Faouzi était le type de l'agent d'assurance dynamique et beau parleur, qui savait embobiner n'importe quelle personne pour la convaincre à signer une assurance-vie ; ou passer un contrat d'assurance automobiles, tout risque. Toujours élégant, rasé de près, les cheveux gominés et les chaussures bien cirées, il ne laissait aucune faille dans son habillement et tenait constamment au look d'un homme distingué ayant beaucoup de goût, ce qui lui permettait de mieux convaincre ses clients. Il commençait son travail tôt le matin, et savait choisir parmi les clients ceux dont il était certain de leur sérieux. Il avait une façon de présenter le produit qu'il vendait et qui prospérait la plupart du temps. En ce mercredi 20 décembre 198... il avait rendez-vous à 11h du matin avec Mme B...., une riche veuve et il devait la visiter chez elle, dans sa somptueuse villa. Il sonna à la porte à 11h11 et une jeune fille lui ouvrit : - « Bonjour. - Vous êtes l'agent d'assurance ? - Tout à fait, mademoiselle. - Entrez, donc, madame B... vous attendait depuis dix minutes. Franchissant un grand patio, il suivit la jeune fille qui l'accompagna jusqu'au bord de la piscine où se trouvait madame B..., allongé sur un transat. Un grand chapeau de paille blanc, lui couvrait la tête et des lunettes de soleil lui couvraient la moitié du visage. Elle était habillée d'une robe de plage longue et ample et chaussait des tongs. Il faisait une chaleur torride et madame B. sirotait à l'aide d'une paille, le cocktail de jus de fruits glacé que lui avait préparé la jeune fille et mis dans un grand verre en cristal blanc, qu'elle avait posé sur la petite table en rotin à placé à côté du transat. Faouzi s'avança à pas cadencés, et à sa vue madame B. se leva pour le recevoir, avec un sourire charmant, qui laissait apparaître l'implant de dents d'une blancheur éclatante lui donnant l'allure d'une dame de quarante ans, alors qu'elle commençait déjà à friser la soixantaine. - « Vous êtes le bienvenu monsieur, prenez la peine de vous asseoir... non, là, sur le fauteuil à côté du mien ; il vous conviendra mieux que ce tabouret ». - « Merci madame » - « Avez-vous préparé le contrat tel que je vous l'ai indiqué ? - « Comme convenu madame, vous pouvez lire avant de signer quoi que ce soit. C'est une assurance-vie, qui, en cas de décès rapportera aux ayant droit cent millions ». - « Vous avez bien spécifié que les bénéficiaires seront mes enfants, à l'exclusion de ma fille qui est mariée à un homme d'affaires et qui n'est pas du tout dans le besoin ; bien au contraire ». - « Absolument chère madame » - « Alors, adjugé. Je vous fais confiance ». Et elle signe sans même lire les détails dans cette série d'articles. D'autant que c'est écrit en petits caractères d'imprimerie. « Il me faut mes lunettes et je ne sais pas où elles sont maintenant. Alors, ce n'est pas la peine. Je me contente d'apposer ma signature un point c'est tout ! ». Faouzi a réalisé l'affaire du jour, et il était très content de sa journée. Mais en quittant la riche veuve, il put apprendre que la jeune fille qui le ramena jusqu'à la porte, n'était autre que la fiancée de l'un des ayant droits de la riche veuve. Elle avait assisté à la discussion du contrat d'assurance, en se tenant toutefois légèrement à l'écart. Ce qui ne l'empêchait pas d'écouter tout ce qui se disait. Faouzi, quant à lui, avait été attiré par le charme de cette jeune fille aux cheveux clairs et à la taille élancée. Aussi n'avait-il pas manqué de prendre ses coordonnées téléphoniques en vue de la revoir et elle n'en manifesta aucune réticence. Bien plus, elle lui fixa d'ores et déjà un rendez-vous au café de la belote. Quelques mois plus tard, elle convola en justes noces avec Zizou, l'un des fils de madame B... En fait, Fériel était la nièce de madame B... Celle-ci s'était chargée de l'élever, depuis l'âge de quatre ans, à la suite de la perte cruelle de ses parents dans un accident de la circulation. Zizou l'avait connue depuis qu'il était lycéen, et elle était pour lui, un amour de jeunesse qui n'avait fait que se raffermir au fil des ans. Maintenant, Fériel est devenu madame Zied, ou Zizou comme sa mère aimait l'appeler. Deux ans après le mariage, un événement malheureux vint troubler la quiétude de cette famille heureuse et sans problèmes particuliers : Madame B., victime d'un accident de voiture, passa de vie à trépas. Son véhicule, pourtant flambant neuf, a été trouvé au fond d'un canal. Madame B., périt noyée. Cependant, l'enquête, ordonnée par le parquet révéla que la victime a perdu le contrôle de son véhicule suite à une défaillance des freins. L'expert de l'assurance a soulevé, en effet, un élément de taille : Cette défaillance n'était pas due à un défaut technique. Elle aurait été, vraisemblablement, provoquée par un tiers, à dessein. Madame B.., n'a donc, pas été victime d'un accident mais d'un meurtre. Qui avait intérêt à générer un tel désastre ? Plus d'un, en effet. Il y avait d'abord Zizou, le fils qui bénéficiait de l'assurance- vie, par moitié avec son frère. Il y avait, également, Fériel, sa femme. Et il y avait aussi Faouzi, l'agent d'assurance qui avait multiplié les contacts et les rencontres avec Fériel, même après son mariage avec Zizou. Il y en avait, donc, des suspects. Mais on ne put, cependant connaître la vraie vérité.