Le gouvernement de Hamadi Jebali, dont la composition sera annoncée prochainement, devra relever d'importants défis économiques et répondre à des revendications sociales "urgentes". "Le prochain gouvernement prendra ses fonctions dans une conjoncture économique très difficile", a affirmé M.Mustapha Kamel Nabli, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), qui prévoit un taux de croissance économique nul voire même négatif, en 2011, pour la Tunisie, ce qui va engendrer une baisse du rythme de création d'emplois. Le taux de chômage a atteint "des taux records", passant de 13% en Mai 2010, à 18,3 % en mai 2011. Il devrait même augmenter davantage, selon les prévisions, à la fin de 2011. Par ailleurs, la conjoncture internationale sera caractérisée par le ralentissement de la croissance économique, notamment dans la zone Euro, premier partenaire économique de la Tunisie, outre l'instabilité prévalant en Libye, deuxième partenaire économique du pays. Pour les experts économiques, cette situation pourra constituer une pression supplémentaire sur l'économie tunisienne, d'autant plus que l'UE s'est engagée à octroyer à la Tunisie des aides financières de l'ordre de 400 millions d'Euros et des crédits de l'ordre de 3 milliards d'Euros, au cours de la période 2011/2013. Suite à la régression des investissements directs étrangers, de 31,9% (11 mois 2011), les réserves en devises de la Tunisie ont baissé, à 10 504 millions de dinars, soit 113 jours d'importation au 13 décembre 2011, contre environ 5 mois, en fin de 2010. L'activité des entreprises économiques tunisiennes a enregistré un recul perceptible, à cause des grèves et des sit-in qui pourraient mener l'économie tunisienne à une "situation catastrophique" selon la présidente de la centrale patronale, Mme.Wided Bouchmaoui. A peine élu, le président de la République provisoire, Moncef Marzouki a appelé à une trêve politique et sociale de six mois, afin de permettre au gouvernement de Hamadi Jebali, de réaliser son programme économique, lequel n'a pas encore été dévoilé. Pour l'économiste, Sami Bibi, "les investisseurs ont besoin de messages rassurants", car l'investissement est la source de la création d'emplois". Ce chercheur a indiqué à la TAP, que le gouvernement est appelé à mettre en place une stratégie claire qui permettra de dynamiser l'économie et de relancer le rythme de croissance économique. Il faut, selon lui, éviter " les décisions populistes qui peuvent mener le pays vers la récession ". Commentant la décision du président de la République de vendre les palais présidentiels, afin de booster l'emploi, il a considéré que " ces décisions sont prises pour préserver un capital politique, auprès des électeurs ". M.Bibi a recommande en outre " d'accélérer l'adoption du projet de budget de l'Etat et de la loi de finance pour l'exercice 2012 ", en vue garantir une meilleure visibilité et permettre à la Tunisie d'attirer de nouveau, les investisseurs. Le gouvernement de Béji Caid Essebsi a présenté un projet de budget qui se monte à 23 125 millions de dinars. Il est reparti entre 71% de fonds propres et 29% de ressources d'emprunt. Ce projet prévoit de circonscrire le déficit budgétaire à 6% du PIB (contre environ 4% prévue pour l'exercice 2011). Selon plusieurs observateurs, ce budget qui a maintenu le même schéma adopté avant la Révolution du 14 janvier 2011, a consacré un important budget à la présidence de la République (68,4 MD) malgré la réduction des prérogatives de cette institution, contre un budget de l'ordre de 34,1 MD alloué au ministère de la planification et de la coopération internationale et 13,8 MD seulement, au ministère du développement régional. Le projet de budget préconise, en outre, le prélèvement de quatre journées de travail pour les salariés des secteurs public et privé, sans pour autant, imposer de nouveaux impôts pour les grosses fortunes. Le programme économique du mouvement Ennahdha qui a remporté le plus grand nombre de sièges (89) au sein de l'Assemblée constituante (élections du 23 octobre 2011), table sur un taux de croissance annuel de 7% et la création de 120 mille emplois par an. Ce même parti prévoit une réduction du taux de chômage à 8,5%, à l'horizon 2016. M.Hamadi Jebali (62 ans), prochain Premier ministre, devra annoncer la composition de son gouvernement au président de la république, qui la soumettra ensuite, à l'Assemblée constituante, à l'issue des discussions avec la troïka (Ennahdha, Ettakattol, CPR). Il est appelé, ensuite, à élaborer son programme d'action pour la prochaine étape. Le président de l'Assemblée constituante appellera à une séance plénière dans un délai maximum de trois jours, pour accorder au nouveau gouvernement, un vote de confiance à la majorité absolue, après la démission de M.Jebali de l'Assemblée constituante. Il y a lieu de souligner que M.Hamadi Jebali a passé plus de 16 ans en prison sous les règnes de Bourguiba et de Ben Ali, dont 10 ans en isolement.