Match EST vs CA : où regarder le derby tunisien du dimanche 09 novembre 2025?    La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Nouvelles directives de Washington : votre état de santé pourrait vous priver du visa américain    Enseignement en Tunisie: une seule séance?    Kais Saied charge l'ingénieur Ali Ben Hammoud de trouver des solutions à la crise environnementale de Gabès    Le moringa: Un arbre parfait pour la nutrition, la santé et l'environnement    Météo : fortes pluies et vents puissants attendus sur plusieurs régions    Ras Jedir : près de 1,5 million de dinars en devises saisis dans une tentative de contrebande    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Budget économique 2026: Cinq grands choix nationaux    Louis Schweitzer, ancien PDG de Renault, est mort à 83 ans    Les hormones: ces messagères invisibles qui orientent nos jugements intellectuels à notre insu    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    L'Université de la Manouba organise la 12è édition du symposium interdisciplinaire "Nature/Culture"    Qui est Ghazala Hashmi, la musulmane qui défie l'Amérique ?    216 Capital investit dans Deplike : la startup à l'origine de l'app Chordie AI ou le Duolingo pour guitare    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    Météo en Tunisie : pluies éparses, températures en baisse    Slaheddine Belaïd : Comment faire oublier Bourguiba    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Derby de la capitale : l'Espérance exige des arbitres étrangers pour éviter la polémique    Networking Event – Green Forward : Promouvoir une économie vert et circulaire en Méditerranée    L'innovation durable d'Epson au service de la région META-CWA    Avec Kia, roulez plus, dépensez moins    Météo en Tunisie : ciel nuageux, pluies attendues fin de journée au nord    Syrine Chaalala et Mohamed Gastli propulsent la Tunisie au cœur de la révolution des protéines d'insecte    Hafida Ben Rejeb Latta: Une fille de Kairouan    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Le Prix Goncourt 2025 remporté par Laurent Mauvignier pour son roman La Maison vide    Je n'étais plus la Ministre du Bonheur'' : la confession bouleversante d'Ons Jabeur''    Les billets du Derby désormais disponibles au Guichet    La plus grande centrale solaire photovoltaïque de Tunisie bientôt opérationnelle à Sbikha    La Tunisie prépare une réduction du nombre d'établissements publics pour plus d'efficacité    Voyager en Tunisie, trésors archéologiques et douceur de vivre : un héritage fascinant à découvrir selon GEO    Zohran Mamdani crée la surprise et s'empare de la mairie de New York    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Taekwondo : la Tunisie s'impose parmi les quatre meilleures nations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    Le "Djerba Music Land" en lice pour les Heavent Festival Awards 2025: Une reconnaissance internationale pour le festival emblématique de l'île des rêves    Match Espérance de Tunis vs Club Bizertin : où regarder le match de la ligue 1 tunisienne du 30 octobre    Kharjet Sidi Ali Azzouz : bientôt inscrite au patrimoine culturel immatériel    Ciné Jamil El Menzah 6 ferme définitivement ses portes    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Sommes-nous racistes ?
Récurrences
Publié dans Le Temps le 01 - 06 - 2011

Durant plus de deux décennies, nous avons été opprimés, réduits au silence, humiliés dans plusieurs aspects de notre vie ; nous n'avions pas le droit de nous exprimer, notre religion était placardée, même notre façon de s'habiller était contrôlée. Nous rêvions d'un jour où nous passerions du statut de sujet à celui de citoyen. Nous espérions qu'un jour viendra où nous serions délivrés de l'injustice dont nous ne pouvions en parler, soit car elle était commise de la part de personnes « hautement placées » ou soit que nous n'osions pas la dénoncer de peur « d'entacher » l'image de la Tunisie.
Plus que les Tunisiens eux-mêmes, l'Etat « se souciait » de son image. Plus que les Tunisiens eux-mêmes, l'Etat « se souciait » du regard que porteraient les Etrangers sur nous.
Aujourd'hui, les jeunes ont fait cette révolution de la dignité et de la fierté. Nous avons réalisé un pas de géant vers la liberté d'expression et les droits fondamentaux. Or, cette fierté, ce respect, cette dignité, deviennent sujet à équation pour une grande majorité de la population tunisienne. La société tunisienne, jadis ouverte et tolérante, sombre peu à peu, sans que l'on se rende compte dans le racisme à la faveur de la loi du silence qui nous était imposée, si ça continue, cela nous empêchera d'être le premier exemple arabe d'Etat de droit auquel nous rêvons.
Une remise en question s'impose et soucieux que nous sommes d'une Tunisie saine, plus ce que d'une image brillante de la Tunisie, nous mettons au grand jour ce sujet.
L'Etat de droit ne se construit pas uniquement dans les coulisses de la politique mais en se basant sur une société croyant en ces droits, et surtout dans l'universalité de ces valeurs. Ne croyons pas que le racisme s'est déclenché après la fuite de l'ancien président et que par le passé, il n'existait pas. Détrompons-nous, il existait, mais il était déguisé grâce à des maquillages sophistiqués.
Il est clair également que la Tunisie ne sera jamais la cité idéale de Platon, aucun pays ne le sera d'ailleurs et il n'existe point de société 0% racisme. Seulement, compter une minorité raciste, et surtout savoir ravaler son racisme, le ménager afin de s'auto imposer le respect de l'autre, même s'il « ne nous plaît pas » est essentiel…
Personne n'est assez bien
Pour commencer, nous ne sommes pas une société homogène. Le régionalisme a toujours déchiré la Tunisie. Chaque région se targue d'avoir les meilleures qualités pour en attribuer les pires aux autres. Cela va même jusqu'à refuser le mariage d'une personne pour son appartenance à une région, ou même le recrutement qui se base sur la région de laquelle est natif le candidat, sans compter, les blagues, les taquineries et la méchanceté parfois qu'on exprime à l'égard de l'autre. Sortons du contexte de la Tunisie, les citoyens des autres pays arabes, ont quant à eux des sobriquets péjoratifs bien précis pour nous. Ils sont ou bêtes, ou sales, ou non civilisés, ou malhonnêtes, ou alors dépourvus de fierté (…).
Les Européens et les Américains sont épargnés bien évidemment, quand bien même on leur reproche « leur racisme et leur manque d'égard envers nous ». Drôle de logique qui fait que nous imposons aux autres ce que nous nous tolérons à nous mêmes…
« Le noir, le singe qui dérange »
Mme Saadia Mosbah témoigne d'une expérience douloureuse vécue par elle. Dans l'un des quartiers les plus chics de la Tunisie – prétendant culture, intellectualisme, bonnes manières et se disant comme supérieurs à d'autres quartiers et régions – Mme Mosbah doit traverser une foule de collégiens déchaînés et applaudissant pour accéder à un salon d'esthétique tenu par des africaines. L'une des filles qui y travaillent l'invite à entrer en vitesse de peur que le salon ne soit envahi par les collégiens. Ainsi, ils n'hésiteraient pas à s'y engouffrer et à y créer le désordre. D'ailleurs et comme elle le dit elle-même « Plus d'un gamin vient se soulager devant la porte du salon et la poubelle à l'extérieur devient un jeu de ballon ». Deux collégiennes ont quand même eu l'audace de demander à entrer, soi-disant pour se faire tresser les cheveux, la vérité est qu'elles voulaient se moquer des dames du salon. Dehors, les collégiens tentaient carrément de défoncer la porte. Se rendant au poste de la police, on la prit à la légère. Il a fallu attendre longtemps pour que deux agents arrivent et convoquent les deux demoiselles qui furent renvoyées chez elles, avec la promesse de ne pas « prévenir les parents » et les autres collégiens ont été simplement priés de déguerpir. Le pire dans l'histoire c'est que la maman de l'une des demoiselles est venue elle-même se venger de ce qu'on « a fait subir à sa fille ». Elle prétendait « qu'elle était chez elle et qu'il n'y avait pas de place pour les noirs »... « Tous dehors sales singes...Rentrez chez vous on ne veut pas de vous ici… » Hurlait-elle sans que personne ne bronche !
Prétendre à un cas isolé serait mentir ou se voiler la face. La majorité des Africains faisant leurs études ici ont été au moins une fois victimes d'un racisme direct, sans compter les personnes croyant qu'elles ne comprenaient pas l'arabe et qui se laissaient aller à des commentaires déplacés et des moqueries à l'encontre des noirs. Entre la méchanceté du racisme direct et « l'innocence » d'une envie de s'amuser aux dépens d'autrui, profitant de leur méconnaissance de la langue arabe, les noirs chez nous, sont forcément ces singes venus du fond de l'Afrique, sentant mauvais et oubliant de se laver… La couleur noire chez beaucoup de Tunisiens est aussi un caractère identitaire stigmatisant… Compliqué, si l'ont veut comprendre si le Tunisien – blanc, brun, ou jaune – en veut à la couleur noire ou à la nationalité des pays du centre et du sud de l'Afrique.
« Les juifs qui sentent mauvais »
La communauté juive tunisienne fut elle aussi longtemps réduite au silence malgré les déclarations et les fausses effusions sentimentales, ne voulant pas quitter la Tunisie comme l'ont fait presque un million de juifs arabes ayant été obligés de fuir leur pays natal, ils ont dû accepter de se taire pour ne pas ternir l'image de la Tunisie contre cette protection policière, qui est aussi surveillance, qui leur a été accordée par l'ancien président.
« A l'école, j'ai toujours été frappé par « les jeunes de mon quartier » simplement parce que je suis juif, j'étais gosse, je ne comprenais pas pourquoi tant de violences à mon égard »… Nous témoigne L. S un jeune de 30 ans. Outre le racisme direct qu'il a subi, il a dû passer sa vie en faisant semblant de ne pas entendre les vexations indirectes de racisme qui échouaient dans ses oreilles de la part de Tunisiens ne connaissant pas sa confession. Il a dû faire avec : « des Juifs que Dieu t'en préserve », « un chien de juif », « un sale juif ». Lui, ses amis, sa communauté ont dû subir cela des centaines de fois dans leur vie et essayé de faire semblant de n'avoir rien entendu. Aujourd'hui eux aussi ils parlent d'un racisme existant depuis l'ère Ben Ali, explosant aujourd'hui.
Avishaï Hattab est un jeune de 19 ans, l'été dernier il était dans un taxi à Hammamet, quand le chauffeur voyant quelques personnes juives – reconnues à la Kippa – lui lança, « tu vois ces juifs, que Dieu t'en préserve – se balader chez nous, qu'ils aillent chez eux ! », Avishaï n'a pas pu s'empêcher de lui dire que Dieu ne peut l'en préserver puisqu'il en est un et qu'ils n'iront nulle part d'autre car la Tunisie est leur pays. Le chauffeur s'est alors énervé demandant à H. pourquoi n'avait-il pas embrassé l'Islam et pourquoi ne rentre-t-il pas chez lui. Inutile d'essayer de le convaincre que chez lui, c'est la Tunisie.
Quant à Y. un autre jeune de confession juive, il s'est même fait attaquer physiquement quand un mec bourré dans une boîte s'est rendu compte qu'il était juif. Lors du mois de mai et avec l'annulation du pèlerinage de la Ghriba nous avons eu l'occasion de constater ce racisme effarant. Là où il y a l'information relative à la Ghriba, l'on peut lire des « juifs, cochons, juif qui pue, juif descendant du singe… » dans des centaines de commentaires.
Nous voulons bien croire que cet antisémitisme est la conséquence de la crise au Moyen-Orient, mais ce que l'on lit ou entend, n'a rien à voir avec un différend politique ou une lutte pour une cause. Les termes utilisés, dépourvus d'argumentation, de recherche de solution et de volonté réelle de participer à résoudre la crise – si vraiment ils pouvaient le faire, or ils sont ici à des milliers de kilomètres – ces termes sont des insultes pures et simples, crachant la haine et le racisme.
Si vraiment les Tunisiens pouvaient résoudre le problème Moyen-Oriental, ce n'est surtout pas en s'en prenant à des concitoyens de confession juive ou alors aux juifs tout court qu'ils le feront.
« La vérité est »
La vérité est que beaucoup de Tunisiens croient dur comme fer que les noirs et les juifs, « puent » qu'ils « sont moches », qu'ils n'ont pas de valeurs ni d'éthiques. Qu'ils sont « des arnaqueurs » et « des libertins »…
Cela est honteux de constater à quel point beaucoup de Tunisiens excellent dans l'art des insultes racistes et a-t-on aussi pensé à quel point c'est blessant de subir cela pour des gens ayant choisi de vivre chez nous comme les Africains, ou alors aimant la Tunisie au point de choisir de subir son racisme au lieu de la quitter pour les juifs ? Comment pouvons-nous prétendre à notre droit au respect et à la dignité si nous les confisquons ainsi aux autres ? Comment osons-nous critiquer un soi-disant racisme européen ou américain sans nous remettre en question nous-mêmes ?
Nous sommes en train de construire une nouvelle Tunisie, sa société a également besoin de se remettre en cause car c'est elle qui nous donnera « l'exemple arabe à suivre ». Le racisme ne devrait plus jamais passer sous silence, que le « pu » sorte et que le débat soit ouvert sur les chaînes de télés et les ondes des radios, afin de cicatriser la plaie et de mettre la première pierre dans l'Etat de droit. Des lois devraient aussi être élaborées contre les racistes et ceux qui incitent à la haine.
Hajer AJROUDI

L'avis du sociologue
Imed Bouaziz : « Aujourd'hui plus ce que jamais le phénomène doit être étudié et le débat ouvert »
« Le racisme en Tunisie, même s'il n'a pas les mêmes formes que dans d'autres pays, comme il l'a été en Afrique de Sud par exemple, existe bel et bien. Seulement, chez nous, le contexte socio-politique existant et le refus d'en parler, ont fait qu'il soit latent. Mais à chaque occasion, le racisme émerge et explose. Notons d'abord que la discrimination dans son sens large existe fortement chez nous, même dans le système scolaire et les institutions de l'Etat.
Nous devons étudier ce problème, c'est le moment de le faire pour parler et construire un Etat de droit. Il n'existe pas d'études qualificatives sur le sujet, or il faut y procéder, ensuite, les médias doivent en débattre et s'impliquer dans la lutte contre le racisme et ses dimensions. L'approche doit être très méthodique.
La dimension la plus courante chez nous est celle du racisme inter religieux, entre le musulman et le non musulman. Or, la Tunisie Civile et Plurielle doit se construire sur de bonnes bases. Le 14 janvier, nous avons fait une Révolution, dont on ne peut cueillir les fruits sans une vraie culture, celle là se base sur la recherche, les études, les débats pour aboutir aux respects de Droits de l'Homme fondamentaux pour un Etat libre et démocratique ».
H.A
daassi [email protected]
amani [email protected]
Abdo Maalaoui (Montréal, Canada) [email protected]
riadh [email protected]
ARIFMO [email protected]
bengy [email protected]
Tounsi [email protected]
amadyka [email protected]
haythem [email protected]
larcla [email protected]
HG [email protected]
BT [email protected]


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.