Tunis le temps : Le crime passionnel remonte à la nuit des temps, et il a toujours été la conséquence d'une attitude spontanée voire innée de son auteur, mu par l'esprit de vengeance et la nécessité de lever un affront et de laver son honneur. Les exemples se multiplient, et les méthodes varient mais le mobile reste toujours le même. Toutefois, en matière pénale le tribunal s'attache toujours à vérifier si le meurtrier avait agi de manière instantanée et spontanée, ou s'il avait au contraire planifié pour commettre son acte. Car c'est de cette manière que le juge peut déterminer si l'auteur du crime avait l'intention ou pas de tuer. L'avis de la cour de cassation, qui a un pouvoir de contrôle d'une application saine et objective de la loi par les autres juridictions, est unanime là-dessus, et ses décisions sont constantes : Il y a intention de tuer lorsque l'auteur a pris son temps pour planifier à l'avance son acte. Voilà quelqu'un qui est surpris en entrant au domicile conjugal, de trouver un intrus en compagnie de son épouse, en flagrant délit d'adultère. Son sang ne tournant qu'une fois, il se rue sur sa femme en l'étranglant jusqu'à ce que mort s'ensuive, ou assène un coup mortel à l'amant de celle-ci. L'acte n'est pas réfléchi et de ce fait il ne sera pas jugé pour meurtre avec préméditation, mais seulement pour violences ayant généré la mort sans intention par son auteur de la donner. C'est qu'il y a une différence de sanction entre le premier et le deuxième cas. La sanction prévue pour un meurtre avec préméditation est la peine capitale en vertu des articles 201 et 202 du code pénal. De même si l'auteur du crime, avait l'intention de voler, avant de commettre le meurtre il sera sanctionné par la même peine en vertu de l'article 204 du code pénal. En l'espèce, il s'agit d'un époux qui était en différends avec sa femme, au moment des faits. Ìl était en instance de divorce et soupçonnait une nouvelle relation de son épouse avec un certain Wissam. Il l'avait appris suite à des rumeurs qui circulaient dans le voisinage, mais il n'était pas certain , et laissait le temps au temps, se contentant de quitter le domicile conjugal, en allant s'installer chez ses parents en attendant l'issue de la procédure de divorce , engagée depuis quelques mois. Le jour du drame, et se rendant au domicile conjugal, et voulant s'enquérir de l'état de son épouse, il trouva malheureusement porte close. Il alla au taxiphone en face, pour téléphoner à sa belle -mère. Celle-ci lui répondit en l'informant que sa fille, était en déplacement. Se contentant de cette réponse, il quitta le taxiphone, mais il remarqua en sortant un rai de lumière provenant de l'une des fenêtres de sa maison. Il comprit que sa belle-mère lui avait menti, et que sa femme s'y trouvait. Pourquoi ne voulait-elle pas lui ouvrir, en lui faisant croire qu'il n'y avait personne ? Il y avait donc anguille sous roche. Pour en avoir le cœur net, il s'introduisit chez lui, subrepticement par la fenêtre de la cuisine , après en avoir brisé l'un des carreaux pour se diriger à la chambre où se trouve sa femme en compagnie du même Wassim. Ses soupçons étaient ainsi confirmés. Prise de court, l'épouse confuse et craignant une réaction inattendue de la part de son mari abusé, s'empressa de ses diriger vers la salle de bain où elle réussit, après avoir verrouillé la porte derrière elle, à sortir par la lucarne, pour prendre ses jambes à son cou et regagner le domicile de ses parents. L'époux se retrouva face à face avec l'amant de sa femme. Il était au paroxysme de la colère et commença à le rosser de coups. Celui-ci l'avait fui une première fois.Il le rattrapa et se saisissant d'un tesson de bouteille il lui porta plusieurs coups et ne s'arrêta que lorsque son adversaire perdit connaissance en s'affaissant par terre, le corps tout en sang. Le mari, quitta alors les lieux , pour aller chez sa grand-mère où il se changea, avant de se rendre au poste de police, où il fit part du fâcheux incident. Il déclara cependant qu'il n'avait l'intention de tuer la victime et qu'il avait agi sous l'emprise de la colère. Il ajouta qu'il avait simplement l'intention de réprimander sa femme. Mais son amant, la victime en l'occurrence était intervenu pour prendre la défense de celle-ci et avait l'air agressif. Devant le tribunal, il réitéra ces mêmes déclarations, mais écopa d'une première condamnation de dix ans de prison. Interjetant appel, il insista à nouveau sur le fait qu'il n'avait l'intention de tuer la victime, qu'il trouva cependant en compagnie de son épouse, dans une attitude plus que compromettante. L'avocat de la défense plaida la légitime défense, son client étant une double victime, d'adultère et d'agression par l'amant de son épouse. La cour après en avoir délibéré, ramena la peine de dix ans de prison prononcée à l'encontre de l'accusé en première instance à 3 ans.