Jomaa lui parlera de la fin imminente de sa mission, qu'il souhaite réussie. C'est le président de la République, Joachim Gauck, qui s'en étonnera. «Vous ne souhaiteriez pas continuer», lui lancera-t-il. «Si la réussite de la transition démocratique repose sur une seule personne, nous ne serons pas en démocratie», lui répondra-t-il. La même scène se répètera tout au long de l'été, avec divers interlocuteurs étrangers de haut niveau. A l'issue d'une audience accordée le 1er septembre dernier à une délégation de sénateurs américains, l'élu d'un Etat du Sud s'attardera à la sortie pour lui demander : «Votre décision est définitive?». «Sans le moindre doute et à aucune condition», lui répondra Jomaa.
Manuel Valls, les Premiers ministres algérien, Abdelmalek Sellal, et marocain, Abdelilah Benkirane, et bien d'autres participants à la conférence internationale «Investir en Tunisie», qui s'est tenue début septembre, ont essayé de percer un secret bien gardé. Mais, à chaque fois, la réponse était identique. Fin août déjà, il l'avait rappelé à ses ministres lors du dernier conseil avant la rentrée. «Nous sommes arrivés au gouvernement en dehors des mécanismes électoraux. Nous devons en sortir dans les mêmes conditions, c'est-à-dire en dehors des élections, mais auréolés de leur réussite et avec le sentiment du devoir accompli dans l'intégrité totale». Surpris, des ministres lui demanderont si sa décision est irrévocable. Réponse de Mehdi Jomaa: «Je vous en aviserai, si je change d'avis». Beaucoup l'oublieront et lorsqu'il annoncera officiellement sa non-candidature, ils lui demanderont encore: «Mais pourquoi vous ne l'aviez pas dit auparavant ?». «Mais, je n'ai pas changé d'avis, je vous l'avais dit », leur répondra-t-il. Il serait faux d'affirmer que l'idée ne lui avait pas effleuré l'esprit.
La situation générale dans le pays, les dangers et les enjeux, d'un côté, les sondages d'opinion très favorables, et l'entourage, de l'autre, l'y incitaient. Nombreux sont ceux qui demanderont à le voir pour l'y encourager, l'assurant de leur soutien. Il ne dira jamais oui, mais restera énigmatique, se plaisant sans doute à ce jeu…
Quelle a été la position des membres du gouvernement ?
L'excitation était à son comble, les derniers jours. Des proches à lui collectaient ouvertement des parrainages en sa faveur. Le savait-il ? Laissait-il faire ? Mercredi 17 septembre, Mehdi Jomaa était l'invité du petit-déjeuner organisé par l'Utica avec une quarantaine de capitaines d'industrie et des affaires. Zohra Driss ne manquera pas de lui poser «la question». Réponse de principe et sourire énigmatique. La veille, son cabinet avait annoncé qu'il ferait «une déclaration importante». En début d'après-midi, il réunira, dans son Lab du Lac, son cabinet pour un tour de table. Chacun ira de son petit argumentaire, oscillant entre le oui et le non, l'émotionnel et le rationnel. Un ministre, favorable au non, sortira un argument juridique imparable: si le chef du gouvernement se présente, il doit démissionner de ses fonctions, et s'il démissionne, c'est tout le gouvernement qui tombe avec
lui. Alors, quid de la continuité de l'Etat?».Mehdi Jomaa écoutera attentivement les différents points de vue. Certainement amusé en son for intérieur. Sa décision était déjà prise, depuis longtemps.
Pourquoi Jomaa a-t-il refusé l'idée de se présenter ?
Son argumentaire s'affirmait de jour en jour. L'éthique est au cœur de sa réflexion : ce fameux contrat moral scellé avec le Quartet, le Dialogue national et le peuple. «Rien ne pourra m'en délier. Il y va de ma crédibilité, mais aussi de l'accomplissement du processus électoral et de la transition», nous confiait-il, fin août dernier. «Je n'accepterai jamais ni de rester à la Kasbah, ni de n n n
n n n postuler à Carthage». C'est le moment du vrai travail, celui de réussir cette ultime phase. La présidentielle, n'est pas une opportunité à saisir»
Avait-il peur de ne pas gagner le scrutin? «Je n'y ai même pas pensé, nous a-t-il assuré. Le principe même n'étant pas acquis». Pourtant, des «amis», mais aussi des laudateurs, l'assurent du «soutien du peuple», lui promettant «un raz-de-marée». Incrédule, il restera.
A-t-il été dissuadé par les déclarations enflammées de certains dirigeants politiques et syndicalistes ? L'Ugtt, Houcine Abbassi en tête, l'avait-il «rappelé à l'ordre» ?
Aurait-il dû poser des conditions ? Certains sont allés jusqu'à lui demander d'exiger, pour accepter, un parrainage public par le Quartet, deux à trois grands partis, une trêve sociale et parlementaire pendant les deux premières années de son quinquennat.
Reste le facteur personnel, privé, familial. Sans doute déterminant dans sa décision, autant que l'éthique, son vœu personnel et celui de sa famille, c'est qu'il s'acquitte au mieux de sa mission et reprenne son activité professionnelle, avec le sentiment du devoir accompli.
Pourquoi a-t-il scénarisé son annonce ?
Certains le lui ont reproché : un simple communiqué aurait suffi pour démentir les rumeurs et clarifier sa position. D'autres y ont vu un grand show médiatique, avec une dramatisation poussée à l'extrême, du suspense et un dénouement. Les plus avisés s'attarderont sur le contenu et trouveront dans son discours des passages inutiles ou inappropriés.
Terminant sa réunion avec les membres de son gouvernement, Mehdi Jomaa retournera à ses dossiers, lisant son courrier et signant lettres et décisions soigneusement classées dans plusieurs parapheurs. Des conseillers sont réunis dans un bureau non loin du sien pour rédiger des éléments de langage pour son allocution. Il passera les saluer et leur promettra de voir tout cela avec eux à la Kasbah, avant la déclaration. Il s'éclipsera un moment chez lui pour se changer : costume noir, chemise blanche et cravate rouge.
Dans ce vieux palais de la Kasbah qui, depuis le 14 janvier 2011, en aura vu plus que tout au long de son histoire centenaire, les caméras sont installées, les micros hissés et les journalistes impatients. Chacun cherche le scoop, dans un jeu de devinette.
A 19 heures précises, le cortège du chef du gouvernement arrive. D'un pas alerte, Mehdi Jomaa dévale les escaliers. Derrière lui, son porte-parole, Nidhal Ouerfelli, et son conseiller diplomatique, Hatem Atallah. Très en forme, prêt à en découdre, il s'attarde quelques minutes à son bureau puis arrive dans le grand patio où l'attendent les journalistes. Le show commence. D'une haute facture…
En moins de 20 minutes, questions-réponses comprises, il a tout expédié. De retour à son bureau, ses conseillers le félicitent pour sa prestation, alors qu'il vide une mini-bouteille d'eau minérale pour se désaltérer. Soulagé d'un fardeau qui lui pesait sur les épaules, il doit se congratuler lui-même de n'avoir pas écouté le chant des sirènes. Ses propos étaient-ils en accord avec sa pensée ? Y avait-il un mot de trop ? Personne n'y relèvera le moindre impair. Il y a surtout ce fameux «J'ai décidé», prononcé sur un ton solennel qui rappelle Bourguiba. Il signifie qu'il a été tenté par la présidence de la République mais y a renoncé. Le plus approprié aurait été de dire : «Je confirme que je n'y ai jamais pensé». Mais, après tout, l'essentiel, c'est qu'il n'est pas candidat. Un «acte d'honneur», de «dignité», un «grand homme d'Etat», noteront les journalistes et les chroniqueurs le lendemain.
Comment se conduira-t-il désormais?
Plus que jamais en chef de gouvernement, affirment ses proches! Les deux autres présidents, de la République et de l'ANC, en campagne électorale, c'est lui qui garde la maison Tunisie. En première ligne, il assume et pour cela, il exerce pleinement ses attributions. La sécurité sera sans doute sa priorité absolue, mais aussi la bonne tenue des élections, dans un climat favorable. L'Isie est responsable des scrutins et de leur transparence, du respect de la loi électorale et de l'application rigoureuse de toutes leurs dispositions. Mehdi Jomaa, quant à lui, veillera au grain.
Le sens de l'Etat et le sang des martyrs sont ses véritables moteurs de fonctionnement. Rien que la toute dernière épreuve meurtrière du Chaambi, cette «débâcle» qu'il a vécue en direct, dans sa chair, de la salle des opérations du ministère de la Défense ne s'est pas encore cicatrisée. Son sourire s'efface et son visage se n n n
n n n ferme: «J'ai en mémoire le sang de nos vaillants soldats, gardes nationaux et policiers. Je mesure le sens de leur martyre et la douleur de leurs familles», nous confie-t-il. Le sens de l'Etat l'emporte sur tout dans mes décisions. Aucune tolérance n'est possible, c'est du non-négociable !».
Que compte-t-il faire après son départ de la Kasbah ?
Lorsqu'il était ministre de l'Industrie et que le gouvernement d'Ali Laarayedh devait passer le relais l'automne dernier, il se promettait d'aller passer quelques jours chez lui à Mahdia, s'adonner à son loisir préféré : la pêche à la canne. La passation a tardé et le voilà, au lieu de partir, propulsé à la tête du gouvernement non partisan. Cette fois-ci, la passation se fera au début de l'année prochaine. Pas avant fin janvier, début février, au plus tôt, en tenant compte des délais de concertation et d'investiture.
Mehdi Jomaa s'est promis de ne pas se déconcentrer, pour le moment, et oublier l'essentiel. Il l'a d'ailleurs exigé de tous les membres de son gouvernement. C'est quand il transmettra les pouvoirs à son successeur qu'il aura tout le loisir d'y penser et de prendre sa décision. Ceux qui le connaissent bien disent qu'il ne restera pas en Tunisie. Il sera heureux de regagner son appartement dans la proche banlieue parisienne, de s'offrir quelques semaines de vacances et de reprendre contact avec ses nombreux amis en Europe. Ce n'est qu'alors qu'il examinera les différentes options qui s'offriront à lui.
Et son avenir politique ?
Ne sera-t-il pas tenté de faire de la politique, même un jour ou l'autre. De se mettre en réserve de la République, de créer un parti, de se préparer aux prochaines échéances ? Pour dire vrai, la politique tunisienne continuera toujours à l'intéresser, affirment ses proches. Saura-t-il s'y soustraire, après toute cette expérience ? Pour le moment, la page est tournée. Une autre commencera pour lui. A moins que…


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