Les citoyens et les ménages tunisiens ont relevé, dernièrement, avec intérêt, les mesures fiscales à caractère social, prises dans le cadre du budget de l'Etat et de la loi de finances pour 2010. Il s'agit du relèvement des montants à déduire des revenus personnels imposables au titre d'enfants à charge et ce, moins pour leurs incidences financières que pour leur signification. Certains citoyens et commentateurs croient voir dans ces mesures une certaine libération des considérations démographiques trop réductrices ayant guidé les politiques nationales en matière de développement juste après l'indépendance et jusqu'aux années 1990. L'argument de la pression démographique longtemps invoqué pour justifier certaines démarches tient-il encore ? Les décisions signalées consistent à porter de 300 à 600 dinars le montant à déduire des revenus personnels imposables au titre d'enfants poursuivant leurs études dans l'enseignement supérieur et à porter de 750 à 1000 dinars le montant à déduire des revenus personnels imposables au titre d'enfants handicapés. Il a été également décidé, dans le même ordre d'idées, de porter de 2000 à 2500 dinars le plafond d'exonération fiscale pour les travailleurs payés au SMIG et de défalquer des revenus imposables les intérêts des crédits au logement social.
Une requête récurrente Dans le cadre de l'action menée au lendemain de l'indépendance pour limiter et maîtriser la croissance démographique jugée préjudiciable à la réussite de l'effort national de développement, les gouvernements qui se sont succédé en Tunisie, depuis l'indépendance et jusqu'aux années 1990, ont eu recours, entre autres moyens, à la dissuasion financière en maintenant sans changement les allocations familiales à un niveau faible (moins de 10 dinars par enfant), en limitant le nombre des enfants bénéficiaires à deux et en maintenant également sans changement le montant à déduire des revenus personnels imposables au tire d'enfants à charge.
Salaire unique L'amélioration de ces prestations a constitué une requête récurrente qui revient régulièrement dans les débats publics. Récemment, lors d'un point de presse tenu par le ministre des affaires sociales, de la solidarité et des tunisiens à l'étranger, certains journalistes ont évoqué le gel des allocations familiales et la nécessité d'adapter leur montant au nouveau contexte vécu par la Tunisie, 50 ans après l'indépendance. Une revalorisation des allocations familiales au titre du salaire unique a été décidée, il y a plusieurs années, au profit des familles dont l'un des conjoints ne travaille pas, sur la base des faibles montants signalés. A cet égard, des commentateurs notent que les données démographiques, sociales et économiques en Tunisie ont radicalement changé, à telle enseigne que les hommes politiques et les journalistes répugnent à employer, aujourd'hui, dans leurs discours, le terme de ''planning familial'', tandis que l'Office national chargé de ces questions a changé de désignation et s'appelle actuellement '' l'Office national de la famille et de la population '' et il aide, entre autres, à surmonter la stérilité. Le taux de natalité en Tunisie s'approche de celui des pays développés, et comme en Europe, c'est plutôt l'accroissement de la tranche des séniors âgés de plus de 60 ans qui devient le problème démographique en Tunisie. Au même moment, l'activité économique, autrefois assurée par l'Etat, au nom de la collectivité nationale, a été libéralisée et cédée au secteur privé et aux particuliers. Tous les étudiants tunisiens étaient, autrefois, boursiers, tandis qu'aujourd'hui, le nombre des étudiants tunisiens boursiers représente une petite part, de sorte que ce sont les parents qui supportent actuellement les dépenses inhérentes aux études de leurs enfants dans les divers cycles de l'enseignement. Ces dépenses ont augmenté considérablement, en raison de la cherté de la vie et de l'accroissement et de la diversification des besoins.
Cohésion sociale Outre les dépenses occasionnées par les études, beaucoup de parents tunisiens continuent de subvenir aux besoins de leurs enfants majeurs et diplômés qui n'ont pas encore un emploi ou une source de revenus propre, et ne bénéficient pas non plus, pour cette même raison, de couverture sociale, n'étant ni enfants légalement à charge, ni travailleurs affiliés aux caisses sociales. La détente démographique au niveau de la natalité peut être, ainsi, une occasion pour procéder à des améliorations qualitatives de la couverture sociale, en mettant à profit la fiscalité et les divers autres moyens d'intervention. D'autant que sur le plan quantitatif, la Tunisie a réalisé déjà un taux de couverture sociale dépassant 90%, avec pour objectif la réalisation de la couverture universelle dans les quelques années à venir. De nombreuses mesures et incitations fiscales ont été prises en faveur des entreprises, des investisseurs et du monde des affaires, en général, dans le cadre du budget de l'Etat et de la loi de finances pour 2010 et elles viennent enrichir et renforcer d'anciens avantages et encouragement de toutes sortes institué au profit des promoteurs. L'une des constantes de la politique du gouvernement, sans cesse affirmée et réaffirmée, est la corrélation entre la dimension économique et la dimension sociale, de manière à garantir la cohésion et la stabilité sociales qui restent les principaux atouts de la Tunisie, face aux incertitudes du contexte mondial.