* A professeur blasé élève démotivés... S'ennuyer à l'école, au lycée ou même à la faculté, aller jusqu'à détester les bancs et les murs de sa classe, rejoindre à contrecœur l'établissement où l'on est inscrit, ne plus aimer les études, tout cela peut s'expliquer de différentes manières. Mais l'un des facteurs principaux de ce désamour se trouve être l'absence sur le lieu des études de motivation suffisante et d'ambiance propice à la culture et au savoir ! L'architecture de l'établissement et l'état de ses salles sont par exemple susceptibles de rebuter l'élève et l'étudiant, les programmes décidés peuvent ne pas répondre aux attentes des apprenants ; les agents de l'administration aux attitudes anti-pédagogiques sont parfois responsables d'un divorce profond entre l'élève et son école ; mais les enseignants ne sont pas en reste. Par leur incompétence, leurs caractères ronchons, leurs complexes, leur inexpérience pédagogique, leur apathie, leur démotivation de fin de carrière et par bien d'autres défauts, certains d'entre eux se rendent, consciemment ou sans le savoir, responsables du désintérêt grave que manifeste leur jeune public pour leurs cours.
Calcul pour les élèves, somme pour l'instit' ! Que pensez-vous par exemple de cet instituteur de presque 60 ans et diabétique de surcroît qui se contente pendant sa séance de proposer aux élèves un exercice de calcul d'une heure pendant laquelle il prend quant à lui un somme revigorant au fond de la salle. A son réveil, ce n'est même pas lui qui corrige l'exercice mais le plus brillant des enfants. Dans une autre école, la maîtresse suppléante assure presque tous les cours de la même classe, à cause des absences répétées de l'institutrice titulaire ! Or, la remplaçante étudie encore à la faculté et ne sait même pas qui est Pinocchio, personnage illustre dont il est question dans le livre de ses élèves ! Une autre enseignante du primaire a infligé une colle très sévère à l'une de ses élèves sous prétexte que celle-ci n'avait pas appliqué la règle (ce n'en est une en fait que dans la grammaire de la maîtresse) selon laquelle on ne met JAMAIS de majuscule après la virgule. Quelle ne fut la confusion de l'enseignante lorsqu'à la direction régionale où on l'avait convoquée, son inspecteur lui apprit que sa « règle » pouvait le plus correctement du monde être tordue dans divers emplois!
« Vous comprendrez l'année prochaine ! » Dans l'enseignement secondaire, on se plaint trop des élèves et on oublie d'en vouloir un peu aux professeurs. Ces derniers ne sont malheureusement pas tous assez chevronnés pour dispenser leurs cours sans la moindre inexactitude. Pédagogiquement non plus ce ne sont pas toujours des modèles de compréhension, de tolérance ni de tact. Il en est qui maîtrisent très mal leurs classes et sont les premiers à provoquer le chahut et la gabegie parmi les adolescents dont ils ont la charge. Quand ils enseignent la littérature, ils ne veillent pas assez à mettre en relief ce qui fait la beauté d'un récit ou d'un poème, mais se bornent souvent aux questions posées par le manuel et surtout à celles qui ont trait au thème abordé par le texte. Les enseignants eux-mêmes expliquent des textes et des auteurs qu'ils n'ont jamais aimés ; conséquence immédiate et prévisible : ils bâclent le travail et escamotent l'essentiel de ce qui fait la valeur et la saveur esthétiques du texte et de l'œuvre si bien que les élèves n'en tirent rien qui vaille ! Même quand ils lisent le poème ou l'extrait théâtral, ces partisans du moindre effort oublient de respecter les règles élémentaires d'une bonne lecture expressive ! Au tableau, ils griffonnent n'importe comment leurs notes synthétiques et il vous faut parfois une intelligence et une capacité de discernement surhumaines pour comprendre le rapport entre ces notes folles réparties sur toute la longueur et sur toute la largeur du cadre noir. Les questions qu'ils posent ne sont pas toujours les bonnes ni formulées dans la langue la plus intelligible. Quand un élève demande à comprendre ce qui a été insuffisamment expliqué, il est parfois brimé sur le ton le plus désobligeant. Entre enseignants, on aime beaucoup railler ce genre d'élèves en leur disant : « vous comprendrez l'année prochaine ! »
« Instituteurs » à l'université A l'université, il vaut mieux ne pas parler de pédagogie avec certains enseignants. Les étudiants n'ont qu'à se hisser à notre niveau, vous rétorqueront-ils immédiatement ! On déplore souvent à tort le recours par le ministère de tutelle aux enseignants du secondaire dont une bonne partie est pourtant très qualifiée pour donner certains enseignements à la faculté. Dans l'attitude que prennent en classe certains professeurs blasés, vous lisez sans peine la démotivation totale. Il faut dire que le niveau très bas de bon nombre d'étudiants n'est pas pour autoriser l'optimisme ni l'enthousiasme au sein des universitaires ! Le sentiment nouveau qu'ils éprouvent ces dernières années et qui renforce leur conviction de n'être plus en définitive que des « instituteurs » d'université, achève d'aigrir leurs caractères et de les décourager ! C'est la raison pour laquelle quelques uns parmi eux se sont davantage consacrés à leurs recherches et à leurs promotions depuis qu'ils ont perdu le goût de l'enseignement ! Doit-on attendre de tels fonctionnaires qu'ils fassent aimer les études à leurs disciples ? Comme pour les autres plaies et abcès qui gangrènent l'enseignement chez nous, il faut sévir et dans l'urgence contre l'état d'esprit contagieux qui répand la paresse et l'improductivité parmi l'élite cultivée et noble du pays !