La révolution tunisienne n'a pas eu de laeader. Nahdhaouis, libéraux, communistes, centristes suppôts de l'ancien RCD et, inévitablement, la bien pensance des intellectuels et des artistes dont la plupart ont juste changé de bord, mais pas de côté, eh bien tout ce beau monde a emboîté le pas et placé d'une façon ou d'une autre son fauteuil dans le sens de l'Histoire. Sauf que la Révolution a horreur du vide, comme elle ne peut pas être bicéphale ou menée par plusieurs leaders à la fois. Voyez ce qu'il en est advenu de Robespierre et de Danton, de Bourguiba et Salah Ben Youssef, de Staline et Trotsky et les exemples sont légion. On sait qu'Ennahdha tient aujourd'hui les rênes du pays. On sait également que Hamadi Jebali veut faire sortir son gouvernement de l'autocratie et que, fatalement, l'influence transversale de Rached Ghannouchi et de ses plus stricts conseillers, lui lie les mains. Quelque part Jebali et son gouvernement paraissent frileux, tribut de l'apprentissage de la gouvernance. Sauront-ils être des technocrates même si le Conseil des ministres hier, a traité de sujets sociaux et économiques pointus ? Mais entre temps l'idéologie nahdhaouie avec les clins d'œil – qu'elle regrette ? – envers les Salafistes et les prédicateurs de l'excision aura ameuté la société civile. Aujourd'hui nul n'est dupe des manœuvres nahdhaouies : elle a le pays entre les mains et, forte de cette conviction, elle est en train de verrouiller l'administration hormis le jonglage sémantique d'Ali Laarayedh devant la Constituante. En face, néanmoins, les forces centristes excitées par l'appel de Béji Caïd Essebsi – quelque chose de plus gaulliste que de Bourguibiste - , sont en train de se réorganiser ramenant au front les 60% de Tunisiens qui n'ont pas voté le 23 octobre. C'est effectivement vers une bipolarisation de la vie politique que nous progressons : Ennahdha avec sa Troïka face à la Société civile et les milliers de sympathisants destouriens. Du coup, surgit une espèce de pré-figuration de la guerre des icônes : Cheikh Rached, icône d'Ennahdha, c'est incontestable. Face à qui néanmoins ? A moins que ce ne soit vraisemblablement et inévitablement Caïd Essebsi. Raouf KHALSI kichmet Hésa kichmet