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Des martyrs sont tombés, des martyrs sont nés
Brûlures de Tunisie
Publié dans Le Temps le 27 - 01 - 2011

Si la pauvreté et l'injustice étaient des hommes, je les aurais étranglés.
Si la Tunisie était une mère, le peuple tunisien l'aurait vénérée amplement.
Oui mais ; Leïla l'ouvrière occasionnelle, les jeunes sans emplois et l'armée, dans tout ça ?
Avant et après La Révolution, chronique d'une scène réelle, réflexions :
Dans l'air de ces temps hivernaux difficiles et de retour d'une promenade en famille à Jebel Ichkel, site zoologique magnifique mais pas bien entretenu; un arrêt improvisé s'est fixé au bord de la route pour acheter des légumes exposées.
Dans le champ avoisinant, un groupe de femmes étaient attelées à travailler la terre. Une femme s'est détachée du groupe pour nous fournir des légumes. La femme ouvrière chaussait des bottes tachées de boue, elle était toute enveloppée afin de se protéger du vent glacial et de la pluie, elle avait les mains rouges violets presque inertes de froid.
Vu la scène, la curiosité de l'instant m'incita à engager une conversation. La voici :
- Bonjour, vous travaillez ici ?
- Oui ! Je suis ouvrière occasionnelle.
- Vous travaillez combien d'heures par jour et combien vous êtes payés ?
- 10 heures, 5 dinars par jour.
Le fiston, écoutant la conversation, sursauta ; il vient de manger une pizza à 5 dinars, il a faillit la vomir.
Devant cette scène et ces affirmations, toute la famille a sauté en dehors de la voiture. C'est indécent de rester dans ce relatif confort vu cette situation.
A peine sortis de la voiture, les enfants tremblaient déjà de froid et de pitié.
La conversation s'est bloquée et j'ai du mal à la reprendre. J'essaye :
- Il fait très froid, il est 17h passée et presque nuit ; pourquoi vous travaillez encore ?
- J'ai trois petits enfants à charge et mon mari est décédé. Je dois travailler. Je n'ai même pas le droit de tomber malade.
Leïla l'ouvrière voulait couper court à cette conversation. Elle ne veut pas de pitié et elle veut retourner travailler la terre.
Beaucoup de questionnements et d'étonnements fusent. La réalité crue, la dureté de la vie et la survie humaine, plein dans les visages. Les enfants commencèrent à m'interpeller. J'étais gêné, je n'avais pas de réponse convaincante.
Leila est restée silencieuse et au moment de repartir au champ, le fiston lui proposa un biscuit. C'est juste par politesse si elle l'a accepté. Elle ne la pas mangé. Les biscuits ce n'est pas son souci. Encore moins, le saumon et le caviar ; elle ne connait même pas et ça ne l'intéresse pas ; son problème c'est le pain quotidien. Au fait, avons-nous besoin de caviar pour vivre humblement ? La réponse est non !
La discussion commence à bien durer, surtout que le pseudo patron regardait la scène de loin et il n'a pas l'air d'apprécier cette perte de temps au détriment du travail.
J'avais envie de l'interpeller et de lui rappeler que le temps des misérables de Victor Hugo est révolu.
Lui ; il m'aurait répondu que nous autres soi-disant intellectuels, on a que les paroles, et que les patrons travaillent et ils font vivre des familles.
Aurait-il raison de me répondre ainsi ?
Oui en partie, mais pas sur l'essentiel social. Patron oui, il en faut pour la dynamique économique mais un minimum de cœur et d'éthique. Qui n'a pas de cœur, n'a pas d'âme.
Heureusement, que je n'ai pas engagé une conversation avec ce pseudo patron. Il m'aurait répondu ainsi, je l'aurais étranglé, lui et ses semblables. Il ne faut pas profiter de situation et cracher dans la soupe ; un peu de reconnaissance tout de même, à ce pays qui a tant donné. On est dans un état de droit jusqu'à nouvel ordre et le code de travail fait autorité. C'est son application intelligente qui pose problème.
Le travail de la terre ne dérange pas Leïla, au contraire ; elle apprécie le labeur et la sueur du front. C'est sa situation précaire qui la préoccupe ; la pension journalière est dérisoire, non équitable et les conditions de travail sont pénibles.
D'autant plus que, non loin de ce lieu, une exploitation agricole dans la même activité est exemplaire. Conditions de travail, pension et couverture sociale ; produits de qualités, certifiés à l'exportation. Deux cas similaires d'activité agricole et économique mais deux poids et deux mesures.
Peut-on accepter ces disparités ? La réponse est non !
En reprenant le volant, toute la famille avait les larmes aux yeux. Je ne sais pas, si c'est à cause du froid ou à cause de la situation de Leïla ? Certainement les deux.
Dans la voiture ça bouillonnaient de questions, de lamentations et de contestations. Les enfants commencèrent à m'interpeller sérieusement.
Le fiston me rappelle que c'est contradictoire avec l'éducation civique et religieuse reçues concernant la solidarité et le soutient des nécessiteux.
Pour changer de sujet en plaisantant, bien qu'il n'y avait pas lieu de plaisanterie ; j'ai proposé d'épouser Leïla l'ouvrière en adoptant ses enfants. Mon épouse s'est opposée catégoriquement à cette idée anecdotique de sens figuré. Pas question ! On ne touche pas aux intérêts personnels. Il ya des limites à la solidarité.
« De toute façon c'est interdit par la loi et elle est beaucoup plus jeune que toi ! », m'a-t-elle répondue sèchement. Décidemment, dès que l'on touche aux acquis personnels, les réticences surgissent, venant même des plus proches !
Ainsi, le fiston d'à peine 13 ans s'est porté volontaire à cette idée de mariage fictif ! Sans préjugé, sans limite d'âge, sans complexe. La vérité sort de la bouche des enfants. Et souvent, leurs idées, leurs visions constituent un rappel et une remise à l'ordre dans ce monde de compétitivité, de rentabilité et de performance démesurée. On y perd souvent son âme. On devrait, mieux écouter les enfants et les jeunes ; c'est eux, les premiers concernés par l'armada des décisions. C'est eux, qui donnent une âme à la vie. D'ailleurs, c'est l'avenir et c'est notre raison d'être.
Revenons à Leïla et aux péripéties de cette journée.
Ce soir là et après le retour, personne n'a pu diner. Les gorges étaient serrées et la mélancolie s'est installée. On pensait tous à Leïla, elle était dans nos esprits.
Il est 20h passée ; en ce moment, Leïla dort avec ses enfants. Fatiguée, épuisée, toutefois réchauffée. Ses enfants lui réchauffent le cœur, elle en a bien besoin ; demain, un autre jour l'attend, un jour de travail et de labeur. Elle doit se reposer pour se ressourcer. Leïla n'a pas le droit de veiller, sauf parfois, pour pleurer toute seule la nuit, tellement la vie est pénible pour elle.
Le droit ! Quel droit ?
Finalement, Leïla n'a droit à rien, juste le droit de survivre.
Et les droits de l'homme et du travail dans tout ça ?
Oui, je suis gêné. Oui, je suis en colère. Mais toujours serein et de comportement civique.
On ne peut pas rester insensible à la situation de Leïla l'ouvrière et de ses semblables de part leurs appartenance et leur attachement au peuple national de souche, comme nous tous d'ailleurs.
D'autant plus, qu'il est constaté au niveau national des indicateurs socio-économiques encourageants et attestés par des instances internationales.
Donc ; qui peut le plus, peut le moins.
Plus de planification cohérente et surtout beaucoup de bon sens à l'évidence, dans le choix des model de sociétés :
L'ultra libéralisme ou le dirigisme autoritaire ?
Ni l'un, ni l'autre !
Ni l'ultra libéralisme et les lois du marché, du prix Nobel d'économie Friedman et à moindre mesure de l'éminent économiste Taylor. Ni le tout état et le dirigisme, de Staline et à moindre mesure du considéré économiste Keynes.
La crise mondiale actuelle, illustre bien l'échec de ces deux model poussés à l'extrême.
Un état régulateur et modérateur. Juste le milieu, un model purement tunisien pour les tunisiens.
La social-démocratie est une école de référence préconisée. Comme le libéralisme économique et sa régulation, c'est un model dynamique d'inspiration.
L'idéal, c'est de consoler ces deux model de sociétés. Les nations modernes et futuristes vont dans ce sens.
Oui mais, Leïla l'ouvrière dans tout ça ? Elle veut du concret.
Alors, laissons Leïla dormir en paix avec ses enfants. Elle n'aime pas trop le bruit et la démagogie.
De grâce ne la décevons pas. L'histoire ne nous le pardonnera pas.
Ainsi, comme promis, elle accueillera rayonnante le printemps, après ce rude hiver.
Une semaine après la journée de rencontre avec Leïla la laborieuse, les contestations légitimes régionales ont commencés et la révolution eu lieu avec ses Martyrs.
La révolution est déclenchée avec des brulures terrifiantes et le feu nourrit. Il n'ya que le désespoir noir, sans issue, qui mène à la négation de soit même et aux brulures.
Mes pensées vont à tous ceux qui ont sacrifiés leurs vies pour le salut des autres. A tous les Martyrs de notre pays, égaux les uns aux autres, représentants la fierté et l'identité patriotique de notre nation montante.
Oui, à tous ceux qui sont tombés pour la Tunisie; à tous ceux qui ont donné leurs sangs chauds ; en récitant des versets coraniques tout en agonisant en silence, avec douleurs et sans larmes. Comme ravis, ainsi, de monter aux cieux.
Quel héroïsme et quel courage !
Dans notre pays, les fondamentaux sont intacts. C'est plus fort que nous, c'est dans notre sang. Exactement le même que celui qui a coulé. Le sang de la Tunisie, sans distinction, sans exception.
Cette révolution est une révolution jeune et une leçon pour les adultes qui croyaient détenir la vérité.
Peut-on tolérer qu'un responsable régional ou central digne de ce nom, exerce ses fonctions sans conscience professionnelle, sans scrupules et sans dévouement ? La réponse est non !
Analysons, faisons notre auto critique et corrigeons. Les nations avancent en se corrigeant.
Cette exceptionnelle révolution est épistémologique, scientifique, numérique pour reprendre la juste description de l'éminent économiste Chedly Ayari… Bref ; actuelle, unique et jeune.
Elle est la bienvenue cette révolution. On ne peut pas avoir mieux. C'est un passage obligé pour notre jeune nation, cultivée et montante. Finalement, ce sont nos enfants qui nous forcent la main.
Ne ratons pas l'après révolution, évitons les récupérations et le trop jeux politiques.
Relançons l'activité la tête haute et persévérons.
L'intérêt de la nation prime à tout.
Et l'Armée nationale dans tout ça ?
Armée républicaine.
Ce haut corps républicain protecteur, observateur averti et anticipant.
Au culminant des brulures, l'armée a été sollicitée afin de dépasser l'entendement. Elle a choisie son partie ; la nation, rien que la nation ; c'est sa vocation et sa mission.
Les hauts commis militaires, les soldats de l'ombre et les soldats du ciel ont effectué une démonstration de maîtres. Discrétion, efficacité, conviction et loyauté ; nos hommes politiques devraient s'y inspirer.
Du coup, deux armées se sont constituées : La conventionnelle et la populaire. Une symbiose à connotation céleste qui défend une cause noble terrestre. Dans ces conditions la nation devient invincible. C'est céleste.
Oui, je suis fier de notre armée, tout corps confondue.
Oui, je suis en confiance d'un état garant pour améliorer la situation de Leïla l'ouvrière, l'emploi des jeunes, la répartition des richesses nationales, la justice sociale et le bien être de tout Tunisien. Le bien être de tout tunisien dont notamment le corps des armées, méritoire de reconnaissance à juste titre. Il est temps.
Ce haut corps fier et humble, qui accomplit son devoir et ne revendique rien ; c'est à son honneur et à sa considération.
A ce propos, la citation qui suit nous interpelle. Citation émanant de l'homme d'état
George Washington et reprise par le général De Gaule :
Temps modernes, Etat moderne, Armée moderne et comblée.
Moralité de l'histoire :
La révolution libre et jeune est un fait historique national indéniable.
Alors de grâce, soyons à la hauteur de cette révolution. Révolution unique dans son genre par son originalité actuelle et historique.
Qui dit mieux ?
Dr. CHERIF Med Raouf.
Universitaire, Menzel Bourguiba.
Menzel Bourguiba, nommée antérieurement Ferry ville.
Ville martyre de lutte pour l'indépendance.
Ville de travail, de labeur et de sueur.


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