Au moment où les prémices d'une amélioration relative et progressive de la situation économique sont visibles en Tunisie et qui restent à confirmer, la vie politique continue à être marquée par des soubresauts dus, notamment, aux échanges incendiaires entre les politiciens des divers courants et les transformations incessantes subies par les diverses formations partisanes. Et au moment où les mouvements sociaux se poursuivent à El Kamur, El Faouar, à Menzel Bourguiba, à Metlaoui et bien d'autres localités du territoire, les partis politiques continuent à présenter un paysage disloqué et, chaque jour, un peu plus dispersé avec des tiraillements de politique politicienne, souvent inutiles. La triste palme en la matière revient, comme d'habitude et depuis les dernières élections présidentielles et législatives à Nidaa Tounès qui a réussi le tour de force se scinder en trois en l'espace de deux ans, seulement ! Nidaa Tounès a réussi le tour de force de perdre tous ses ténors et ses dirigeants fondateurs de la première heure. En effet, voilà que sept députés, à savoir Bochra Belhaj Hmida, Leila Ouled Ali, Néjia Ben Abdelhafidh, Mondher Bel Haj Ali, Walid Jalled, Mustapha Ben Ahmed et Leila Hamrouni, viennent de créer leur propre bloc parlementaire, dénommé « Bloc national ». En d'autres termes, ce bloc compte dans ses ranges des députés qui ont démissionné du bloc Nidaa Tounes, mais sans rejoindre celui des autres démissionnaires du même parti ayant rejoint le parti Machrou3 Tounes et constitué le groupe parlementaire Al-Horra. Et selon des données récoltées chez les proches de ce groupe, le bloc est appelé à être renforcé, dans un plus ou moins proche avenir, par d'autres membres, ce qui affaiblit le parti de Nidaa, pourtant vainqueur, en grande pompe, des législatives d'octobre 2014. Les membres du nouveau bloc estiment que Nidaa Tounes, dans sa formule actuelle, ne répond plus aux exigences de l'étape et représente, même, un danger pour le processus démocratique dans le pays comme l'a dit, en substance, Bochra Belhaj Hamida tout en précisant que ce groupe a, longtemps, cru pouvoir arranger les choses de l'intérieur du parti, mais ils ont fini par être persuadés que cela est impossible. Après ces nouveaux départs, soutenus moralement par les barons du parti, Ridha Belhaj, Faouzi Elloumi, Boujemâa Remili et autre Lazhar Akremi, le parti de Nidaa ou ce qu'il en reste, perd de grands piliers auxquels s'ajoutent d'autres mécontents, en l'occurrence les Saïd El Aidi, Mahmoud Ben Romdhane et, plus récemment encore, Néji Jelloul. Ainsi, en délaissant ses propres « enfants », le Nidaa de Hafedh Caïd Essebsi a opté pour la politique des recrutements. C'est-à-dire qu'il préfère payer des « employés » qui lui sont obéissants et dociles afin de construire des « virginités » et des cursus sur mesure pour le « fiston » qu'on veut passer pour une lumière en politique pour avoir servi avec un ancien parti de l'opposition de carton sous le régime de Ben Ali, en l'occurrence le Partis social libéral (PSL) de Mounir El Béji. D'ailleurs, comme HCE ne fait pas de déclarations consistantes et ne participe pas aux débats radiotélévisés parce qu'apparemment, il n'en a pas l'étoffe, on laisse la tâche délicate des prises de positions aux Borhène Bsaïes, Khaled Chouket, et autre Férid El Béji qui multiplient les bourdes et les propos douteux et polémistes. D'ailleurs, la majorité des observateurs s'accordent à dire que Nidaa ressemble à une coquille vide où l'on essaie de s'accrocher à un passé qui n'a plus aucun lien avec le présent. Et dire que Khaled Chouket continue à réclamer une recomposition du gouvernement d'union nationale qui soit « fidèle » à la configuration parlementaire issue du scrutin législatif de 2014 ! Or, entre le Nidaa de 2014 et celui de 2017, il y a une différence de plus de trente sièges, ce qui fait de lui, le deuxième parti, loin derrière le parti islamiste d'Ennahdha. D'autre part, certains vont jusqu'à dire qu'un parti politique, comme dans toutes les démocraties du monde, a besoin, certes, d'un ensemble de compétences pour le diriger, mais il a besoin, surtout, d'un seul leader au charisme et au sens de la communication lui permettant de s'imposer face aux responsables des autres partis. Comme cela a été le cas avec Béji Caïd Essebsi à Nidaa ou celui de Rached Ghannouchi à Ennahdha. De là à avancer que BCE aurait dû passer le flambeau à Mohsen Marzouk qui a une vaste culture générale, une éloquence à toute épreuve, un grand pouvoir de communication et de persuasion ainsi qu'un brin d'humour et de présence d'esprit, désormais, nécessaire à tout leader, il n'y a qu'un pas que certains ont allègrement, franchi. D'ailleurs, des analystes politiques n'écartent pas l'hypothèse qu'avec le temps, le gros des forces progressistes et modernistes, qui croient au modèle et au projet de société auquel avait cru Béji Caïd Essebsi, pourraient se réunir, un jour ou l'autre, plus probablement avant les élections de 2019 sous une seule bannière avec pour chef de file le secrétaire général actuel de Machrou3 Tounes. D'ailleurs, les grands noms de Nidaa étaient convaincus, en 2014, de gagner le pari des élections, tout simplement, parce qu'ils avaient un leader charismatique et parce que ce leader s'appelait Béji Caïd Essebsi. On n'en est pas encore là, mais certains y pensent déjà et cherchent d'ores et déjà les moyens de concrétiser cette hypothèse, seule capable, à leurs yeux, de leur assurer une victoire face au rival traditionnel, le parti Ennahdha qui, en dépit de tout ce qu'il dit quant à un changement de référentiel, demeure fidèle à celui islamiste. Tout simplement parce ses bases y croient encore et toujours et n'imaginent pas Ennahdha sans ledit référentiel. En tout état de cause, la déconfiture du paysage partisan est due à l'évolution négative au sein de Nidaa, laquelle évolution est engendrée par la mainmise de HCE sur ce parti et du vide qu'il a créé autour de lui avec le silence complice de son père, sans oublier les affaires de népotisme et de présumées corruptions. Ce qui rappelle, étrangement, les situations de fin de règne sous l'ère de Bourguiba et sous le régime de Ben Ali. Ce qui est encore plus malheureux, c'est que certains commencent par se dire un « mensonge » et finissent pas y croire... fermement jusqu'à se casser les dents. Un proverbe arabe dit dans ce sens : « Bonheur à celui qui est conscient de sa vraie valeur !»...