Le président du gouvernement, Youssef Chahed, ne désespère d'amadouer l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) qui ne cesse de réclamer son limogeage. Après l'accord sur le versement des augmentations salariales au profit des retraités, le locataire du Palais de la Kasbah a décidé de laisser les prix du lait à la consommation inchangées. Il a été en effet convenu entre le gouvernement et les professionnels de la filière laitière d'augmenter le prix du lait au niveau de la production. L'Union Tunisienne de l'Agriculture et de la Pêche (UTAP) a précisé que le lait sera désormais acheté aux éleveurs à 890 millimes le litre, tandis que les consommateurs continueront à l'acheter à 1120 millimes le litre. Autrement dit, l'augmentation du prix du litre de 175 millimes accordée aux producteurs sera supportée par la Caisse générale de compensation. La décision, qui intervient suite à l'annonce d'un taux d'inflation record de 7,8% durant le mois de juin, devrait certainement plaire à la puissante centrale syndicale. Celle-ci ne cesse en effet de fustiger la dégradation du pouvoir d'achat et de rappeler qu'un accord signée l'année dernière avec le gouvernement prévoyait le gel de la hausse des prix des produits de base. Le président du gouvernement devrait également annoncer une majoration du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et du salaire minimum agricole garanti (SMAG) de 6% au moins dans les quelques jours à venir, comme cela a été convenu avec la centrale syndicale, à l'issue de la réunion de jeudi dernier, 28 juin. Le secrétaire général de l'UGTT a, d'autre part, annoncé, hier, que l'organisation ouvrière et le gouvernement s'apprêtent à signer un accord fixant la date du versement des majorations salariales dans la fonction publique et le secteur public. La signature interviendra le 10 juillet, comme l'a déclaré hier, Noureddine Taboubi. A cela s'ajoute le récent engagement du gouvernement de mettre en œuvre l'accord conclu en novembre 2017 sur la régularisation de la situation des ouvriers des mécanismes 16 et 20, des syndicalistes fichés par la police et des travailleurs de chantiers. Au creux de la vague et dépourvu du soutien de la plupart des partis représentés à l'Assemblée des représentants du Peuple (ARP), Youssef Chahed, dont le limogeage est réclamé par l'ensemble des signataires de l'accord de Carthage à l'exception du mouvement Ennahdha, se montre ainsi prêt à mettre le paquet pour regagner le précieux soutien de l'organisation syndicale forte de quelques 750.000 affiliés et désamorcer les tensions sociales dans un contexte politique et sociale tendu. Cela est d'autant plus plausible que l'UGTT a annoncé des protestations sociales contre les politiques du gouvernement à partir du 10 juillet. « Les instances de décision au niveau des syndicats des bases et des secteurs représentées au sein de l'organisation ont décidé d'entamer des protestations contre la détérioration de la situation économique et sociale à partir du 10 juillet », a déclaré dans un entretien publié hier par l'hebdomadaire arabophone Acharaa-al Magharibi, le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi. «Le gouvernement ne semble pas conscient de la gravité des mesures qu'il est en train de prendre dans un contexte très difficile », a ajouté le responsable syndical, indiquant qu'il s'attend à «une véritable révolte en raison de la politique du gouvernement qui ne fait qu'affamer et appauvrir les citoyens, et qui a déjà abouti au rétrécissement de la classe moyenne». Selon lui, la Tunisie n'est jamais arrivée depuis l'indépendance, en 1956, à une situation aussi critique qui se manifeste à travers la hausse sans précédent des prix et la baisse du pouvoir d'achat des citoyens. Le secrétaire général de l'organisation ouvrière a d'autre part mis en doute les chiffres publiés par l'Institut national de la statistique (INS), accusant cette institution de servir les desseins de la du gouvernement et de la coalition au pouvoir en présentant des «statistiques politisées». Il a également réitéré l'attachement de la centrale syndicale au départ du gouvernement dirigé par Youssef Chahed, lequel a mené, selon lui, le pays à un désastre. «L'UGTT demeure attachée à un changement radical du gouvernement qui assume la responsabilité de la crise dans laquelle est englué le pays », a-t-il martelé. Pour rappel, le départ du président du gouvernement constitue l'unique point sur lequel avaient achoppé les négociations entamées récemment par les signataires de l'Accord de Carthage. Le blocage était tel que le président de la République Béji Caïd Essebsi a été contraint de suspendre ces négociations a été contraint de suspendre ces négociations, jusqu'à nouvel ordre.