Tony Blair aura beau hausser le ton, cela n'assouplira pas pour autant, du moins dans l'immédiat, la position iranienne. Il pourra, à l'envi, arguer d'une violation des eaux territoires irakiennes - de fait (et non de droit) il pourra le faire puisqu'il est dans son « rôle » d'occupant et, il est donc, « souverain » en terre et mer irakiennes- mais pour le moment les Iraniens ne sont pas près d'écouter un cours portant sur la légalité internationale. Et qui plus est, dit-on à Téhéran, et même dans des milieux politiques modérés, quand ce cours vient de ceux qui, précisément, ont mis à mal la légalité internationale. Il faut toujours un prétexte, un mensonge, une mystification pour déclencher un conflit. Peu importe que les marins britanniques aient été capturés dans les eaux territoriales iraniennes (peu probable parce que personne ne s'y aventurait par les temps qui courent), ou qu'ils l'ait été à l'embouchure de Chatt Al Arab, dans les eaux irakiennes. Dans ces magmas du Golfe, personne n'est vraiment chez lui. Mais l'opération iranienne n'a, a priori, pour but, que l'intimidation, voire une opération punitive à l'endroit de la Grande-Bretagne qui a été intensément active dans le renvoi du dossier iranien devant le Conseil de Sécurité. Il est clair que cette bombe nucléaire iranienne constitue une espèce d'assurance - vie pour le régime de Téhéran, classé « Etat- voyou ». Les Américains et leurs alliés auront resserré l'étau autour des Iraniens, commettant néamoins la bêtise de redonner force au Chiisme irakien qui finira bien par se ranger du côté du chiisme iranien, surtout en cette période où, par milliers, les Sunnites intègrent les branches armées d'Al Qaïda. Il est certainement à exclure que Téhéran garde indéfiniment les otages ou que les Ayatollah décident de les passer en cour martiale. La tactique est on ne peut plus classique : « c'est à notre tour de faire pression sur vous » rétorquerait le gouvernement iranien. C'est stérile et contre - productif ! Et d'ailleurs, ces sanctions économiques se sont avérées pour leur part depuis longtemps infructueuses : les Iraniens ont appris à vivre avec. Le pays est sous embargo depuis l'ère Khomeiny, mais ses atomistes passent le plus clair de leur temps dans les instituts internationaux et voyagent librement de par le monde... Que reste-t-il alors ? Une expédition militaire américaine ? Peu probable, car Bush ne peut pas brandir l'argument du terrorisme pour aller envahir l'Iran, comme il l'a fait pour l'Irak. Et puis les Américains ne marcheront pas. Surtout face au syndrome iranien qui leur rappelle le camouflet d'un Carter couvert de ridicule au moment où il annonçait l'échec de la tentative de libérer les diplomates américains. Le pétrole alors, c'est-à-dire un embargo sur le pétrole iranien alors ? Oui mais là, Moscou et Pékin sont montés au créneau : pas question ! ont-ils répondu... Faut-il pour autant tresser des lauriers sur la tête d'Ahmadinejad ? l'Iran ne sort-il pas un peu trop brusquement de sa réserve ? le radicalisme des Ayatollahs, glorifié par un agitateur comme le président iranien actuel, ne ramène -t-il pas les Iraniens vers les outrances révolutionnaires alors qu'un pas important vers le réformisme, vers l'ouverture sur le monde avait été franchi à l'époque de Khatemi ? L'espoir d'un retour de l'Iran, une puissance et, surtout, une civilisation, n'est pas dans les mesures de rétorsion, ni dans les menaces où même une guerre déclenchée de l'extérieur. Il est en Iran. Dans l'âme d'une jeunesse iranienne qui veut se libérer du joug de ces gardiens d'une révolution moyenageuse qui aspirent à l'émancipation, aux libertés, si ce n'est, carrément à la laïcité. Ce n'est qu'une question de temps.