Faut-il regretter l'amateurisme ? Faut-il carrément regretter les cooptations ou, du moins, leur côté franc ? Est-il logique, est-il normal qu'en ces temps où toutes les institutions se décentralisent, où l'on évolue vers la concertation et la collégialité, le sport, nos clubs, nos associations et nos fédérations continuent de fonctionner selon l'anachronisme oligarchique, le pouvoir de décision individuel, si ce n'est le pouvoir de décision d'un groupe fermé ? Rien ne filtre. C'est le flou. Même pas le flou artistique... Tout se décide en conclave, transposé avec un sans-gêne « conquérant » comme étant l'émanation d'un travail de concertation sur des bases démocratiques. La trouvaille du sport tunisien est, pour le moins, singulière : une année, c'est l'assemblée générale élective où l'on élira un seul candidat ; celle d'après est réservée à l'assemblée générale évaluative où les candidats se manifestent, dressent des pamphlets, se font applaudir, acculent dans leurs retranchements le bureau « élu » dont les membres ne fixent pas l'assemblée dans les yeux, mais disparaissent aussitôt parce que généralement le président en exercice est, soit reconduit « de facto » avant l'AG élective de l'année d'après, soit prié de débarrasser le plancher. Et c'est comme cela que les adhérents – et gare à ceux qui ne renouvellent pas leur adhésion le 30 juin avant minuit ! – sont appelés à applaudir le nouveau venu, lequel sort, bien entendu, de la cuisse de Jupiter. Voilà, donc, ce qui se passe dans la vie d'un club sur un cycle de deux ans : entre l'A.G élective puis celle qui lui succède deux ans après, avec cette précision à vouloir couper la poire en deux lors de l'A.G évaluative ! Nous sommes, décidément, en plein paradoxe : lors de l'assemblée élective on n'élit personne mais on entérine la décision autour de celui que des forces occultes ont déjà désigné. Une année après, lors de l'assemblée évaluative, on n'évalue rien du tout, si ce n'est le degré de diatribes, de griefs à l'encontre du bureau ; diatribes presque simultanément rythmées par de complaisantes louanges tressées en forme d'auréole sur la tête du président du club qui dénoncera bien sûr « les campagnes calomnieuses de la presse », remerciera les mécènes – qui ne lui donnent rien parce qu'ils n'ont pas confiance en sa gestion – se gardera de remercier nommément les mécènes qui bouchent les trous car ils veulent garder l'anonymat. Et dans un jeu de funambule qu'il apprend à maîtriser dès sa première année d'exercice, le premier responsable du club, dressera les mécènes les uns contre les autres, et s'arrangera le jour de l'assemblée de prendre les traits miséreux d'une Jeanne d'Arc qu'on conduit au bûcher. Toute la subtilité (morbide) est là. Tout le jeu est là. Jadis, séances d'exorcisme, les assemblées changent de vocation pour devenir d'anesthésiantes séances d'envoûtement. Ce n'aurait pas été possible si les textes n'étaient pas démesurément élastiques. Les clubs ont jusqu'au 15 août pour tenir leurs assemblées générales. L'équinoxe prend dès lors des curieuses trajectoires et les aiguilles d'une montre se mettent à tourner de droite à gauche... Cela fait que si les résultats du club sont piteux à la fin de la saison, le bureau a assez de temps pour rectifier le tir. On se mettra au mois d'août à évaluer positivement ce qui était négatif le mois de juin qui l'a précédé, et, du coup, le bureau honni à la fin de la saison, sera porté aux nues quelques mois après. Jusque-là, quatre clubs de la Nationale ont tenu leurs assemblées. Prenons le cas du CAB : Les cauchemars de la saison écoulée ne devaient-ils pas, au moins, infléchir un vote pluriel, pousser des candidats à se présenter franchement, chacun avec son programme et ses moyens ? Qu'a-t-on fait ? On confirme Ahmed Karoui, extrême récompense pour avoir sauvé le club du purgatoire, celui là même vers lequel il le poussait depuis deux ans ! Et au bout du compte, quelle visibilité du côté de l'Espérance ? A quel jeu joue Kamel Iddir ? Tout ce que nous enregistrons, ces jours-ci, c'est cette grogne accompagnant les entraînements tant au parc B qu'au parc A... Seules de véritables assemblées tenues dans un esprit démocratique et civique – et surtout le plus tôt possible – éteindront ce feu de braise... C'est, également, le cas à Sfax, où l'on ne comprend plus rien... Car, tout s'est fait sur des bases viciées : les notables cautionnent le président du club au détriment d'autres candidats au cercle des intimes... Et, en retour, le président du club se rebiffe, fait cavalier seul, et si cela se gâte, il se rabat de nouveau sur eux, moyennant un petit chantage sentimental. Quant à la sensibilité des supporters, un trophée, des rentrées d'argent, deux bons recrutements finiront bien par l'adoucir... Sinon, des promesse : on vit bien d'amour et d'eau fraîche ! Raouf KHALSI
Courrier de lecteurs Nous avons reçu une réaction et des précisions émanant de M. Tarak après le dernier "Cartes sur table" de notre collègue Raouf Khalsi, voici le texte : Salut Si Raouf, merci pour votre rubrique "Cartes sur table" que je lis toujours avec plaisir tellement vous allez droit au but et n'hésitez pas à présenter les choses comme elles sont réellement . Juste une petite correction à propos de cinéma : le film que vous citez avec Jack Nicholson s'égarant dans le labyrinthe de l'hôtel fermé l'hiver est en fait "The Shining" sorti en 1980 et non pas "A Clockwork Orange" de 1971 avec Malcolm McDowell, tous les deux tout de même du disparu Stanley Kubrick.