* " Pour moi, ce n'est pas un retour mais un nouveau départ !" Ridha Labidi est le premier entraîneur de basket à s'être assuré sa reconduction pour une seconde saison. Les responsables étoilés tenaient à le maintenir. Ils avaient fait le bon choix en optant pour leur coach et en le remettant sur selle. Ce dernier ne ratait pas son retour après cinq ans d'éloignement de la première responsabilité technique d'une équipe senior. Appelé par les dirigeants étoilés, il cédait à la passion du cœur pour la balle au panier, ce même cœur dont les malaises l'en ont écarté, et prenait les rênes d'un effectif, loin d'être le meilleur du championnat. La " méthode Labidi " donnait pourtant ses fruits et menait l'ESS vers le troisième sacre de son histoire dans ce sport pas trop populaire dans " la perle du Sahel ". Elle permit, aussi, à cette jeune équipe de vivre une épopée extraordinaire en disputant, et c'est une première pour un club tunisien, un championnat d'Afrique des clubs champions et de parvenir jusqu'en finale. Une défaite honorable après un match complet, par trois petits points contre un géant de l'Afrique ; Primiero De Augusto, 7 fois détenteur du titre. Pourtant plusieurs détracteurs ne donnaient pas cher de la peau du " revenant ", le croyant dépassé par les évènements et incapable de refaire surface. C'était sans compter sur la persévérance, le sérieux et l'énergie débordante de ce bourreau de travail. A ceux qui l'ont prématurément enterré, il rétorque : " N'eut été ma maladie, je n'aurai pas abdiqué. Ceci dit, je ne me suis jamais éloigné des terrains et terré dans un petit coin comme certains. J'ai fait la direction technique des jeunes pendant 5ans au CA. Je ne ratais pas les rencontres du championnat. Je n'aime pas trop parler. La meilleure réponse à ceux qui ont douté de moi est ce titre de champion remporté haut la main. " Et pourtant l'ESS s'est fait peur et a causé quelques frayeurs à ses supporters durant une première confrontation contre les champions en titre nabeuliens rôdés, expérimentés et habitués aux grandes finales. Jouissant du bonus à l'issue des play-offs, les protégés de Ridha Labidi recevaient les " Potiers " mais sortaient vaincu. Un scénario inattendu, détestable et qui aurait été désespérant pour un autre technicien. Car les nabeuliens étaient à 40 minutes du sacre et jouaient dans leur fief devant un public fou de basket. Pour plusieurs connaisseurs, le tour était joué et le sort des étoilés scellé ! Situation difficile où le mental devient le maître mot et là le coach étoilé transmet sa rage à ses joueurs. Il leur insuffle sa confiance et les fait croire en une victoire sur les Nabeuliens à Nabeul même. Retour triomphal et triomphant à la maison pour la dernière ligne droite, le match de la vérité et l'ultime verdict. Ridha Labidi sut tenir le langage qu'il faut à ses poulains : " Quand le cœur le désire, le corps obéit, leur dira-t-il, nous avons tenu notre promesse, à nous de jouer maintenant ". Pour l'occasion, il transforme le sigle de l'ESS en acronyme : ensemble pour le E, Solides pour le premier S et Solidaires pour le second. Les joueurs sont gonflés à bloc et livrent le match parfait, infligeant une défaite cuisante à leur illustre adversaire, dominant la rencontre et la survolant même. Tout leur réussissait. C'est dans le feu des fumigènes, les cris de jubilation et les larmes de bonheur que se terminaient les débats. Moment d'enchantement indescriptible pour l'ex, nouvellement revenu technicien : " En reprenant ma fonction de vocation et de prédilection, j'ai choisi de commencer la préparation très tôt, entre autres, pour retrouver mes sensations. J'ai tout planifié, tout programmé avec minutie et dans les moindres détails. Force est d'avouer que le jeune âge des joueurs m'a aidé. Ils étaient frais, aimaient les entraînements, y prenaient même plaisir et n'étaient pas du tout blasés. J'ai trouvé à l'étoile une superbe structure propice au travail bien fait et à la réalisation des objectifs tracés. Je sentais qu'il y'avait un coup à jouer connaissant tous nos adversaires pour avoir tout le temps supervisé le championnat. Il suffisait d'être organisé et prêt physiquement. Les miens l'étaient. C'est ce qui a fait la différence ! Nous ne possédons peut être pas les meilleurs individualités du championnat mais le groupe est aussi homogène que complémentaire". Et si c'était Ridha Labidi qui sait mettre à profit le potentiel de ses joueurs et donner leur chance aux jeunes ! Salah Mejri n'en est t'il pas une parfaite preuve ! Ainsi le joueur, de parfait inconnu des parquets devient grâce, à la confiance de son entraîneur et du travail spécifique qu'il effectuait avec lui, le joueur intérieur le plus prisé du championnat. Il est, d'ailleurs, en passe de devenir du haut de ses 2 mètres 16 le pivot numéro un du pays. Makram Ben Romdhane, 20 ans à peine, explose et se forge une personnalité de leader. Amor Mouhli se convertit difficilement mais efficacement en meneur et l'ailier Américain que Labidi choisit de recruter alors que tous les autres clubs se ruaient vers les pivots, éclaboussait le championnat de son brio, sa technique et sa dextérité. " On ne fait pas du neuf avec du vieux, affirme Ridha Labidi, fort d'une expérience de 35 ans dans le domaine. Il faut donner l'occasion aux jeunes talents de montrer leur savoir faire ". Tout ce beau monde dirigé selon une autre devise des plus efficientes du technicien : " Une main de fer dans un Gand de velours ", séduisait l'opinion objective et désintéressée des amoureux de la balle orange et terminait la saison sur un nuage par la plus valeureuse consécration nationale ; le championnat.
Les clefs de la réussite : La modestie et le travail collégial ! La réussite est rarement fortuite et dans la vie on n'a que ce qu'on mérite ! Brillant étudiant à l'INEPS de la grande époque, Ridha Labidi se frayait doucement mais sûrement un chemin parmi les techniciens de renoms. Il gagnait une bourse pour aller faire sa maîtrise à l'une des écoles de la rigueur et du sérieux, celle russe. Mais auparavant, c'est une autre école, non moins réputé dans ce sport de géant au niveau national qui l'a formé, l'a contaminé par le puissant virus incurable, dans son cas, du coaching ; celle Goulettoise. Il y jouera pendant 6 ans et entraînera les jeunes, passage qu'il juge aussi utile que nécessaire: " Celui qui ne s'occupe pas des jeunes ne peut pas savoir la manière dont le produit final se façonne, ce qu'il faut faire pour forger le caractère d'un bon joueur et n'apprends pas à déceler ceux qui ont l'étoffe des grands. J'ai commencé avec les jeunes à l'EOGK et quand j'étais contraint de mettre entre parenthèse ma carrière d'entraîneur, je me suis encore tourné vers les jeunes. L'expérience de la direction technique au CA pendant 5ans était enrichissante parce que je ne faisais pas que du technique mais du social et de l'encadrement. Malgré les moyens limités au CA et les conditions de travail rudimentaires, j'y ai appris la patience, la programmation à long terme et l'évolution du produit que nous avons en main, sa progression. Je remercie pour cela Lotfi Ezehi et Taoufik Zaraâ qui ont constitué un soutien permanent pour moi ". Le retour avec une équipe fanion, (l'ESS), était tout aussi gagnant couronné par le sacre de champion. Une étoile, encore une, vient s'ajouter au firmament déjà bien scintillant du palmarès de Ridha Labidi ; 3 doublés consécutifs en Arabie Saoudite à Ohod Club et une coupe du golf des clubs champions, un doublé avec l'EOGK et un autre avec l'USMo, une coupe aux commandes du CA, idem pour le C.S. des Cheminots seniors et juniors, une médaille d'or au championnat arabe de la police des nations, une médaille de bronze avec les juniors au championnat d'Afrique des nations en Egypte, une médaille d'argent à cette même joute des moins de 22 ans sans compter les clubs qui accédaient, sous sa direction, à la nationale A dont le Tunis air club et El Ain Club des EAU. Néanmoins, l'homme demeure modeste. Comme tous les grands il espère encore apprendre. Jean Gabin l'a compris à l'orée de sa vie et l'a chanté " maintenant, je sais qu'on sait jamais ". Ridha Labidi y croit fermement et travaille à améliorer ses connaissances : " Nous avons toujours quelque chose à apprendre. Le sport est en constante et continuel évolution et il est de notre devoir d'être à jour et de se tenir au courant de tout ce qui concerne notre métier. Nous ne devons pas duper nos employeurs !" clame-t-il avec conviction. D'ailleurs, tout récemment, à l'issue d'une longue et éreintante saison, ce ne sont guère des vacances qu'il s'est octroyé ou constitué, pour lui, une priorité, mais une inscription à un séminaire organisé par l'association des entraîneurs serbes de basket-ball. " The basketball clinic Belgrade ", regroupait des techniciens de renommé qui ont présenté des thèmes au cœur de l'actualité basketballistique. Ainsi les participants eurent droit à des communications extrêmement intéressantes présentées par d'illustres noms du basket mondial ; Dusan Ivkovic, le sélectionneur Serbe, Depu Hernandez celui d'Espagne, Bo Ryan entraîneur de l'équipe national universitaire américaine et deux docteurs spécialisés dans la préparation physique ; Marko Stojanovic et Vladimir Koprivnica. Quand on évoque au technicien étoilé son grand retour, il sourit et riposte : " Je considère que c'est plutôt un nouveau départ. Je suis un compétiteur né. J'adore l'attente fébrile d'avant match, le stress et la pression positifs, les défis et la conquête des titres. L'ingratitude de certains et leur dédain à l'égard du travail que j'ai accompli avec les jeunes du CA m'ont stimulé encore plus et ont constitué autant d'éléments de motivation pour retrouver les terrains ". Nous ajouterons les bancs de touche car Ridha Labidi n'a pas son pareil pour diriger une rencontre. Sa présence élégante et ses réactions tout feu tout flamme ont mis de l'ambiance dans un championnat devenu terne et très peu spectaculaire. De l'ambition et une assurance à revendre pour le Monsieur basket par excellence du pays. L'homme est tout autant apprécié que le technicien pour ses qualités humaines, ses rapports amicaux mais fermes avec ses joueurs, sa sensibilité, son charisme et surtout sa foi indéfectible dans le travail collégial, réfuté par tant d'autres. Il est davantage ému en parlant de la reconnaissance des jeunes joueurs qu'il a encadrés au CA que des titres qu'il a remportés dans sa si longue carrière, entamée depuis 1974. Ridha Labidi ne se laisse pas griser par la notoriété mais est de ceux qui laissent leur empreinte en quittant la scène car la renommée, pour certains, est plus longue que la carrière et que la vie même !