C'est en pèlerin et messager de la paix que le pape Benoit XVI entame à partir d'aujourd'hui une visite très politique et politisée en Palestine bien qu'elle ait été placée sous le signe du grand pardon. Mais de quelle paix s'agit-il ?voilà un mot galvaudé qui a perdu de son sens par des politiques dénués de bon sens. C'est une visite hautement emblématique, hautement cruciale, après le 11 septembre 2001, après le carnage de Gaza, après le refus déclaré du gouvernement israélien de la solution de deux Etats, après la poursuite de la colonisation, après... Certes le pape n'est pas venu avec des présents ou des offrandes pleins les bras, non plus pour faire son mea-culpa, après les polémiques suscitées par son discours de Rabistone où il laissait entendre que l'Islam était une religion violente, et après sa levée de l'excommunication de Williamson cet évêque négationniste convaincu qu'il n'y a pas eu de chambres à gaz, mais pour appeler au dialogue des religions, pour rassurer les Musulmans, concilier Juifs et Chrétiens et conforter les Chrétiens qui vivent mal leur foi dans la région et qui n'hésitent pas du fait de l'oppression israélienne à émigrer massivement vers l'Europe et les Etats Unis. La mission reste dangereuse dans une région plus fébrile que jamais. Les Palestiniens, dont la situation s'est nettement dégradée et dont les espoirs de paix se sont envolés depuis longtemps et surtout pour longtemps, seront très attentifs à ce que dira ou ne dira pas le pape à propos de la création d'un Etat palestinien. Que va dire le messager de la paix au prix Nobel de la paix le président Shimon Peres qui a assisté en spectateur au massacre de Gaza et qui cautionne la ligne dure du nouveau gouvernement qui ne se sent pas concerné par les accords passés par ses prédécesseurs et la formule des deux Etats. Même s'il a dénoncé la manipulation idéologique, que peut proposer le pape dans les seize discours qu'il doit prononcer en Palestine ?peut-il dénoncer la politique israélienne à El Qods que les Israéliens ont annexée militairement en 1967 avant de la proclamer abusivement leur capitale éternelle et réunifiée avec tous les abus qui en découlent ? Va-t-il trouver cette situation très affligeante pour les Palestiniens qui revendiquent à juste titre ce haut lieu de l'Islam comme...future capitale de leur...futur Etat ? Comment le pape va réagir devant le mur de séparation raciste érigé à Beit Lahm lieu de naissance de Jésus par Israël contre toute légalité internationale ? Aura-t-il les mots forts pour dénoncer la politique des Israéliens qui ont contribué à rendre la vie dure aux Chrétiens de la région dont le nombre a diminué considérablement ? Va-t-il regretter cette montée de l'islamophobie, une manipulation occidentale et reconnaître que l'Islam cette religion tolérante en paye les frais ? Autant d'interrogations, peut-être pas avec autant de réponses pour le pape d'origine allemande dont chaque propos et chaque geste seront étudiés à la loupe, guettés, scrutés, analysés surtout en Israël. Voilà pourquoi même si l'église n'est pas une force politique mais spirituelle, c'est dans un champ de mine que Benoit XVI s'aventure. Il faut des hommes politiques justes tolérants rationnels et démocrates pour croire sincèrement au dialogue des cultures, des civilisations et des religions. Est-ce le cas en Israël ? La réponse est évidente. Même s'il ne le dira pas il aura au moins l'occasion de le constater.