Pourquoi les dignitaires et anciens présidents de l'Etoile se sont-ils réunis avant hier? A l'évidence c'est d'abord pour distiller un message clair: le besoin impérieux de rétablir la sainte alliance autour du club. Ensuite pour apporter un soutien – dont on a senti qu'il était plutôt mitigé – pour Moëz Driss. Par ricochet, un message plutôt codé pour le président étoilé. Faut-il le déchiffrer ainsi? : "Tu es le président de l'Etoile certes, mais c'est nous qui t'y avons mis. Ne fais pas cavalier seul!". Est-ce donc une manifestation de soutien? Est-ce plutôt une subtile mise en garde? C'est tellement ambivalent, si dilué, tellement nuancé qu'on n'en saisit pas le fil conducteur. On sait que, qu'il s'appelle Othmane Jenayeh, Moëz Driss ou Abdeljelil Bouraoui lui-même, à Sousse, le président de l'Etoile vit dans une pression intenable. Me Bouraoui, celui qui dissertait avec beaucoup de philosophie – de recul – samedi dernier, en en sait quelque chose. Durant sa présidence, l'Etoile a vécu de très hautes turbulences. Elle était écartelée entre les conflits d'intérêts et les intérêts divergents des clans. Il s'en est tiré miraculeusement. Idem pour Mestiri auquel on a coupé les vannes. Se rappelle-t-on les conditions de précarité vécues par le club quand Jenayeh a été appelé à la rescousse? Pour se maintenir à la tête de l'un des clubs les plus difficiles à gérer du pays, Jenayeh devait plaire à la fois au bon Dieu et à son diable. Et, c'est parce qu'en face, il y avait une Espérance "malade" de gigantisme que tout a été mis en œuvre pour que l'Etoile en contracte le virus. Ce fut d'ailleurs la période la plus féconde dans la bipolarisation "Espérance/Etoile" et leur duel de titans, dans toutes les disciplines, loyaux ou pas loyaux, en définitive, cette rivalité profita au sport et aux équipes nationales. Mais après? Ce Jenayeh qu'on est en train de "beatifier" à Sousse, ne fut-il pas sommé de sortir par la petite porte? Ne l'a-t-on pas accablé de dérision, de sobriquets réducteurs en faisant l'éternel Poulidor, celui qui arrivait toujours deuxième après Merckx? On en est même à affabuler sur un "retour de Jenayeh par fils interposé". Et il est curieux que des personnalités de premier plan, des hommes emblématiques de Sousse comme Abdelmajid Chetali – qui parle quand il se tait – en arrivent à ne concevoir l'avenir de l'Etoile que dans des sphères caciques précises. On comprend parfaitement que l'Etoile est, de fait, la chasse gardée des mécènes institutionnels. Ce n'est pas une mauvaise chose. Sauf que les antagonismes dans les hautes sphères de l'Etoile sont aujourd'hui un peu trop "médiatisés" et "médiatisés" à propos. Sans doute, a-t-on vu un public se déchaîner contre Moëz Driss après la défaite contre l'Espérance. Mais c'était un peu trop direct pour être totalement spontané. Et c'est ce qui a prédit cette réunion aux dignitaires de l'Etoile, avec ce faisceau de langage du serail si mécaniquement débité par Me Bouraoui. Etait-ce vraiment pour sécuriser Moëz Driss? Et si l'on en faisait une lecture au deuxième degré…