L'affaire de la maternité de l'hôpital Farhat Hached, de Sousse, continue d'agiter la scène nationale. Après une première grève observée mercredi dernier, le comité administratif du syndicat-général des médecins de la santé publique, de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), a appelé à une nouvelle grève générale pour le 23 février. Cette grève sera suivie de plusieurs autres formes de protestations appelant, toutes, à la mise en place d'un cadre juridique pour régulariser les erreurs médicales et garantir un meilleur suivi et pour le médecin et pour le patient. Réagissant à cet appel, la directrice-générale de la santé, Nabiha Bourssali, a assuré que le ministère a déjà fini la rédaction du projet de loi en question qu'il a d'ailleurs adressé aux autres ministères concernés. En ce qui concerne les jeunes médecines, la directrice-générale de la santé a estimé que toutes leurs revendications sont légitimes et bien fondées tout en assurant que le ministère est en train de les examiner. Nabiha Bourssali a, par ailleurs, appelé tous les médecins à reprendre leur travail puisque le ministère de tutelle est déjà en train de répondre à leurs revendications. Comme tout autre secteur, celui de la Santé (publique ou privée) est exposé aux grèves en cas de blocage au niveau des négociations. D'ailleurs, à la fin de l'année dernière, et à l'occasion de la discussion, à l'époque, de la loi des Finances de 2017 à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), les avocats, les pharmaciens et les médecins ont enchaîné les protestations. Cela sans oublier bien-sûr les mouvements des enseignants qui, eux, réclament le limogeage pur et simple de leur ministre, Néji Jalloul. En transition démocratique, il est tout à fait normal que le climat social connaisse des tensions pareilles. D'ailleurs, ce n'est ni les protestations ni les grèves qui dérangent réellement en Tunisie ; le vrai problème c'est qu'à chaque rassemblement, les différents secteurs choisissent d'entrer en confrontation directe avec d'autres métiers. Lors de leur mouvement, les avocats ont été agressifs envers les journalistes estimant que ces derniers se sont, tous, inscrits dans une campagne de dénigrement contre les robes noires. Pire encore, certains de ceux qui dirigeaient lesdits mouvements s'étaient même attaqués à l'Etat et à sa notion en avançant que le métier d'avocat en Tunisie était plus vieux que l'Etat lui-même. Il aura fallu que le Parlement cède aux revendications des juristes pour que cessent les confrontations et les attaques. Aujourd'hui, et au-delà de la légitimité des revendications des médecins, ils se sont, eux aussi, inscrits dans une confrontation directe avec deux autres secteurs : les médias et les juges. Les médecins estiment en effet que c'est à cause des journalistes que l'incident de l'hôpital Farhat Hached avait pris des dimensions nationales (le chef du gouvernement, Youssef Chahed, s'est lui-même mêlé à l'affaire en demandant l'ouverture d'une enquête officielle). En ce qui concerne les juges, les blouses blanches ont protesté contre le fait que leur jeune collègue de Sousse ait été rapidement emprisonnée allant jusqu'à avancer que l'affaire a été politisée et que le juge en question a subi des pressions politiques. Le corporatisme est un mal qui cause beaucoup de tort au pays. Il passe aujourd'hui d'un simple corporatisme à une confrontation entre différents secteurs sensibles et cela risque de creuser encore plus le clivage qui nous guette de partout.