Le Temps : Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ? Gérald Staberock : Je suis le Secrétaire Général de l'OMCT, un poste que j'occupe depuis le mois de septembre 2011. J'ai travaillé pendant une dizaine d'année dans la réforme contre la torture dans les pays en période de transition démocratique en Europe mais aussi sur la question de la torture qui était une question évidente en Tunisie durant l'ancien régime. Après une première mission et un atelier de formation sur le traitement des litiges en lien avec la torture, vous êtes revenu parmi nous pour trois jours. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus le travail de l'OMCT en Tunisie ? Effectivement, après voir étudié la situation actuelle de la Tunisie, avec l'arrivée du nouveau gouvernement, résultat d'élections libres, le but, maintenant, est comment réfléchir comment peut-on assurer une lutte contre la torture effective et la prévention contre les violations physiques. On sait bien que la torture était pratiquée de manière systématique et généralisée sous Ben Ali, en tant que meilleur moyen de répression politique. Néanmoins, il ya la torture pratiquée par la police dans des cas qui ne sont pas nécessairement politiques. Je crois que, maintenant, c'est le moment-clé avec un nouveau gouvernement, une nouvelle Constitution établie, de créer une feuille de route contre la torture avec des réformes de la justice, des réformes qui installent les mécanismes de la prévention effective pour assurer la justice aux victimes et révéler la vérité de ce qui s'est réellement passé, jadis. Quel est le grand enjeu, aujourd'hui, pour que la Tunisie puisse réussir le cap de la lutte contre la torture ? Il est, maintenant urgent de déclencher le processus concret : quelles sont les réformes voulues par le nouveau gouvernement et comment peut-on les soutenir ? Projetons-nous dans l'avenir. Vous êtes-vous entretenu avec le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice Transitionnelle, M. Samir Dilou sur la question de l'instauration effective des Droit humains et de l'interdiction de la torture ? Oui. Il est justement important de rappeler que la torture ne s'arrête pas parce qu'il y a eu une révolution. La torture ne s'arrête que quand il y a de véritables prises de position, de vraies décisions et des mesures sérieuses. On ne peut abolir la torture qu'à travers l'adoption et la mise en œuvre de lois et parce qu'on accepte la responsabilité de lutter contre toute forme de supplice. Depuis une année, nous avons un long débat avec la nouvelle Tunisie afin d'éradiquer la torture, nous pensons maintenant sur la façon de mettre en place ensemble, avec le gouvernement, un système de prévention et de lutte contre la torture. La présence active de M. Samir Dilou durant la cérémonie d'ouverture de la consultation nationale sur la prévention de la torture et des mauvais traitements. Il a assuré de la volonté de mettre en place ces réformes. Il a surtout reconnu que la torture qui avait une dimension particulière en Tunisie, a tout de même continué après la Révolution, rajoutant qu'elle ne pourrait être éradiquée qu'à travers une réforme radicale. Une fois la réforme faite, comment l'OMCT veillera t-elle à ce qu'elle soit réellement appliquée et à ce qu'il n'y ait pas de retour à la torture ? Nous pouvons offrir notre soutien en soutenant la Société civile, nos partenaires de longue date par le biais des formations, des plaidoiries conjointes, le soutien des victimes. Or, au final, cela reste dépendant des Tunisiens pour les Tunisiens et nous pouvons en tant qu'acteur international seulement soutenir. C'est tout de même important de prouver notre solidarité en travaillant ensemble sur les réformes tout en soutenant les associations et les victimes.