Par Ahmed NEMLAGHI - La commission d'investigation sur la corruption et les malversations s'enorgueillit d'avoir bouclé un certain nombre de dossiers sur la corruption et les malversations, qu'elle va transmettre incessamment à la Justice. Mais c'est justement là où le bât blesse. En effet ,outre le fait qu'il y a des réserves concernant sa compétence en matière d'investigation, on ne sait pas sur quelle base, cette commission a-t-elle mené ses enquêtes concernant les affaires de corruption et de malversations. Par ailleurs , s'était-elle intéressée au secteur judiciaire dans le cadre de sa mission ? Autant de questions constituant des sources d'inquiétude quant à l'aboutissement du travail de la commission d'investigation sur la corruption et les malversations 1)En ce qui concerne la compétence de cette dernière, certains juristes, dont des avocats et des magistrats, considèrent qu'elle n'a pas la qualité d'officier public, et ne peut de ce fait et en aucun cas mener des enquêtes sans en référer au procureur de la République. C'est en effet de la seule compétence de ce dernier d'ordonner l'ouverture d'une enquête, ou de transmettre le dossier à un juge d'instruction qui agit suivant commission rogatoire pour les besoins de l'enquête. Entendre des témoins, ordonner des expertises, procéder à des divers constats, constituent des éléments nécessaires pour l'établissement de la preuve. Ils relèvent de la seule compétence du juge judiciaire. Or la commission a procédé elle-même à réunir les éléments de preuves, pour les transmettre ultérieurement à la justice. Que se passera-t-il après ? Le juge saisi de l'affaire va-t-il se contenter des élément réunis par la commission pour trancher ? ou sera-t-il obligé de reprendre l'enquête à zéro ? 2)D'autant plus plusieurs juristes restent dubitatifs quant à la façon dont la commission a mené ses enquêtes. En quelle qualité en effet, peut-elle interroger certaines parties, qu'ils soient demandeurs ou défendeurs. A-t-elle qualité pour obliger quiconque à se soumettre à ses éventuelles demandes d'investigations multiples, ou pour saisir certains documents, pour les besoins de l'enquête ? 3)Parmi les dossiers de malversations, il y a ceux concernant le domaine judiciaire lui-même. La commission est-elle compétente pour procéder à des investigations dans ce domaine. D'autant plus que l'assainissement de la Justice s'avère de plus en plus pressant afin de réaliser une vraie transition démocratique. En l'occurrence, on ne fait que parler de liste des magistrats corrompus. Mais on ne sait pas qui a la qualité juridique pour dresser une telle liste. En attendant la commission d'investigation sur la corruption et les malversations n'a en aucune façon abordé ce problème. Elle n'a pas, par ailleurs, précisé sur quels genres de corruption elle a été chargée de faire des investigations. Tout ce qu'on sait ,c'est qu'elle a réuni des dossiers « lourds » (et l'expression est de l'un des membres de la commission). Au fait , qu'est-ce qui pèse plus lourd, un kilo de pierres ou un kilo de plumes ?