Sous l'effet conjugué de facteurs divers, l'amanderaie sfaxienne s'étant quelque peu dépeuplée, les experts estiment qu'il est grand temps de réhabiliter cet arbre tout aussi emblématique que l'olivier comme l'attestent les statistiques. En effet, il y a seulement quelques années, la région de Sfax comptait autant d'amandiers que d'oliviers, soit environ 06 millions de pieds. Aujourd'hui, la culture de l'amandier est en perte de vitesse ce qui nécessite des mesures destinées à lui donner l'impulsion adéquate. Il serait utile de rappeler que la carte agricole de la ville de Sfax présente la configuration suivante : une zone consacrée presque exclusivement à l'arboriculture, et en particulier à l'amandier qui ceint la zone urbaine, espace auquel succède l'oliveraie en forme de croissant de lune laquelle oliveraie est, à son tour, cernée par la zone des pâturages. Il y a seulement quatre ou cinq décennies, les vergers s'étendant sur une superficie de 06 à 07 hectares, comptaient aux alentours de 50 à 60 pieds d'amandiers ce qui constituait une part non négligeable dans la production régionale estimée entre 18 mille et 20 mille tonnes de fruits par an, faisant ainsi de la région le premier producteur d'amandes à l'échelle nationale, précédant les gouvernorats de Kairouan et de Sidi Bouzid avec lesquels elle totalise 50 % de la production nationale. Or, actuellement la production de la région de Sfax enregistre une baisse importante, se situant entre 10 mille et 14 mille tonnes/ an. Cette baisse est l'effet conjugué d'au moins trois facteurs. Premier facteur : l'expansion urbaine et le parcellement des vergers qui implique le sacrifice d'arbres fruitiers dont essentiellement les amandiers. De la sorte, et précisément, à l'exception de la zone de Sidi Abdelkéfi, il n'y a plus de grandes amanderaies. Deuxième facteur, la sécheresse qui a sévi entre 2000 et 2004 provoquant des dégâts considérables au niveau des amandiers, arbres assez peu résistants donc sérieusement affaiblis et rendus vulnérables surtout à l'effet rongeur de la scolyte, insecte ravageur qui s'incruste sous l'écorce et creuse des galeries dans le bois entraînant l'assèchement total de l'arbre. L'abandon de l'amandier constitue à son tour le troisième facteur quant à la baisse de production de la ville de Sfax, une attitude due au manque de rendement donc de rentabilité, sachant que le prix de revient ne couvre plus les frais nécessités par l'entretien des arbres. Sensibles à tous ces symptômes, experts et administration ont pris conscience de la nécessité d'œuvrer en vue de la réhabilitation des amandiers et l'incitation du Sfaxien à mieux soigner ses arbres et à retrouver les anciennes traditions en la matière et ce à travers des campagnes de sensibilisation. On envisage également de s'orienter vers le système « d'appellation d'origine contrôlée » ( AOC ). Le moyen le plus indiqué, à ce propos, serait d'inciter les producteurs à constituer une ONG avec le concours de l'UTAP. Objectif de l'association envisagée : la réhabilitation des vergers et la valorisation du produit national. Les experts préconisent de commencer par la variété « Ashaak », un produit noble, à l'esthétique et à la saveur spécifiques, adapté au sol de Sfax, Kairouan et Sidi Bouzid. Doté d'une certification propre, il sera mieux armé pour la conquête de nouveaux marchés sachant qu'il est dèjà hautement apprécié sur les marchés traditionnels tel le marché européen. Ainsi valorisé, il verra son cours augmenter ainsi que sa rentabilité. Parallèlement, on préconise l'extension des superficies plantées d'amandiers, estimées à l'état actuel à 60 mille hectares. Comme, la majeur partie des sols est déjà plantée, à l'exception des 10 mille hectares de culture en sec, situés dans les zones de Ghraiba et de Bir Ali, il est indiqué , d'encourager la culture en irrigué là où la qualité de l'eau le permet. Il serait bon de préciser à ce propos que la densité des amandiers et de 70 pieds à l'hectare pour les cultures à sec contre 400 pieds par hectare dans les zones irriguées. Si ce dernier mode de culture existe dans les régions de Kairouan et de Sidi Biouzid, son introduction constituera une première à Sfax. Pour ce qui est des incitations dont bénéficie le secteur de l'arboriculture, il serait judicieux d'augmenter les subventions prévues par le Code des Investissements Agricoles qui sont de l'ordre de 20 à 25 % des coûts pour les petits et moyens arboriculteurs. Il est à souligner également que les variétés « Ashaak », « Ksontini », « Zahaf » et les autres variétés du terroir présentent l'avantage d'être mieux exportables que les variétés étrangères produites en Tunisie pour la simple raison que le coût de production des dernières citées est inférieur en Europe. D'autre part, les variétés du terroir sont très appréciées par les consommateurs étrangers et plus particulièrement les consommateurs européens. L'inconvénient étant par contre leur coût de production élevé, la solution est à chercher du côté de la recherche scientifique. L'unité spécialisée dans la recherche sur l'amandier au sein de l'Institut de l'Olivier à Sfax gagnerait, selon les experts et les professionnels, à être plus développée.