Sommes-nous en train de vivre la plus grave crise économique depuis l'indépendance... ! Peut-être pas, dans la mesure où les pénuries classiques qui accompagnent le phénomène de dégradation ne sont pas ressenties au niveau du quotidien des Tunisiens. Je m'explique. Les marchés sont fournis abondamment malgré la cherté de vie, et les denrées alimentaires, ainsi que les produits d'utilité ménagère ne manquent pas, bien au contraire, les supermarchés et autres boutiques regorgent de ces produits sans trouver écoulement rapide. Mais, la persistance de la crise est bien sérieuse et dépasse de loin les deux dépressions économiques majeures vécues fin des années 60 après la période collectiviste de Ben Salah et au milieu des années 80 après le mandat Mzali. A quoi cela est dû et pourquoi toutes ces mises en garde du FMI et la descente aux enfers avec des notations « Fitch » de plus en plus négatives, qui n'annoncent rien de bon et qui pointent du doigt la stagnation de la croissance à moins de 2%, la reprise timide du tourisme et la rétention à l'investissement des nationaux et des partenaires étrangers. Last not least, il faut y ajouter la sinistrose liée au déficit budgétaire, l'aggravation de la masse salariale, portée à plus de 15000 milliards de nos millimes, dans le secteur public et l'endettement qui a presque été multiplié par deux depuis notre étincelante « Révolution » passant de 39% en 2010 à 63% en 2016. Voilà de quoi tempérer bien des ferveurs de ceux qui nous gouvernent sous la pression d'une classe politique et syndicale à la bride relâchée. Cette persistance de la crise par rapport à celles citées précédemment s'expliquerait aisément en revenant justement aux thérapies Nouira et puis celles de Ben Ali, appliquées rapidement, le premier en favorisant la création des PME, ainsi que les industries délocalisées d'Europe vers la Tunisie, avec toutes les mesures d'encouragement fiscal et de limitation bureaucratique, puis l'élargissement par le second de la pénétration mondialiste et l'ouverture de l'espace économique tunisien aux grands capitaux européens et arabes du Golfe. Mais, ce qu'il faut préciser dans les deux cas, c'est la force réaffirmée de l'Etat-puissance publique, l'homogénéité du gouvernement, et le contrôle sécuritaire hermétique qui a permis à la décennie Nouira de remonter le pays et le pousser vers une progression magique et soutenue du tissu industriel, et aux deux décennies Ben Ali de doper le climat des affaires en particulier dans le tourisme, les services et l'agriculture. Or, le constat aujourd'hui, est à l'opposé de l'évolution des 60 dernières années et qui a fait la prospérité relative de la Tunisie dans son environnement régional, malgré quelques crises sociales importantes mais rapidement circonscrites dans le temps. La crise de fin de mandat de Ben Salah n'aura duré que deux ans, 1967-68 et la crise de fin de mandat Mzali n'a duré qu'un an et quelques mois de 1986 à 87. La Tunisie postrévolutionnaire n'a pas bénéficié d'une remise à niveau rapide de l'Etat-puissance publique, du fait, peut-être, du cataclysme plus puissant de déstructuration sociale et les choses se sont aggravées par la dépression sécuritaire énorme ainsi que l'expansion désastreuse du terrorisme. Aujourd'hui, et malgré la maîtrise sécuritaire nous prenons du retard au niveau de la relance de l'économie dû, essentiellement à la rétention de l'investissement et une certaine peur de la pression fiscale et syndicale. Nos argentiers-financiers du gouvernement ne veulent pas voir ce qui se passe ailleurs, pour la relance tant espérée après des années de vaches maigres, de déprime du climat des affaires et de récession économique. L'exemple vient d'en haut et des Etats Unis d'Amérique de M. Trump où à peine l'annonce faite de réduction de la pression fiscale et des impôts, que déjà la machine productive s'emballe avec plus de 500.000 nouveaux emplois, je dis bien cinq cent mille, gagnés en moins d'un mois d'exercice du pouvoir de M. Trump à la Maison Blanche. Et le milliardaire-président ne compte pas s'arrêter là, il vise la création de 25 millions de nouveaux emplois en quatre ans, ce qui est fort possible pour un géant comme l'Amérique, qui a décidé de quitter les sentiers battus de la haute bureaucratie-Obama ! Autre malade endémique de notre pays et dont personne n'en parle que timidement et à demi-mots, de peur de se faire arroser par les nouveaux « révolutionnaires » déchaînés et la pression sociale et syndicale. Nous le disons à haute voix, il faut instaurer une paix sociale sur le moyen et le long termes par un contrat social, nouveau et dynamique qui tienne compte des réalités économiques et du potentiel (réel) de nos entreprises publiques et privées et non sous la pression constante des menaces de grèves et des pressions syndicales insoutenables. Et c'est là où le bât blesse. Les « Bourguiba » du temps de Nouira et les « Ben Ali » après Mzali, ne sont plus d'actualité ainsi que les structures de soutien au système politique comme le PSD puis le RCD ou l'UGTT fédérée au bloc national avec une adhésion et un appui critique mais effectif à l'action du gouvernement. Aujourd'hui, tous les paramètres ont changé mais pas ceux qui favorisent la relance économique, la croissance et l'investissement. L'Etat est de plus en plus faible, et la pression sociale et syndicale est à son paroxysme, d'où le recours aux solutions de facilité, surtout la pression mortelle pour les affaires qui consiste à pressurer les entreprises et augmenter les impôts alors que l'économie est à genoux. J'ai souvent préconisé un impôt généralisé à 10%. Eh oui, la vieille « Dîme », (Al Achor, en arabe), sans être adhérent islamiste, et les caisses de l'Etat reprendront des couleurs parce que tout le monde ira vers la transparence et abandonnera l'évasion fiscale. Je persiste et signe, tout comme pour un contrat social salutaire avec arrêt des grèves pour le quinquennat, celui de ce fameux Plan qu'on arrive difficilement à faire démarrer. Tout cela est tributaire d'un réel sursaut de patriotisme national qui laisserait de côté, les ambitions politiques folles et démesurées... Faute de quoi, le naufrage collectif est assuré y compris pour ceux et celles qui manipulent et tripotent sans arrêt les « égos » ravageurs des nouveaux prophètes ambitieux de la « Révolution » ! A notre humble avis, la nouvelle thérapie du pays passe par un moins d'impôts, un moins de pression syndicale et un moins de lourdeur bureaucratique, si nous voulons relancer les investissements, la dynamique économique et la croissance. Mais, tout passe par la remise à niveau du sens de la responsabilité de tous ! K.G