Les derniers sondages opérés par Dar-Assabah et Emrhod Consulting, ou notre confrère le Maghreb et Sigma Conseil, convergent au moins sur une chose, les taux d'abstention inquiétants, prévus pour les prochaines élections municipales reportées de quelques mois. C'est vrai que la démocratie n'oblige personne à voter encore que certains pays comme la Suède obligent les citoyens à « faire leur devoir » citoyen d'aller aux urnes. Mais, ne pas voter, c'est une manière d'exprimer quelque chose et de voter quand même. D'abord, l'abstention peut servir les partis à forte « discipline » idéologique et chez nous ce sont les islamistes qui tiennent la corde, alors que la gauche est désunie plus que jamais. Reste Nida Tounès qui résiste parce que la nature a horreur du vide largement capturé par les islamistes omniprésents malgré quelques signaux d'essoufflement. Et puis, on ne peut pas envoyer aux archives nationales, toutes les familles bourguibiennes de la modernisation, très présentes dans la mémoire collective de notre peuple, surtout après le « flop » général des années Troïka et ses conséquences désastreuses sur l'économie et les finances, que nous trainons à ce jour comme un boulet dévastateur. Le recrutement massif dans la fonction qui a triplé sa masse salariale et plus des 2/3 du budget de l'Etat, ne laisse que des miettes pour le développement régional et national et l'intervention souhaitée de l'Etat dans les grands projets d'infrastructure. Tout cela fait boule de neige et faute d'activisme économique et d'investissements d'envergure on se rabat sur l'overdose politique et politicienne et comme dans le Léviathan de Thomas Hobbes, c'est le plus fort qui soumet le plus faible à sa volonté de puissance. Une analyse du contenu de la presse tunisienne toute confondue, écrite ou audio-visuelle montre à quel point l'espace médiatique est accaparé par le « politique » (certains préfèrent même le Boulitique). Or, la politique a fait son temps. Elle a changé le système politique, en bien ou en mal, ça dépend des lectures et des allégeances idéologiques, mais elle l'a fait. D'un système oligarchique présidentiel (ou présidentialiste), nous sommes passés à un régime parlementaire hybride où cohabitent un exécutif à deux têtes et une Assemblée relativement stable, grâce à cette coalition tant décriée entre un parti bourguibien moderniste et un parti islamiste d'essence « Frères musulmans ». Je dis cela parce que faute de coalition « majoritaire » bien que jugée « non homogène » et « contre-nature », nous serions en plein régime d'Assemblée digne de la 4ème République de France, avec une instabilité permanente, faute de grosse majorité. D'ailleurs, l'Allemagne qui est l'une des grandes démocraties d'Europe, a été obligée de ramer dans ce sens, puisque la CDU, aussi puissante soit elle, de Mme Angela Merkel, a été obligée (la mort dans l'âme, aussi) de composer et de coaliser avec le SPD de M. Martin Schulz, chef du SPD et nouveau candidat socialiste à la chancellerie allemande. C'est pour dire que souvent la réalité du terrain, transcende la politique, qui demeure une résultante du rapport des forces en présence dans la société. Si les électeurs tunisiens n'avaient pas donné 69 députés à l'ARP, aux islamistes, en 2014, les choses auraient été différentes. Malgré tout, le plus inquiétant demeure lié à l'économie et son blocage persistant. Certes, la politique y est pour quelque chose, parce que le gouvernement est obligé d'en tenir compte, pour s'assurer une « majorité » de confort. Mais, on a l'impression que l'économique est encore le « laisser pour compte », et que le gouvernement peine à trouver ses véritables repères pour engager une dynamique réelle de relance. En quelques mots, le gouvernement qui joue la « réanimation » de l'économie, n'a pas usé encore de véritables électrochocs crédibles. Aux grands maux, la grosse thérapie et s'il le faut la chirurgie. Or, la relance de l'économie passe par la relance des investissements et du climat des affaires. Et pour cela, il faut des mesures simples, pratiques et opérationnelles dans l'immédiat. Le gouvernement a besoin de véhiculer une image du « mécano » outillé et équipé pour désengrener la machine rouillée de partout. Halte à la bureaucratique prétorienne. Ouvrez les portes de l'investissement grandes ouvertes. Cessez ces procédures inquisitoires tentaculaires, qui font peur et ne rassurent pas les Tunisiens et les étrangers à ramener leurs capitaux et leurs avoirs en devises en Tunisie. Le Maroc l'a fait, l'Egypte aussi, et ces pays vont beaucoup mieux, malgré leurs handicaps démographiques. Il faut réfléchir à ces électrochocs pour attirer les investisseurs, débloquer les projets et dynamiser les régions. Il faut des messages clairs et forts. La Tunisie se remet sérieusement au travail... Finie la recréation, fini... le délire politicien! K.G.