« Nos émotions connaissent trop de conflits d'intérêts pour que la vie nous paraisse pleinement acceptable et peut-être est-ce alors le rôle du narrateur que de redistribuer les éléments pour la rendre telle » de William Maxwell. Souvent lorsqu'on évoque la littérature, on associe le terme à la rêverie, à l'escapade ou tout simplement au rêve. En ceci, la littérature est le domaine de tous les possibles. Des vies s'y brisent, s'y célèbrent, s'y interrompent d'une façon héroïque ou vile. Des destinées s'y croisent, d'autres s'y transforment. Souvent la littérature devient ce champ où l'on s'identifie à tel ou tel personnage. On vit, le temps d'une lecture, ses aventures, ses péripéties, ses joies et ses déboires. On se laisse entraîner par les événements endossant ainsi le costume du héros. C'est de cette manière que nous plonge l'auteur dans sa réinvention du monde. On adopte sa vision et on se laisse happer par son style. Sa perception de la vie suscite en nous les sentiments les plus contradictoires nous faisant accepter ou nous incitant à reconsidérer notre propre vie. Notre existence se trouve alors mise à nu et ce que nous reléguions au fond de nous, nous paraît soudain si évident. Faire face à nos propres craintes par et à travers les mots d'autrui nous permettrait d'accepter – du moins aborder – ce qui nous tracasse. Prophète, l'auteur transcende l'âme et l'esprit humains afin de redonner goût à la vie. Nos littératures regorgent de destins et de destinées émanant du réel et pourtant réinventant la réalité. Si la vie paraît insupportable et cruelle, les mots l'apaisent et la rendent, non pas meilleure, mais tolérable. Il faudrait alors suivre les pas de l'auteur et adopter sa vision de la vie : celle qui échafaude les romans, inculque au lecteur qu'il fait bon vivre et que rien ne vaut la vie qu'on réinvente à la naissance de chaque jour, au détour de chaque page de notre existence…