La manifestation a réuni d'éminents experts et universitaires tunisiens et français, ainsi que de nombreux directeurs d'entreprises et d'établissements bancaires et financiers, des cadres de l'administration et des participants de divers horizons, qui ont examiné le sujet sous ses divers aspects, au niveau de la théorie comme de la pratique, dans le cadre de séances plénières ouvertes et d'ateliers de travail plus spécialisés, outre une conférence- débat internationale consacrée exclusivement à la question de la bonne gouvernance de l'entreprise familiale.
Place de choix En effet, comme l'ont souligné tous les conférenciers ayant pris la parole, la bonne gouvernance détermine largement le bon fonctionnement et l'efficacité du processus de succession et de transmission des entreprises familiales et assure ainsi leur pérennité et leur croissance, dans le temps. Or, que ce soit en Tunisie, dans les pays européens, aux Etats-Unis d'Amérique et au Japon, les entreprises familiales occupent une place de choix dans l'économie et l'emploi. Selon M. Chokri Mamoughli, secrétaire d'Etat auprès du ministre du Commerce et de l'Artisanat, chargé du commerce extérieur, qui a ouvert la manifestation, un tiers des 200 premières entreprises tunisiennes, soit près de 75, sont des entreprises familiales, dont certaines créées au lendemain de l'indépendance, sous forme de petites entreprises, sont devenues, aujourd'hui, des groupes et des firmes cotés en Bourse, et ont pu même acquérir un rayonnement à l'échelle internationale, en exportant partout leur production. En Allemagne, les entreprises familiales assurent 60% du PIB et 75% des salaires, et autant à l'échelle européenne. Elles représentent 40% des entreprises des plus grandes tailles dans le monde. Cependant, un des défis auxquels est confrontés l'entreprise familiale est la longévité et la pérennité. La succession est périlleuse pour les entreprises familiales. En Tunisie, toujours d'après le secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur, 30% des entreprises familiales passent le cap de la 2 ème génération, et seulement 15% arrivent à se maintenir jusqu'à la 3 ème génération. La situation est similaire dans les autres pays et a été aggravée par la récente crise financière mondiale. L'attachement du propriétaire à son entreprise et son souci d'œuvrer à sa prospérité sont des atouts positifs, mais ils restent insuffisants sans une bonne gouvernance de nature à mieux régir les relations entre les différentes parties prenantes. Outre leur importance quantitative, les entreprises familiales, notamment en Tunisie, opèrent dans tous les secteurs d'activité, industriel, agricole, commercial, bancaire, prestations de services, presse. La nécessité de les encadrer pour leur permettre de produire , de croître, de se conserver, et de participer à l'emploi, est impérative. Cependant, malgré les nombreuses mesures et initiatives prises par l'Etat, dans ce domaine, à tous les plans, notamment sur le plan juridique, de nombreux problèmes et lacunes persistent, encore, à en juger par certaines études et travaux. Selon une étude faite par certains cabinets d'avocats, aucune recommandation sur les pratiques de bonne gouvernance n' a été formulée, en Tunisie, alors qu'à l'étranger, plusieurs institutions publiques et privées, se sont prononcés en la matière, comme les chambres de commerce, l'Institut français des administrateurs, l'Organisation pour la coopération et le développement en Europe (OCDE). L'Institut français des administrateurs (IFA) est fortement représenté dans ce Colloque. Pourtant, M. Chokri Mamoughli a rappelé les nombreux avis favorables émis au profit de la Tunisie, par les Organismes internationaux et les Agences de notation sérieuses en ce qui concerne la bonne gestion et la transparence qui sont les principales pratiques de la bonne gouvernance. Aussi, en dépit de la morosité provoquée par la crise financière mondiale, les investisseurs étrangers continuent de faire confiance à la Tunisie et leur nombre a augmenté, durant la dernière période.
Alternatives de bonne gouvernance Il est reproché aux entreprises familiales le fait que les PDG soient des patriarches, alors que les conseils d'administration et les associés minoritaires ont, souvent, un rôle de figurants. L'accent est mis sur la nécessité d'équilibrer les pouvoirs au sein des conseils d'administration, avec, par exemple, la présence d'un nombre plus important d'administrateurs indépendants. Il est aussi recommandé de renforcer le rôle des comités d'audit mis en place par la loi d'octobre 2005 et d'assurer une participation active des actionnaires minoritaires aux assemblées générales. S'agissant de la succession et de la transmission, la législation tunisienne se caractérise sur ce plan par sa vision moderne, car la transmission des entreprises familiales est un moment clé de leur vie et la réussite de cette opération est un gage de leur survie et de leur pérennité. D'autant que dans l'actuel environnement de crise, les entreprises familiales font l'objet de suspicion, de par cette particularité. Ainsi, la loi de finances de 2007 a exonéré la transmission des entreprises en ce qui concerne les droits d'enregistrement sur les successions, à condition, entre autres, que les héritiers et les légataires s'engagent à continuer l'exploitation de l'entreprise pour une période de trois ans au moins, après le décès du propriétaire. Ainsi, les héritiers et légataires exonérés des droits de succession peuvent injecter des liquidités dans l'entreprise et consolider son assise. Mais, dans ce contexte, la bonne gouvernance implique que le directeur propriétaire de l'entreprise familiale anticipe et prépare sa succession de son vivant, en choisissant une personne à qui il transmet son pouvoir exécutif. Et fait très positif, ce successeur peut être un membre de la famille ou une personne extérieure à la famille. Le successeur peut même être élu par le conseil d'administration ou l'assemblée générale. A cet égard, les participants ont dit attendre beaucoup de ce Colloque. M. Serge Degallaix, ambassadeur de France à Tunis s'est dit persuadé que les conclusions de cette rencontre scientifique de haut niveau seront très utiles pour la partie française, compte tenu de la place importante que les entreprises familiales occupent en France, à tous les plans et de la similitude des défis et enjeux rencontrés, dans ce domaine.75% des moyennes entreprises françaises sont des entreprises familiales. L'ambassadeur français s'est félicité, à cette occasion, de « l'intensité des relations tuniso - françaises », attribuant le mérite de leur développement continu à la bonne gouvernance et à la transparence qui les caractérisent, s'agissant notamment des rapports économiques.