Interview du bâtonnier, Me Béchir Essid Le Conseil de l'Ordre des Avocats tiendra le 29 novembre 2008 une assemblée générale extraordinaire consacrée essentiellement au projet du règlement intérieur de la profession. A cette occasion nous avons invité le bâtonnier Me Béchir Essid. Il nous parle ici du bilan de 2007 à 2008 de son mandat, des acquis pour la profession et des autres revendications du projet du règlement intérieur, des relations du Conseil de l'ordre avec les autorités et notamment du dialogue avec le ministère de la Justice et des droits de l'Homme et aussi des accusations avancées par certains avocats quant aux dépenses personnelles aux frais du Conseil de l'ordre qu'il est en train de faire. Interview. Le Temps: Quelles sont les revendications qui ont été réalisées pendant cette période de votre mandat à la tête du Conseil de l'ordre? Me Béchir Essid: D'importantes revendications que les avocats ont lutté pendant plusieurs années pour les concrétiser. La liste est longue nous allons signaler les plus significatives. La première est celle de la constitution de la caisse d'assurance maladie suite à un décret présidentiel c'est un acquis de taille pour la profession . La deuxième est celle de l'acquisition par le Conseil de l'ordre du club de Soukra dont il est devenu propriétaire. Le ministre de la Justice et des droits de l'Homme m'a donné dernièrement l'acte de propriété du club et je le remercie. Cela a été concrétisé suite à une recommandation du Président de la République. Ce club a une superficie de 7000 m2 et sa valeur avoisine les 3 milliards. Une autre revendication qui a été concrétisée est celle de l'élargissement du champ d'intervention de l'avocat. En effet, la Chambre des députés a adopté dernièrement l'amendement de la loi foncière qui stipule l'obligation de la présence de l'avocat lors de l'acte de l'enregistrement des contrats fonciers. Et nous espérons que prochainement sera amendée la loi de l'actualisation foncière pour rendre obligatoire la présence de l'avocat comme nous espérons aussi l'amendement de la loi concernant la Cour de cassation pour rendre aussi obligatoire la présence de l'avocat dans toutes les affaires se rapportant aux délits auprès de la Cour de cassation. N'oublions pas aussi le décret instituant l'augmentation du timbre qui est la principale ressource financière pour la caisse d'assurance maladie. •Et les revendications qui n'ont pas été satisfaites? -Les revendications des avocats sont nombreuses. Elles se sont accumulées depuis des années. Des années qui n'ont connu aucune réforme de la profession. Les principales revendications que nous réclamons sont en premier lieu l'amendement des lois régissant l'organisation de l'Institut supérieur des avocats, ces lois ne permettent pas au Conseil de l'ordre de jouer un rôle agissant du moins, nous revendiquons que le Conseil de l'ordre soit un vrai partenaire dans la direction de l'institut en tout ce qui concerne l'organisation, l'enseignement et le recrutement parce que cet institut concerne l'avocatie et en l'état actuel des choses la plupart des avocats considèrent que le Conseil de l'ordre a été lésé par les lois régissant l'institut qui octroient les rôles principaux dans la direction de l'institut aux ministères de la Justice et des droits de l'Homme et celui de l'Enseignement supérieur et de la recherche scientifique et négligeant ainsi le rôle du Conseil de l'ordre. Nous revendiquons avec insistance un rôle essentiel du Conseil de l'ordre dans la direction et l'organisation de l'institut. •Vous avez présenté cette revendication au ministère? -Absolument et comme le dialogue avec le ministère est renoué et il a porté ses fruits nous avons commencé par débloquer notre boycottage de l'institut et nous avons accepté d'y participer ce qui a consolidé le dialogue avec les autorités qui est devenu fructueux et dans ce sens, on espère que les autorités et à leur tête son Excellence le Président de la République qu'il ordonne l'amendement des textes de loi régissant l'organisation de la direction de l'institut. Nous revendiquons aussi l'instauration du poste de l'avocat-conseiller comme il est de vigueur dans plusieurs pays comme l'Egypte et en obligeant toute entreprise et société à recruter un avocat-conseiller qui sera chargé des affaires juridiques de la société ou de l'entreprise ce qui va permettre d'élargir plus le champ d'intervention de l'avocat et aussi protège la société ou l'entreprise des abus juridiques. Nous revendiquons aussi la constitution d'une caisse "Carpa" où seront versés l'argent des clients des avocats sur un compte bancaire au nom du conseil de l'ordre qui bénéficiera d'un pourcentage prélevé sur les sommes versées. Cette caisse permettra de sauvegarder les sommes d'argent des clients et de protéger l'avocat. Nous revendiquons de même de faciliter le travail quotidien de l'avocat dans l'exercice de sa fonction. Notamment devant les tribunaux et aussi d'assainir ses relations avec les magistrats. • Justement les relations des magistrats avec la section de Tunis du Conseil de l'ordre n'est pas au beau fixe. L'Association des magistrats et la section ont publié des communiqués où ils "s'accusent" mutuellement. Qu'en pensez-vous ? -La vérité, j'étais surpris de la publication du communiqué de l'Association dont les termes sont menaçants envers les avocats et qui appelle les tribunaux à prendre des mesures contre les avocats et j'étais aussi étonné que le communiqué en question a été approuvé par le conseil national de l'Association. Je crois que la haute mission de la magistrature et de l'avocatie consiste à réaliser la justice entre les citoyens et leur protection et non la publication de communiqué où ils s'accusent mutuellement. Ils sont des partenaires et doivent coopérer et éviter tout ce qui peut nuire à leurs relations qui doivent se baser sur le respect mutuel afin que chacun puisse exercer sa mission dans des bonnes conditions, et si un incident quelconque survient, il faut le dépasser par le dialogue et la négociation afin que les droits des justiciables ne soient pas lésés. • Le projet de règlement intérieur de la profession va faire l'objet d'une assemblée générale extraordinaire du conseil de l'ordre qui souhaitez-vous ? -Nous espérons que ce projet sera enfin adopté. Il sera discuté puis passé au vote. C'est un projet qui a été préparé par les structures de la profession. Il a été présenté à une assemblée générale mais il n'a pas été adopté. Nous allons donc le rediscuter et amender certains de ses articles et j'espère qu'il sera cette fois-ci adopté. • Me Essid, certains avocats vous accusent de consentir d'énormes dépenses et d'effectuer plusieurs voyages aux frais du Conseil de l'ordre. Est-ce vrai ? -Non et c'est totalement faux parce que ce sont des accusations gratuites et erronées. Dire que la facture du téléphone portable du bâtonnier est de 3000 dinars et que sa voiture consomme une énorme quantité d'essence ou qu'il voyage énormément. Ce groupuscule d'avocats qui s'occupent de ces choses futiles auraient dû s'occuper des questions qui intéressent la profession et de ses réformes. Le téléphone, je l'utilise pour contacter les avocats et pour être toujours et tout le temps au courant de leurs préoccupations et de leurs problèmes et aussi pour contacter les parties officielles. Et vous savez quand je suis à l'étranger les coups de téléphone et qui sont nombreux sont facturés sur ma note. Le téléphone, je l'utilise pour le bien de la profession, la voiture aussi me sert à se déplacer pour rencontrer les avocats dans toutes les régions et les voyages que j'effectue c'est aussi dans l'intérêt de la profession. Comme je l'ai dit, ces quelques avocats qui s'occupent de ces futilités à vrai dire, ils veulent par là "nuire" à l'image du bâtonnier mais ils n'iront pas loin... Interview réalisée par Néjib SASSI