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Beaucoup de matières premières; trop de pauvreté
Régions défavorisées
Publié dans Le Temps le 22 - 12 - 2011

Après avoir pris part à la « Réunion de Travail » qui a eu lieu à l'Institut Supérieur des Etudes Technologiques à Sidi Bouzid, à laquelle ont assisté « cinq présidents » comme l'a mentionné Cheikh Abdelfattah Mourou, et au cours de laquelle des discours, le moins qu'on puisse dire, populistes fussent prononcés devant la petite audience et à l'adresse de l'ensemble des Tunisiens, l'ambassadeur de l'Union Européenne Adrianus Koestenruijter, a poursuivi son périple dans les régions appelées « berceau de la Révolution ». Après Sidi Bouzid, le chef de la délégation a mis le cap sur Sbeïtla et Kasserine.
Une région lointaine, ignorée et mise à l'écart. Pourtant regorgeant de tant de choses invitant à ce que la vie soit au moins différente de ce que nous avons pu relever tout au long d'une assez courte visite.
Kasserine, c'est tout d'abord 432 mille habitants, elle est entourée de montagnes, notamment, le Djebel Chambi qui culmine fièrement à 1544 mètres et qui est considéré, à juste titre, comme le sommet de la Tunisie. La ville de Kasserine, le chef-lieu du gouvernorat, compte quelque 75 mille habitants, et selon certains responsables de la région « l'une des plus grandes problématiques réside dans l'éparpillement des habitants. Les localités sont nombreuses et où les habitants vivotent un peu partout, ce qui rend parfois difficile voire impossible qu'un projet ait vraiment un effet sur l'ensemble des habitants ». Et bien que l'agriculture soit la principale activité économique de Kasserine, un semblant d'industrie paraît à son tour exister. En effet, l'industrie dans la région se base essentiellement sur l'exploitation et la transformation de matières premières abondantes, telles que l'alfa, le marbre et l'argile. Ainsi, de petites unités de briqueteries, de marbreries, de huileries et une usine de transformation de l'alfa, établie dès l'indépendance, s'y sont implantées. Selon le même responsable régional « depuis l'indépendance, l'Etat tunisien a certes créé quatre usines, mais que l'on soit clair : il a été obligé de les créer dans cette région. L'usine de cellulose, il fallait la créer sur place afin d'amortir les coûts de transport qui sont assez élevés ce qui a des méfaits sur la rentabilité du projet, alors il fallait qu'il soit installé sur place. La Sotacib (Société Tuniso- Algérienne de Ciment Blanc), elle a aussi été créée dans ce même cadre, puisqu'il assez coûteux de transporter le CSO3 et le transformer ailleurs. Idem pour la STC (Société Tunisienne de Chaux), à Thala et la société d'Alfa. Sinon, nada. Ceci étant, alors que la région regorge d'un énorme potentiel en matière première ».

Contraste

« Alors que la région est immensément riche en matière première, la région ne dispose d'aucun tissu industriel. Kasserine est nommément riche en produits forestier et de substances, indique encore le même responsable régional. Elle dispose de 3 types de marbres mondialement connus, mais il s'agit d'un secteur autour duquel une unique activité est développée, à savoir celle de l'extraction, alors qu'aucune activité de transformation n'existe, ce qui pourrait favoriser la création d'emplois. Ceci sans parler du potentiel touristique, notamment culturel dans une région qui compte plus de 40 sites archéologiques. Outre le tourisme écologique avec les parcs de Chaambi, celui de M'ghila, Ain Sebsa, Lajred, Hidra, des sites assez sous-exploités parce que les banquiers renoncent à financer des projets, et surtout parce que l'Etat n'a pas pu créer une infrastructure de base susceptible de faciliter l'accès à ces sites. La région offre aussi une excellente niche de tourisme de chasse, mais seulement 8% des touristes de chasse viennent ici, car il n'existe aucune structure d'accueil qui soit juxtaposée à ces parcs. L'activité de thermalisme à son tour offre un énorme potentiel, avec notamment l'une des sources d'eau les plus intéressantes du pays. Même le bain traditionnel « Boulâabi », qui exploitait une source hyperthermale située sur le pied du mont Châambi, a dû arrêter son activité». Le gouverneur de Kasserine, Béchir Bedoui, précise pour sa part: « je viens de Bizerte, je suis nommé gouverneur depuis quatre mois et c'est comme si je venais d'une autre planète. Vous êtes certainement chanceux d'être venu un dimanche, journée où personne ne vient contester, sinon vous auriez assisté à une toute autre réalité. Lorsque vous visitez certaines localités de la région, vous vous étonnerez comment ces gens arrivent à survivre ? La misère est généralisée, qu'est ce que cette région a connu avant le 7 novembre ? Rien, je dirais même depuis l'indépendance, les gens vivent encore dans des grottes. Et le problème actuel que nous rencontrons c'est quand on essaye d'aider une localité ou une famille, c'est que toutes les autres localités et les autres familles viennent demander d'avoir le même service ou exprimer d'autres. La situation est vraiment chaotique et toute une stratégie doit être mise en place » souligne-t-il. Il s'agit d'une stratégie qui devrait prendre en relief la spécificité assez particulière de la région, sans dramatiser la situation ou en faire un cheval de bataille pour d'éventuelles élections. Interrogés sur les nécessités réellement urgentes de la région arrêtées durant les mois depuis qu'il est gouverneur, Béchir Bedoui indique que « les priorités nous les connaissons et nous avons essayé de les arrêter. On peut imaginer un tas de programmes, de bilans, de schémas et autres, mais dès qu'on est sur le terrain, on réalise que les priorités sont, sans trop ironiser, celles indiqués dans l'échelle de Maseltov. Les gens ici ont besoin de nourriture tout d'abord, de sécurité ensuite étant donné que nous considérons que l'assainissement des voies publiques, à titre d'exemple, fait partie de cette catégorie de besoins et peut être considéré comme le plus élémentaire des droits. C'est peut être un luxe pour beaucoup, mais disons-le, les gens ici peinent à avoir accès à l'eau potable, à se raccorder au réseau d'électricité. Bref, à avoir un toit au-dessus de la tête. Lorsqu'on parle pauvreté, pour beaucoup c'est de ne pas arriver à s'acquérir une voiture de rêve, mais ici, à Kasserine, on veut tout d'abord manger ».

A Sbeïtla, « on veut du financement !»

A Sbeïtla, les choses ne sont pas meilleures. Lors d'une réunion avec les jeunes promoteurs de la région, les jeunes n'ont en cesse souligné l'absence de certaines instances, telles que le Fonds de Promotion du Centre Ouest, l'APII (Agence de Promotion de l'Industrie et de l'Innovation, l'APIA (Investissements Agricoles, la pépinière d'Entreprise) et autres auparavant pointés au premier rang dans ce genre de réunions. Seuls présents, était l'ambassadeur de la délégation de la Commission Européenne Adrianus Koestenruijter, un représentant du ministère du tourisme ainsi qu'un représentant de l'Association de micro- crédit Enda. L'ambassadeur de l'UE, pour sa troisième visite dans cette région depuis le 14 janvier est sorti d'une conclusion, qu'il a faite clair aux jeunes promoteurs présents. « Je sais ce que vous pensez quand je viens ici. Mais je ne viens pas avec les poches pleines d'argent. Je voudrais bien vous signaler que j'essaye là tout d'abord à connaître les priorités et les besoins urgents de la région, et surtout essayer de vous mettre en relation avec les institutions spécialisées afin de vous procurer les financements de vos projets, et que ces derniers arrivent à réussir ». Il est apparent que les banquiers font la sourde oreille dans ce genre de situations, mais on saura peut-être quelque chose de différent une fois les 4.7 millions d'€ consacrés par l'Union Européenne pour appuyer les zones défavorisées de Tunisie, deviennent accessibles. Pour les jeunes promoteurs, ils devront passer par les organismes de microcrédits pour pouvoir bénéficier de ces financements. D'ailleurs, et à la lumière de ce qui peut très facilement être constaté, la région de Kasserine est assez sous-bancarisée, nous avons, de notre part, posé la question sur le taux de bancarisation dans la région, notamment. Selon le même responsable régional, « ce sont quasiment toutes des banques de dépôts et il n'existe presque aucune banque d'investissement. C'est un problème majeur, même si la création d'entreprises a quand même connu une évolution avec l'installation de la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS). Concernant les PME, nous avons enregistré quelques évolutions après l'ouverture d'une agence de la BFPME (Banque de Financement des PME) ». Et de poursuivre « mais si on se penche sur le nombre de projets créés, ainsi que sur la durabilité de ces projets, on trouvera un bilan assez maigre. Le développement repose essentiellement sur la durabilité du projet, mais ici à Kasserine, 60% de la population sont des ruraux et dispersés, ce qui a ses répercussions néfastes sur les indicateurs socio-économiques que l'on qualifie de catastrophiques. Je vous cite un exemple, les données nationales indiquent que la moyenne des dépenses émises par l'Etat pour le raccordement en eau potable et en électricité est de 4 mille dinars, désolé de vous dire que ce taux n'a aucun rapport avec la réalité dans la région de Kasserine. Il est impossible de desservir les populations rurales ». Face à cette amère réalité, la région compte quelques dizaines d'artisans qui créent des produits spécifiques, notamment les produits à base d'alfa, les tapis berbères, etc. Un secteur qui pourrait être encouragé par le développement du tourisme culturel et écologique.
Ce n'est pas vraiment à travers ces quelques lignes que nous allons relater l'amère réalité vécue par la région de Kasserine. Une misère qui se sent dans l'air et dans laquelle croupit une importante frange de nos concitoyens est soumise à endurer un calvaire quotidien efférent et insoutenable. On avait dans la tête le sujet du développement régional, mais une fois sur place, on s'est fait une idée toute autre, car il s'agit d'une région où le minimum du minimum devient denrée rare. Un plan urgent de restructuration de la région est récurrent et une refonte de l'infrastructure de la région est à son tour un must. Il est vrai que la région est le hinterland du pays, mais ceci n'empêche que les routes, les raccordements aux réseaux d'électricité et d'eau potable sont des urgences. Dans d'autres régions ‘défavorisées', du pays, les hôpitaux et certaines autres institutions font défaut, à Kasserine, on a la tête ailleurs, on cherche tout d'abord à satisfaire les besoins les plus rudimentaires. Repenser un modèle de développement de la région doit être la conjugaison des efforts de l'ensemble des acteurs sur la scène nationale. Les ministères et les différents offices que compte notre administration sont appelés à écouter encore davantage les habitants de la région, qui à leur tour doivent proposer des solutions fiables pour sauver leur région de la misère et la décrépitude.


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