Des notes folles virevoltaient. Des improvisations et compositions soigneusement fignolées. Le charme, voire la magie de cette soirée organisée par l'ambassade d'Allemagne et le Goethe-Institut en coopération avec la Maison de la Culture Ibn-Rachiq, revient surtout aux interprétations magistrales des musiciens présents, Frank Muschalle et Axel Zwingenberger. Le décor rudimentaire, avec deux pianos d'époque plantés au milieu de la scène. Deux musiciens qui n'ont eu aucune peine à enflammer l'ambiance en tapotant à une vitesse époustouflante les touches de leur piano. Il n'en fallait pas plus, si se n'est une maestria à embarquer le public à travers une musique, née il y a plus d'un siècle, et à travers un style qui vivifie toute une mémoire, met au goût de l'instant autant de pionniers de cette musique, qui est sans conteste la forme la plus nostalgique du blues. Plus que de la nostalgie, c'était surtout une ambiance typique qui oscillait entre mélodie et rythme effréné. Le style "Boogie-Woogie" se caractérise par un jeu du pianiste, où il est possible d'extraire divers composants, qui tous, évoquent le rôle dévolu à certains instruments au sein d'un orchestre de Jazz. C'est ainsi que l'on peut identifier facilement: un aspect batterie: par la régularité et le dynamisme rythmique avec lesquels la partie de main gauche est exécutée; un aspect contrebasse: par les notes choisies pour les figures de base ; un aspect instrument mélodique : par la main droite qui brode sur fond rythmique et harmonique mouvant, la mélodie ou le contre-chant. Le premier pianiste qui a alimenté la soirée était Frank Muschalle. De nature particulièrement joviale et communicante. Les premiers morceaux composés ont d'emblée planté l'ambiance et l'artiste affirme jouer sur des rythmes spontanés qui traduisaient un état d'esprit, une atmosphère créatrice et une aisance à communiquer ses jubilations musicales. Il faut dire que ce musicien s'est présenté sur scène avec des célébrités du blues et du jazz comme Red Holloway, Carey Bell, Jimmy Mc Cracklin, Charly Antolini…son partenaire, sur scène est connu comme une icône vivante du Boogie-Woogie. Axel Zwingenberger a donné depuis plus de trente ans de carrière musicale, plus de 4000 concerts. Ses performances artistiques, il les a aussi partagées avec des artistes illustres tels que Lionel Hampton, Jay Mc Shann, Big Joe Turner, Loyd Glen…et bien d'autres. Répartie en deux temps, la soirée a atteint son comble avec un finish en duo. Au-delà des qualités artistiques indéniables et des personnalités attirantes des deux pianistes, c'est toute cette charge suggestive, cette évocation parlante que la musique a su recréer qu'il convient de retenir. Saisir par le truchement d'une note, d'une rythmique, des pans d'une époque, des portraits de personnages d'antan, des détails, comme celui du train à vapeur, qui était génial de visualiser, de ressentir à travers cette musique, qui par son rythme et sa mélodique intense dégage un Swing inimitable.