De l'ouverture envers la Chine, l'Occident escomptait mettre sous sa coupe un marché de plus d'un million d'hommes. Un calcul qui s'avère faux, tant ce pays a su retourner la situation pour devenir maître du jeu. Dans les chancelleries occidentales on a toujours regardé d'un œil rêveur l'empire du milieu avec l'espoir qu'un jour il franchisse le pas et sorte de son isolement surtout sur le plan économique. L'esprit mercantile d'un Occident conquérant et sûr de ses capacités d'imposer ses vues était le facteur principal présidant à cet espoir. Avec une population dépassant le milliard d'hommes, la Chine ne pouvait être que cet espace vital tant convoité par les Européens, les Américains du Nord et les Japonais. Avec la globalisation, la Chine qui avait opté graduellement pour une économie de marché était bien partie pour profiter de la brèche ouverte. Mais avec sa propre vision et non celle de ses futurs partenaires. Très en retard sur le plan technologique, les Chinois ont misé dès le départ sur le transfert des technologies de pointe en provenance des puissances industrialisées. C'était la ruée vers l'or pour les entreprises occidentales d'autant que la main-d'œuvre à bon marché sur place est ce qu'il y avait de plus alléchant. L'idée initiale de profiter du grand marché que représente le pays est déjà viciée avec la mise en place d'un tissu industriel aussi varié que performant. Du stade artisanal, l'empire du milieu passe au stade industriel avec une croissance de deux chiffres. Importer de la technologie pour rendre performante son industrie et exporter le maximum de produits est l'équation réussie par les pouvoirs à Pékin et à laquelle les Occidentaux n'ont pas prêté la moindre attention pour se retrouver au bout du compte pris à leur propre piège. Mais il est trop tard pour faire machine arrière d'autant que Pékin avec son matelas de devises est devenu le premier argentier de la planète. Cette tendance s'est davantage accentuée avec la conjoncture qui prévaut actuellement dans les pays industrialisés confrontés aux effets de la crise économique qui sévit depuis 2008. Partenaire incontournable auquel on fait les yeux doux pour espérer puiser dans ses caisses, la Chine n'hésite pas à monnayer son nouveau statut dans le concert des nations.
Position de force Les temps ont changé et Pékin ne manque aucune occasion pour le faire savoir haut et fort faisant valoir ses différences et affichant parfois ostensiblement ses ambitions. Longtemps à la traîne, la Chine est aujourd'hui à quelques encablures de supplanter le Japon en tant que seconde puissance économique mondiale derrière les Etats-Unis. Toute cette métamorphose résulte du pragmatisme de ses dirigeants qui ont su maintenir la distance entre le dirigisme politique et le libéralisme économique. Profitant des opportunités que lui offre ce dernier, les Chinois ont su faire jeu égal avec les chantres de l'économie du marché pour souvent leur emboîter le pas et les surclasser. Ils sont partout, leurs produits envahissent tous les coins du monde et ils pèsent lourdement sur les tendances du marché des matières premières, avec une présence parfois arrogante là où ils flairent des intérêts à tirer. Bref, la Chine est aujourd'hui aux commandes alors que Washington ne peut plus prétendre au leadership qui a toujours été le sien depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, du moins sur le plan économique. Une position de plus en plus prépondérante, qui suscite appréhension et inquiétude, d'autant que Pékin cherche militairement à avoir sa place parmi les plus grandes puissances. On ne lésine plus sur les moyens pour bâtir une armée dotée des armes les plus sophistiquées. Une ambition vue d'un œil réprobateur de la part des Occidentaux qui scrutent de près l'évolution que connaît le pays dans ce domaine. Le défilé militaire à l'occasion de 50ème anniversaire de la République de Chine a fait couler beaucoup d'encre et susciter autant d'interrogations quant aux vrais mobiles d'une telle puissance militaire. Interrogations renforcées par la révélation récente d'un tunnel de 5000 km percé dans les montagnes chinoises pour y abriter les armes nucléaires. En dépit de rapports de coopération de plus en plus renforcés dans le domaine économique une certaine suspicion demeure visible du côté des puissances occidentales qui ne s'en cachent plus, montrant leur initiation devant chacune des démonstrations de force de Pékin. Mais il est peut être trop tard pour freiner cet élan d'un pays qui a su mettre à profit l'ouverture de ses frontières. Alors que dans le camp d'en face, l'on sait sans doute regretter d'avoir été trop loin avec l'empire du milieu qu'on a assurément sous estimé ses capacités d'adaptation pour retourner la situation en sa faveur pour devenir le principal maître du jeu et le partenaire don on ne peut se passer.