La reprise de l'activité touristique avec la consolidation des marchés traditionnels de l'Europe occidentale (France, Italie, Allemagne et Grande Bretagne) et les intentions de réservations ont atteint des niveaux record et les entrées touristiques pourraient dépasser les 8 millions au cours de cette année. Du coup l'on s'attend à un grand rush de touristes cet été alors qu'on s'apprête aussi à accueillir plus de 900 000 touristes russes et trois millions d'algériens. Le point de la situation avec Houssem Ben Azouz, Président de la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien. Q- Avec le soutien de la GIZ (coopération Allemande en Tunisie) la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien a participé du 11 au 19 mai 2018 à un voyage d'étude et de prospection en Chine (Pékin et foire ITB Shangai). Quelles sont les retombées de ce voyage ? R-Ce voyage a permis de nouer beaucoup de contacts professionnels et d'avoir une idée plus claire sur ce marché à fort potentiel pour la destination Tunisie. La levée du visa a permis une accélération des performances du marché. La destination Tunisie dispose actuellement d'une offre compétitive et qualitative par rapport à la concurrence au sein du bassin méditerranéen. Les T.O existants suivent la tendance positive du marché en rajoutant de la programmation. Les nouveaux TO contactés envisagent d'introduire la destination. Ils ont montré un véritable intérêt pour les produits de niche (Golf, Thalasso, MICE, Aventures...) Toutefois la compétition entre Tour-Opérateurs chinois et leur forte pression sur les prix des agences de voyages tunisiennes risquent de créer un bradage de la destination avec surtout un rallongement des délais de payement par les TO (jusqu'à 6 mois). Ceci sans oublier la faible présence de la cuisine chinoise et de guides cynophiles dans les lieux de séjours des groupes et de lignes aériennes directes entre Tunis et Pékin. Q- Le parc roulant est-il fin prêt pour assurer le bon déroulement de la saison touristique? R- Le parc roulant n'est pas prêt ni en quantité ni en qualité étant les besoins sans cesse croissants des agences de voyages et la bonne reprise de l'activité touristique. Les voyagistes ne pourront pas répondre aux demandes prévisibles à court et à moyen terme en raison du nombre très limité de microbus, de minibus et de grands bus. Avec la flotte actuelle, il est difficile d'assurer de bons services de qualité aux touristes .Ce qui va handicaper leurs activités. Peut être faudrait-il autoriser l'importation directe de véhicules neufs ou d'occasion par les agences de voyages. Q- La concurrence déloyale des sociétés de service menace les agences de voyages . Comment faire face à ces intrus? R- Cette concurrence déloyale provient des sociétés de services mais également de sociétés pirates et des associations à but lucratif. Ce qui menace nos activités. Nous réclamons davantage de contrôle par les autorités de tutelle et une révision du cahier de charges des agences de voyages car l'agence de voyages seule est soumise au contrôle alors que tous ceux qui travaillent dans le noir ne sont ni contrôlés, ni sanctionnés ni soumis au fisc. Je cite surtout les grands taxis touristiques qui opèrent en dehors des conventions conclues avec les agences de voyages, ainsi que certaines sociétés de services non agréées pour assurer le transport ou encore les excursions pour les touristes locaux et étrangers. En raison de leur manque de professionnalisme et d'éthique du métier, ces intrus seraient à l'origine du faible taux de retour des touristes en Tunisie. Q- Le transport multimodal (train, bus, métro) est –il un challenge à relever afin de faciliter le déplacement des touristes ? R- Le développement du transport multimodal est indispensable pour développer le tourisme demandeur de ces modes de transport en commun. La voiture est aujourd'hui le moyen de transport privilégié́ pour les déplacements touristiques. Changer les habitudes des usagers n'est pas simple. Pour les inciter à prendre les transports collectifs (le train, le bus notamment), il faut agir sur l'ensemble de la chaine de déplacement, du point de départ au point d'arrivée, mais aussi sur place, pendant le séjour. Q- Deux sujets reviennent souvent à l'ordre du jour, celui de l'enveloppe out going et celui de la Omra . Où en êtes –vous sur ces deux dossiers ? R- L'enveloppe out going (25 millions de dinars) a été consommée en 2018 au mois d'avril . Je vous laisse imaginer les difficultés auxquelles seront confrontées les agences de voyages spécialisées dans ce type d'activité . Il est évident que l'enveloppe accordée n'est pas en adéquation avec les besoins du marché et freine les tunisiens dans leur volonté et droit de voyager . Au vu des recettes en devises générées par le secteur touristique, l'enveloppe out going mérite d'être augmentée. En ce qui concerne la Omra, les agences de voyages ont démontré leur professionnalisme et sérieux depuis la libéralisation de cette activité. La concurrence entre agences de voyages a permis une meilleure qualité de service et un bon rapport qualité-prix alors pourquoi ne pas libéraliser le Hajj et refaire confiance aux agences de voyages ? Q- Les négociations Tunisie-Union Européenne sur l'ALECA ( Accord de libre échange complet et approfondi) avancent . Quel est l'incidence de cet accord sur le secteur touristique ? R- Le deuxième round des négociations Tunisie-Union Européenne sur l'ALECA a repris le 28 mai 2018. Ce projet d'accord est très important pour les sociétés de service en général et les agences de voyages en particulier car il s'agira de libre installation et activité des sociétés de service dans les deux espaces. Cela peut favoriser l'avancement du dossier de l'open sky et la compétitivité des sociétés de service tunisienne mais peut comporter des risques si la compétition ne se fait pas à armes égales : suppression des visas pour les chefs d'entreprises , liberté de circulation des capitaux... Q- Etes-vous pour l'ouverture du ciel ? R- Nous sommes favorables à l'open sky qui favorisera une croissance du PIB, la création d'emplois et une visibilité de la destination Tunisie. Nous avons accumulé trop de retard sur ce dossier. La situation de Tunisair ne doit pas tenir en otage l'économie de tout un pays. Nous espérons que les cinq années de répit accordé à Tunisair, pour l'aéroport de Tunis-Carthage permettront de la remettre à niveau et la rendre compétitive