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“Les médias ne sont pas le porte-voix des partis vainqueurs des élections” Médias - Néjiba Hamrouni, présidente du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT):
Il est inadmissible que le ministère de l'Intérieur accorde les autorisations aux médias Le Temps : comment réagissez-vous aux accusations adressées par les dirigeants du mouvement islamiste Ennahdha aux médias qui ne reflètent, pas selon eux, les résultats des dernières élections et la volonté du peuple ? - Les hommes politiques qui détiennent aujourd'hui le pouvoir à la faveur d'une révolution populaire menée pour les libertés et les droits de l'Homme n'ont pas encore saisi le rôle que doivent jouer les médias dans le cadre d'une démocratie naissante. En attestent les déclarations du Premier ministre Hamadi Jebali qui a parlé de médias gouvernementaux qu'il conçoit comme étant le porte-voix des partis ayant obtenu les meilleurs scores lors des élections de l'Assemblée Constituante. Il s'agit là d'un amalgame de concepts. Il faut faire la distinction entre médias publics et médias gouvernementaux. En Tunisie, nous avons des médias publics qui sont financés par les deniers publics pour informer dans l'intérêt de l'ensemble du public. Ils sont appelés à être impartiaux à l'égard de tous les partis, y compris le parti au pouvoir. Ce mélange de concepts est même perceptible auprès de certains de nos journalistes exerçant dans les médias publics qui croient que leur mission est de relayer les points de vue du gouvernement en place. Il est honteux de voir la télévision nationale consacrer trois minutes de son journal de 20 heures à une information ayant trait à un diplomate d'un pays étranger qui présente sa lettre d'accréditation au Président de la République ! En quoi cette information peut-elle intéresser les millions de téléspectateurs? Cela rappelle les reportages consacrés naguère aux baignades de Bourguiba. • Les médias ne se sont, donc, pas débarrassés des anciennes pratiques ? - La parole est plus libérée, mais les anciennes pratiques ont la peau dure. On ne peut pas changer des mentalités avec une baguette magique. Il n'y a pas encore de séparation entre l'administration et la rédaction dans la majorité de nos médias. Les directeurs des entreprises publiques et privées continuent à exercer des pressions qui concernent les choix des sujets ou le contenu des émissions. Les journalistes sont souvent réduits à un rôle de simples exécutants. Ils sont également toujours victimes de tentatives d'intimidation. Le nombre de plaintes déposées contre les journalistes a même explosé depuis la chute du régime de Ben Ali. • De nouveaux médias, dont les sources de financement sont opaques selon le syndicat des patrons de presse, ont poussé comme des champignons après la révolution. Comment réagissez-vous à cette profusion ? - Il est tout à fait normal d'assister à l'éclosion de nouveaux médias dont les sources de financement sont opaques quand c'est le ministère de l'Intérieur qui délivre les autorisations aux médias sans même consulter les structures en charge du secteur de l'information comme le syndicat national des journalistes ou encore l'Instance nationale pour la réforme de l'information et de la communication (INRIC). Il est inadmissible que ce ministère continue à délivrer les autorisations des médias une année après la révolution. Nous réclamons dans ce cadre la mise en place d'une instance indépendante et élue chargée d'organiser le secteur de l'information et de la communication. • Quelles sont les priorités du SNJT en cette période marquée par un difficile apprentissage de la liberté de la presse et une délicate transition démocratique? - Le chantier de la réforme du secteur de l'information est très vaste et complexe. Le syndicat continuera, en premier lieu, à défendre la liberté de la presse, qui est toujours menacée. Il planchera également sur l'amélioration de la situation morale et matérielle des journalistes. . Nous entamerons bientôt une tournée dans toutes les entreprises pour examiner les conditions de travail des journalistes, les salaires, le respect des conventions collectives et la mise en place de comités de rédaction indépendants. La troisième priorité est relative à la formation des journalistes étant donné que nous avons constaté de nombreuses lacunes en ce qui concerne le professionnalisme et le respect de la déontologie du métier. Propos recueillis par Walid KHEFIFI Lepecheur l'indépendant AJMI91 andalib Gil