Il serait question de créer une équipe de foot au Vatican. Le foot ayant remplacé depuis longtemps les religions en tant qu'opium des peuples, il était normal de déployer désormais les fanions des clubs sur la place Saint Pierre. Il y aura foule, peut être aussi quelques hooligans à qui on demandera pénitence après les matchs, et Dieu y retrouvera les siens. Le foot étant finalement un moindre mal. Il y a tout de même d'autres jeux où il semble difficile de trouver des accommodements en invoquant à tout bout de champ l'illumination d'inspiration divine pour justifier tous les abus. C'est toujours plus facile de ramener au céleste les errements de l'humain, mais pourquoi s'en priver, dira-t-on, puisque le truc marche à tous les coups. Ainsi, Le Président Bush ne s'est pas privé récemment de l'opportunité de Noël pour demander à ses concitoyens de prier pour les troupes envoyées en Irak. Il l'a fait non pas pour expier une faute, mais pour appeler à la rescousse l'irrationnel quand son rationnel ne marche vraiment plus. Lui aussi est un illuminé qui n'hésite pas à provoquer des centaines de milliers de morts pour prouver que son rêve est une réalité. Même quand tout porte à croire que c'est un leurre. Au jeu de la guerre, il n'a pu obtenir aucune lueur de paix. A ses injonctions intempestives au sujet de la Démocratie à gagner, il ne peut maintenant espérer qu'une guerre civile sans horizon d'apaisement. Il a même réussi à mettre le feu aux poudres partout, de l'Irak à l'Iran, du Liban en Somalie, de l'Afghanistan au Pakistan, pour ne parler que des feux qui brûlent. Et non de ceux qui couvent. Alors, il recadre, d'autant plus qu'il est bien obligé de composer avec des Démocrates qui ne trouvent pas vraiment que l'expédition irakienne soit un épisode glorieux pour la nation américaine. Il n'est pas toujours facile d'affirmer avec force et conviction le contraire de ce qu'on a soutenu la veille. Mais recadrer pour mieux s'adapter aux opportunités est depuis longtemps reconnu comme une vertu rattachée à la bonne «gouvernance». Il n'y aurait que les imbéciles à ne pas changer d'avis. Blair de Grande Bretagne n'est pas lui aussi de ces imbéciles là. Et il s'évertue ces derniers temps à multiplier les initiatives qui doivent laisser comprendre qu'il fut un homme de paix, quand ses mandats successifs ont plutôt laissé l'image d'un va-t-en-guerre au suivisme quelque peu ringard. Les morts en sus. Ceci dit, et depuis que tout le monde a compris que même la pendaison de Saddam n'a pas du tout mis fin aux hostilités, tout le gratin du haut du pavé mondial tente de desserrer les lacets des petits souliers qui transforment leur marche en calvaire. A commencer par l'Humanoïde au sac de riz devant les caméras TV, Bernard Kouchner. A partir du moment où ses théories sur l'urgence de la guerre en Irak ne tiennent plus la route, il change le sac de riz d'épaule et ses assurances de cap. Il écrit, sans se démonter et en bonne girouette, que «la première arme de destruction massive en Irak, ce fut Saddam Hussein». Pirouette linguistique pour ne pas dire simplement qu'il avait eu tout faux quand son «humanitaire» de soutien aux bombardements américains le laissait affirmer avec certitude l'existence de ces armes de «destruction massive». Il lui faut bien recadrer ses propos pour continuer à vivre, bien paraît-il, des retombées financières et autres de ses engagements pour la destruction massive et le guerre civile en Irak. Même l'ancien Secrétaire Général des Nations Unies, Kofi Anan, tente de se démarquer de la pratique suiviste derrière les plus forts qui fut la sienne. Il aurait maintenant des scrupules au sujet des pressions qu'il semble avoir endurées pour accepter une ligne guerrière qui n'aura eu que les inconvénients de la compromission au nom de la paix dans le monde. Il va avoir le temps de se faire pénitence, maintenant qu'il est rangé des Nations désunies. Et à tout prendre, personne ne peut rien y faire. Comme dans les westerns, on tire et on tue d'abord. On passe au saloon par la suite, pour payer la tournée. Ou pour tricher aux cartes. Sans états d'âme et sans payer la note. Sauf bien entendu quand on a le malheur de faire partie des vaincus. Dans ce cas, les westerns nous ont habitués l'image des pendus pour l'exemple et des goudronnés emplumés pour les ricanements du petit peuple bien obligé d'afficher son allégeance aux brutes du moment. Les «recadreurs» ont beau jeu, jusqu'à ce qu'on n'arrive plus à les encadrer !