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Karim Ben Kahla - Droits de l'Homme, caricatures et liberté d'expression : y a-t-il des limites ?
Publié dans Leaders le 02 - 11 - 2020

Par Karim Ben Kahla - La question ne se pose pas dans les nombreux pays qui donnent des leçons aux autres et qui pourtant, ne reconnaissent pas les libertés individuelles et publiques ou qui briment ces libertés au nom de l'ordre public. Mais dans un pays qui fait de la liberté un fondement du vivre ensemble, est-ce que la liberté d'expression peut avoir des limites ?
Oui parfaitement !
Ces limites sont celles que l'on se choisit en toute liberté parce que d'une part, on pense que la vie en société engage un système de valeurs non réductible à aucune parmi celles-ci, et que d'autre part, on constate que cette même vie en société implique nécessairement un certain nombre de contraintes et de renoncements, y compris à sa propre liberté absolue d'expression.
Dans cette conception, les limites de la liberté d'expression relèvent du débat public et de l'éthique du vivre ensemble et non du droit, de l'intervention directe de l'Etat ou du bon vouloir d'un souverain.
Dans un régime libéral, si elles ne peuvent être décrétées, les limites flottantes et changeantes de la liberté d'expression sont réelles, et relèvent idéalement de l'éthique individuelle et pratiquement de la morale sociale et du débat public. La trangression de ces limites se fait alors au nom d'une conception essentiellement juridique et politique des droits des droits de l'Homme, qui sont ainsi instrumentalisées afin de justifier ou de légitimer des abus de liberté d'expression (confère à titre de simple exemple, l'épisode de l'animateur qui insulte publiquement une femme politique et qui présente cela comme étant de l'art ou une liberté d'expression et qui accuse ses critiques de vouloir atteindre à ses "droits de l'Homme").
Cette justification relève au mieux de l'incompréhension et au pire de l'hypocrisie. En effet, il ne peut y avoir de droits de l'Homme sans la valeur centrale de la dignité humaine. Dans l'exercice de notre liberté d'expression, nous sommes libres de ne pas respecter les idées (les idéologies, les religions, les représentations, le "sacré") des autres. Cela peut-être répréhensible éthiquement ou moralement. Mais, si nous exerçons cette liberté d'expression ou ce "droit de l'Homme" en attentant à la dignité d'Hommes et de femmes concrets, c'est à la loi de dire son mot.
Autrement dit, dans l'idéologie des droits de l'Homme, c'est cet Homme - concret - et sa dignité qui sont "sacrés" (et doivent être protégés par la loi) et non ce qu'il pense (ses représentations ou son propre "sacré" dont la "protection" relève de l'éthique du dialogue ou de la morale).
La dignité est ce respect que nous devons à toute personne humaine indépendamment de son comportement, de ses idées, de son statut, de sa race ou de son rang. Un respect d'autant plus important que cette personne est (ou a été) mise en situation de vulnérabilité ou de faiblesse. La dignité est donc un devoir de reconnaissance de l'humain, surtout chez ceux qui sont - ou ont été - mis en situation infrahumaine (ceux qui sont exclus des conditions minimales de vie, ceux qui sont vendus comme marchandise ou esclaves, ceux qui souffrent de racisme, etc.). L'un des acquis des "lumières", c'est cette proclamation d'une universalité et d'une égale dignité des humains. Et c'est autour de cette dignité, plutôt que d'un statut particulier, que se mènent aujourd'hui l'essentiel des luttes pour l'égalité.
Le paradoxe est le suivant : En faisant confiance à la raison humaine, la loi devrait promouvoir la délibération et ne pas fixer de limites à la liberté d'expression. Mais, en tant que garante des droits de l'Homme, la loi devrait également assurer que cette liberté ne transgresse pas la dignité humaine (celle de l'Homme "nu" comme dirait H Arendt). Sans ce "minima", la liberté bafoue son propre fondement et ne peut progresser vers un absolu. C'est là où, dans un Etat qui respecte les droits de l'Homme, le législateur doit intervenir afin qu'au nom de ces droits, on ne bafoue pas ceux du citoyen (distinction là aussi d'Arendt).
Idéalement, l'Etat est chargé d'élaborer, d'appliquer et de défendre des lois qui organisent l'exercice des libertés et défendent la dignité humaine. Il est "neutre" par rapport à la morale et à l'éthique qui esquissent les limites de la liberté particulière d'expression. C'est parce que la dignité humaine est un absolu qui ne doit pas dépendre des contingences de ce que les humains sont ou croient, que l'Etat devrait être, du moins dans une conception laïque, neutre par rapport aux systèmes de pensée et aux religions.
S'agissant de l'épisode actuel, je pense qu'il faudrait sortir de l'analyse théorique des droits de l'Homme abstrait et du droit-de-l'hommisme sans support et dignité humaines, pour situer ce qu'il se passe dans un contexte politique, économique, sociale et géopolitique très particulier.
Même si les proto-islamistes les agitent comme des arguments de circonstance, l'islamisme n'est ni un projet de dignité universelle, ni une théorie des droits de l'Homme. Les sources de cet islamisme sont certes à chercher du côté du ressentiment et de la quête de reconnaissance (Fukuyama, 2018), mais cela reste une idéologie politique qui profite de la misère concrète d'êtres humains dont la dignité est bafouée et qui sont privés de canaux porteurs de leur indignation.
Au-delà des considérations politiciennes internes, le problème essentiel auquel la France a du mal à répondre n'est pas l'islam, mais ses promesses d'intégration et de « dignité universelle » non tenues. Notre problème à nous ? La misère matérielle, intellectuelle, politique, sexuelle, morale, environnementale, etc. Occupons nous de cette misère avant de donner des leçons aux autres ou de vouloir leur imposer des limites à leurs libertés.


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