La réunion du Bureau exécutif de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), prévue aujourd'hui, planchera sur le projet de réforme des régimes de sécurité sociale présenté récemment par le gouvernement. «La réunion doit permettre déterminer la position officielle de l'UGTT en ce qui concerne le paquet de mesures dévoilé récemment par le gouvernement», précisent des sources proches de la centrale syndicale. Bien que les représentants de l'organisation au sein de la commission de la protection sociale, qui regroupe aussi des représentants du gouvernement de l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA) aient exprimé des réserves sur certaines propositions de l'exécutif, l'UGTT n'a pas encore adopté une position claire sur le projet de réforme élaboré par le gouvernement. Le secrétaire général adjoint de l'organisation chargé de la couverture sociale, de la santé et de la sécurité au travail, Abdelkarim Jrad, a cependant souligné que le principe que défendra la centrale ouvrière dans se cadre se résume au «partage des sacrifices entre les employés, les employeurs et l'Etat , et ce en fonction des capacités de chacun de ces acteurs». «L'assuré social n'assume aucune responsabilité dans la détérioration des équilibres financiers de la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale (CNRPS) et de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Or, l'ensemble des mesures annoncées par le gouvernement pour renflouer ces deux caisses auront un impact négatif sur lui », a-t-il souligné. «L'augmentation de l'âge de départ à la retraite aura un impact négatif sur la santé et le bien-être de l'assuré social, tandis que la hausse des cotisations prélevées sur les salaires et la réduction des pensions de retraite auront des effets néfastes sur le budget des ménages», a-t-il ajouté, indiquant que «l'assuré social ne doit en aucun cas être grand perdant de la réforme». Le projet présenté par le gouvernement s'articule autour de trois axes. Le premier axe concerne le relèvement de l'âge du départ à la retraite. Dans ce cadre, l'exécutif prévoit le relèvement obligatoire de deux ans de l'âge du départ à la retraite à 62 ans et une augmentation de trois années supplémentaires pour les fonctionnaires qui le souhaitent. Le deuxième axe se rapporte à une hausse de 3% des cotisations sociales (1% pour les employés et 2% pour les employeurs) à l'instauration d'une contribution sociale généralisée de 1% sur les revenus bruts. Révision du barème de calcul des pensions Le troisième axe concerne la révision du barème de calcul des pensions de retraite à travers la révision du salaire de référence et du rendement des années de cotisation. Cet axe important du projet de réforme élaboré par le ministère de tutelle vise, selon les mêmes sources, à mettre fin à la «générosité» des régimes de retraite dont le cadre légal date des années 60, une époque durant laquelle le nombre d'actifs était largement supérieur à celui des retraités. Le salaire de référence est actuellement défini comme étant la moyenne des salaires des dix dernières années de travail, avec un plafond équivalent à six fois le SMIG pour les affiliés à la CNSS. Au niveau de la CNRPS, le salaire de référence est aujourd'hui calculé sur la base de la dernière rémunération objet de retenues avant le départ à la retraite. Sur ce point, l'intérêt se porte sur l'adoption par les deux caisses de la moyenne des salaires de dix dernières années de travail, ce qui aboutirait à une réduction des pensions de retraite. Pour compenser la baisse des revenus des futurs retraités pouvant découler de cette révision du mode de calcul du salaire et du taux de la pension, l'intérêt se porte sur l'encouragement du recours aux régimes de retraite complémentaires. Ainsi, les salariés souhaitant augmenter leurs pensions de retraite pourraient souscrire à des régimes de retraite complémentaire qui seraient gérés par des compagnies d'assurance. Lors des réunions de la commission de la protection sociale, l'UGTT a avancé l'idée de taxes sur les produits non essentiels. Cette idée s'inspire de l'expérience française où plus de 50 taxes sur des produits non essentiels ou superflus sont reversées au financement des caisses sociales. A titre d'exemple, seuls 20% des recettes de la vente des cigarettes en France vont dans les poches des buralistes et des fabricants de tabac. Le reste, soit 80% environ, va à l'Etat. Il est reversé à des organismes de protection sociales, dont les caisses de sécurité sociale et la Caisse nationale d'assurance-maladie. La centrale syndicale a également plaidé pour l'amélioration du recouvrement des créances de la CNSS et de la CNRPS. La réforme des régimes de retraite est un dossier tellement sensible et complexe que tous les gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution ont préféré le remettre à plus tard, malgré le déficit des caisses sociales qui se creusait d'une année à l'autre. Ce déficit devrait dépasser la barre de 2000 millions de dinars à la fin de l'année en cours contre 1700 millions de dinars en juillet dernier, d'après les prévisions du ministère des Affaires sociales. Pour permettre aux deux principales caisses de sécurité sociale de continuer à honorer leurs engagements, l'Etat était obligé d'injecter 800 millions de dinars durant l'année écoulée.