Lotfi OUENNICHE - Un malaise s'empare des Tunisiens : La joie et la confiance, censées accompagner la glorieuse Révolution populaire et être sa principale caractéristique, cèdent lentement la place à une angoisse lancinante et à une attente fébrile. A vrai dire, plusieurs signes inquiétants caractérisent cette étape post-révolutionnaire et suscitent des interrogations quant à l'avenir du pays, l'avenir de la Révolution et la réalisation de ses nobles objectifs. Car les jeunes qui se sont soulevés contre la tyrannie et dont des dizaines sont tombés sous les balles de la dictature, étaient imbus d'aspirations grandioses pour la patrie et pour son peuple. La chute du régime n'était ni leur seule préoccupation, ni leur ultime objectif. Ils étaient décidés à faire triompher les idéaux de la démocratie, de la liberté et de la justice, à restaurer une fierté bafouée et à réconcilier le peuple avec les principes de la concorde et de la convivialité. Ce qui est en train de se passer en cette phase transitoire, mais cruciale de l'histoire du pays, dénote une déviation du chemin que les martyrs ont tracé avec leur sang. Par fidélité à leur mémoire, l'urgence aujourd'hui est que chacun assume son entière responsabilité pour que la Révolution reste à jamais le symbole de la libération du joug de l'asservissement et aussi l'entrée de plain-pied dans l'ère du développement, de la prospérité et du partage équitable des richesses nationales.