A dix jours des élections de la Constituante qui se dérouleront le 23 octobre courant, le ministère de la Femme organise depuis hier, sur deux jours, une université dédiée aux droits de la femme et la démocratie. Des journées de réflexion consacrées, à la femme et ses droits politiques ; la femme, la justice sociale et l'économie solidaire ; la femme, la terre et les changements climatiques ; les droits de la femme et le logement social et la pratique démocratique dans la littérature pour enfants. A l'ouverture Lilia Lâabidi, ministre de la Femme, était entourée de Saïd Aydi, ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi, Abderrazak Zouari, ministre du Développement régional et Mohamed Lazhar Akrmi, ministre délégué auprès du ministre de l'Intérieur chargé de la Réforme. C'est une rencontre initiée par le ministère de la Femme pour mettre en contact ses cadres avec d'autres départements et le tissu associatif. En quelques mois ce ministère, a organisé 889 journées de formation en Tunisie sur les différents volets intéressant la femme. Mohamed Lazhar Akrmi, rappellera que tous les problèmes sont interdépendants et plaidera pour la création d'un corps de police de transport pour sécuriser la circulation des personnes dont les femmes exposées au vol à l'arraché et autres provocations dans les moyens de transport public et les arrêts de bus et de métros. La Tunisie a été pionnière dans le monde arabe et musulman dans les acquis de la femme. En témoignent le Code de Statut Personnel (CSP) et la parité dans la composition des listes électorales pur la Constituante. Le père du CSP est Tahar Haddad qui a rédigé son livre « Imraatouna fi chariâa wal moujtamâ » en 1929 et décédé en 1934. Il avait enduré la vindicte des fanatiques. Abderrazak Zouari, ministre du Développement régional a précisé que son ministère avait procédé à une évaluation des politiques de développement régional dans le pays et a révélé qu'il n' y avait pas de véritable politique de développement régional, mais des actions d'assistance et de saupoudrage. Une nouvelle politique a été arrêtée. Elle se résume en quatre règles fondamentales : la cohésion, l'efficacité, la compétitivité et la démocratie locale. Il est nécessaire d'avoir une cohésion urbanistique du territoire y compris dans l'habitation. Le territoire doit être découpé de manière efficace. L'intégration à l'économie mondiale doit englober les régions intérieures avec la création de régions de progrès. La démocratie locale est à la base de toutes les réformes. La transition démocratique, ne se limite pas seulement à la rédaction de la constitution, l'élection d'un président, d'une chambre des députés et la nomination d'un gouvernement. Elle est aussi, la démocratie locale où la femme a un rôle capital à jouer. Dans les démocraties, les femmes sont beaucoup plus intéressées par des responsabilités locales que nationales. « Ensembles nous devons réfléchir à une nouvelle stratégie de développement », conclura le ministre. Obstacles et contraintes Saïd Aydi, avance un chiffre très significatif : « Les deux tiers des demandeurs de travail sont des femmes en Tunisie ». L'histoire des révolutions nous enseigne que les déclarations d'intention ne suffisent pas. En France, la femme n'a encore pas obtenu l'égalité des salaires. La Tunisie est riche par sa jeunesse et la contribution de la femme. Parfois des femmes s'opposent aux femmes. Il ne faut pas opposer la gent masculine à la gent féminine. La femme doit accéder aux postes politiques. La parité dans les têtes de listes à la Constituante aurait dû être réalisée. « Il faut avoir une société apaisée qui n'aura pas besoin d'un ministère de la femme, ni de l'homme », conclut le ministre. Dans le chapitre logement social, Morched Chebbi, urbaniste détaillera, les obstacles et les contraintes de la politique d'habitat social en Tunisie. Le logement social est une notion qui nous renvoie aux années 60, lorsque l'Etat avait initié, par l'intermédiaire de la SNIT, une politique de construction de logements sociaux. Ce sont des logements destinés à des populations de niveau modeste. Toutefois, le développement de l'habitat anarchique, traduit l'échec de la politique de l'Etat qui avait procédé à la démolition des gourbis, au lendemain de l'indépendance. A partir des années 70, on constate une certaine acceptation par l'Etat de la construction anarchique ou l'habitat spontanné. Ainsi, sont apparues les cités Ettadhamen, Daouar Hicher et d'autres. 800 mille à 900 mille logements ont été construits de façon spontanée sur des lots de 100 mètres carrés. Au cours des 20 dernières années, ces quartiers ont fait l'objet de réhabilitation et de régularisation, bien que ces propriétés sont dans l'indivision. Le renchérissement du sol est une contrainte supplémentaire devant l'habitat social. Les organismes publics ont démultiplié ce qu'ils faisaient pour les classes moyennes et ont occulté les catégories sociales à faible revenu. Morched Chebbi, considère qu'il est indispensable d'avoir des réserves foncières dans les grandes villes, de diversifier l'offre de services publics en matière de petits lots et de mettre en place des financements adéquats. Les solutions institutionnelles n'ont pas été appliquées parce que « le système était concentré sur la satisfaction de sa base sociale » », dira-t-il. Des villes largement masculines Tarak Brik, mettra en relief le grand déséquilibre entre les moyens de la famille et l'acquisition du logement. Des problèmes se posent dans les régions côtières. Dans les régions intérieures, l'AFH n'arrive pas à vendre. Des logements sociaux à Kasserine sont disponibles et restent inoccupés. A Nefta 50% des maisons sont vides. Là où le Tunisien peut travailler, il faudra qu'il y ait du logement. Jalel Abdelkefi, urbaniste, rappelle que d'ici 2050, la population tunisienne passera à 20 ou 25 millions d'habitants. La question démographique va peser sur la politique d'habitat qui n'est pas une juxtaposition de logements. Nous assistons à une consommation anarchique de l'espace et à une dégradation du logement et une spéculation effrénée. Hend Gafsi, posera la question : les villes sont-elles des lieux d'accès au logement et propices à la libre circulation de la femme ? Elle considère que la situation de la femme est meilleure dans les villes que dans la campagne. Les villes contribuent au mieux être des femmes. L'offre de transport en commun est libératrice pour les femmes. Toutefois, « les villes tunisiennes demeurent largement des villes d'hommes », dira-t-elle. Beaucoup de progrès reste à faire. Lilia Lâabidi, ministre de la Femme, conclura en annonçant que son ministère prend en charge la question du logement social. Il soumettra des propositions au Gouvernement.