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2 - Success story ou le Maghreb des développeurs
Horizons - L'UMA: serpent de mer ou projet viable ?
Publié dans Le Temps le 25 - 07 - 2007

Le 16ème Forum de l'ATUGE, réuni à Tunis le 19 juillet dernier, a aidé à mettre en perspective le projet maghrébin, en le situant dans son contexte régional et international: globalisation économique, processus Euromed, Union méditerranéenne (voir, dans ''Le Temps'' d'hier, notre premier article: «Opération dépannage»).
Il a permis aussi de mesurer l'importance de l'apport des opérateurs économiques régionaux, dont certains ont su parier sur l'UMA et n'ont pas attendu la levée des obstacles pour se déployer dans la région. Toutes voiles dehors...
Au cours d'une table ronde intitulée «Champions maghrébins, retour d'expériences», certains de ces opérateurs ont témoigné des raisons qui les ont amenés à parier sur cette «dimension maghrébine» et des problèmes qu'ils espèrent voir réglés pour que ce pari soit vraiment gagné. Si nous évoquons ici leurs expériences, c'est pour qu'elles servent d'exemples à tous ceux qui leur emboîteront le pas à l'avenir.

Ghazi Ben Tounes (Attijari Bank):
«Accompagner les clients partout»
Champion maghrébin dans le domaine de la finance: Attijari Wafa Bank, filiale du groupe marocain ONA, a racheté la Banque du Sud qu'il a réussi à recapitaliser et à redresser en moins de deux ans. Comment s'est déroulée cette première expérience d'internationalisation ? «Au Maroc, notre marché était au bord de la saturation. Le groupe a opté pour une stratégie d'expansion sur le Maghreb. Le choix a été porté sur la Tunisie qui offrait les meilleures opportunités. Le portefeuille de la BS était certes grevé de créances accrochées, mais la banque présentait un gros potentiel avec 1300 employés, un taux d'encadrement de 46% et 100 agences», explique Ghazi Ben Tounes, DG tunisien d'Attijari Bank. Qui ajoute : «Nous avons pu assainir le portefeuille de la banque, lancer de nouveaux produits, développer les métiers de banque, notamment la bancassurance, et financé beaucoup de projets économiques».
Fort de son succès tunisien, Attijari lorgne maintenant vers l'Algérie, véritable gisement encore peu exploité. Une demande pour créer une filiale dans ce pays a déjà été déposée, mais la réponse tarde à venir. Le blocage est sans doute politique, lié aux divergences algéro-marocaines sur la question du Sahara occidental, d'autant que d'autres établissements bancaires étrangers ont vu des demandes similaires acceptées. En créant une filiale en Algérie, Attijari Bank voudrait accompagner ses clients tunisiens qui sont de plus en plus nombreux à s'implanter dans ce pays.
La banque a-t-elle rencontré des problèmes lors de son implantation en Tunisie ? Oui, tout de même. Le plus important concerne la limitation à six du nombre d'expatriés que la banque est autorisée à utiliser. Avec cette réglementation protectrice, la Tunisie cherche à préserver son marché de l'emploi au moment où elle fait face à un problème de chômage des diplômés. C'est compréhensible, mais le métier de la banque est très exigeant et que les compétences pointues ne courent pas les rues. La direction d'Attijari a trouvé la parade en recrutant dix polytechniciens tunisiens qui ont poursuivi un stage de trois mois au Maroc avant d'être lancés dans le bain.

Nabil Karoui (K&K World):
«Si nous ne l'avions pas fait, les Libanais l'auraient fait à notre place»
Autre success story maghrébine, celle des frères Nabil et Ghazi Karoui, fondateurs de K&K World. Ce groupe spécialisé dans la publicité, qui pèse aujourd'hui 50 millions de dollars, vient de créer la première chaîne de télévision maghrébine, Nessma TV. «Le marché de la publicité télévisuelle au Maghreb s'élève à 250 millions de dollars net par an. Si on n'avait pas créé nous-mêmes une télévision maghrébine, ce sont les Libanais ou les Saoudiens qui, tôt ou tard, l'auraient fait à notre place», explique Nabil Karoui.
K&K World, qui a été créée en 1997, est aujourd'hui présente dans les trois pays maghrébins (Tunisie, Algérie et Maroc). «Le marché tunisien est trop petit et pas assez développé. Il faut se battre pour garder ses positions. Et pour garder celles-ci, il faut se développer sans cesse. Le Maghreb offre de grandes opportunités à cet égard», explique Nabil Karoui, qui se plaint néanmoins de certains problèmes qui ont handicapé le déploiement de son entreprise dans la région. Au cours des premières années de l'implantation de l'entreprise hors des frontières tunisiennes, ses cadres algériens et marocains étaient obligés d'avoir un visa pour passer d'un pays à l'autre et cela demandait parfois des mois, obligeant parfois l'entreprise à recourir à des cadres non maghrébins. Il y a aussi le problème du rapatriement des bénéfices, qui est encore soumis à une autorisation préalable de la Banque centrale.

Hichem Elloumi (Coficab-Groupe Chakira):
«L'internationalisation est une nécessité vitale»
Premier groupe tunisien à s'internationaliser, Chakira, spécialisé dans le câble et le câblage automobile, est présent, à travers la Coficab, son fleuron, au Portugal, depuis 1993, pour accompagner Delphi, premier équipementier mondial, puis au Maroc, en 2001, où il possède une usine située dans la zone franche de Tanger, en Egypte et en Roumanie. L'entreprise lorgne aujourd'hui vers un marché autrement plus important : le Brésil, où il devrait accompagner bientôt l'un de ses grands clients et donneurs d'ordre internationaux.
Hichem Elloumi, fils du fondateur du groupe et l'un de ses dirigeants actuels, estime que l'internationalisation est une évolution normale voire inévitable pour toute entreprise industrielle. Et pour cause: le marché local est exigu. Les gros clients sont souvent les grosses firmes internationales. Dans le cas de son entreprise, il s'agit des grands constructeurs automobiles et équipementiers européens. Ces donneurs d'ordres, qui font face à des exigences de qualité et de délais de livraison, doivent être accompagnés partout où ils ont eux-mêmes des unités de production ou des marchés importants.
Cette internationalisation a permis au groupe Chakira de passer de 20 millions de dinars d'exportation lorsque ses usines étaient confinées en Tunisie à 150 millions de dinars aujourd'hui, dont l'essentiel est réalisé à l'étranger.
S'agissant du Maghreb comme site industriel et comme marché potentiel, Hichem Elloumi explique: «Pour la Coficab, le Maroc reste un site très attrayant. C'est un pays ouvert et dont la réglementation est très flexible. La zone franche de Tanger est à une heure de bateau de l'Europe. Bientôt, la capacité de Tanger Med s'élèvera à 1,5 millions de conteneurs, 500 000 camions et 500 000 voitures par an. De Tanger à Tarifa, en Espagne, je fais 35 minutes en voiture».
La Coficab, qui a profité de l'internationalisation de son activité pour se développer et atteindre une taille critique viable dans une économie ouverte sur les marchés mondiaux, va donc maintenir sa stratégie d'implantation à l'étranger. Mais après le Maroc et l'Egypte, va-t-elle s'implanter en Algérie ? Réponse du manager: «Nous n'avons pas encore de projet d'implantation dans ce pays qui reste encore difficile d'accès».

Nafaa Ennaifer (Acrylaine) :
«L'appétit vient en mangeant»
Acrylaine, est le fleuron du groupe de Chakib Nouira. Entreprise de textile totalement exportatrice, elle produit près de six millions de pièces par an. Pour ne pas demeurer une entreprise de sous-traitance pour de grandes marques internationales, elle a créé sa propre marque, Dixit, destinée au marché européen. Le succès a été immédiat. L'entreprise a développé son propre réseau commercial à l'étranger, d'abord en Italie et en Biélorussie, puis au Maroc et en Algérie.
«Au Maroc, les choses se sont passées plus facilement et plus rapidement qu'en Algérie. Car là-bas, on trouve des professionnels qui parlent le même langage», raconte Nafaa Ennaifer, directeur général d'Acrylaine. En Algérie, pays en pleine restructuration économique, l'opération de déploiement a été plus laborieuse. Par exemple, l'entreprise a dû dépenser près de 100 000 euros en frais de déplacement pour un projet d'acquisition d'une unité industrielle qui n'a jamais abouti. Mais les efforts commencent à porter. Dixit possède aujourd'hui un point de vente à Alger. D'ici la fin de l'année, la marque ouvrira des magasins dans trois autres villes du pays.
Forte de ses succès au Maroc et en Algérie, Acrylaine s'apprête à dépasser le cadre strictement commercial pour créer des unités industrielles dans ces deux pays.

Tahar Bayahi (Groupe TPR) :
«La persévérance finit toujours par payer»
Le Groupe TPR a été créé il y a près de 50 ans par Youssef Bayahi, qui a racheté la première société tunisienne d'aluminium SOTAL. Le groupe, constitué aujourd'hui d'une trentaine de sociétés (industrie, agriculture et services) totalise un chiffre d'affaires de plus de 200 millions de dinars. Son fleuron du groupe, TPR, fondé en 1977 est l'unique producteur de profilés d'aluminium en Tunisie. Son chiffre d'affaires a atteint, en 2006, environ 53 millions de dinars. Près du quart de ce montant a été réalisé à l'exportation.
Les produits TPR sont fabriqués dans deux usines à Mégrine et à Saint Gobain et sont fortement présents en Europe, notamment en France, mais aussi en Algérie et en Libye depuis les années 1980.
Pour conforter sa position de leader régional dans son domaine, TPR s'apprête à créer deux nouvelles usines, en Libye et en Algérie, qui devraient entrer en production fin 2008. L'investissement global devrait atteindre 55 millions de dinars. Le groupe espère lever une partie de cette somme grâce à son introduction en Bourse. TPR procède, en effet, à une augmentation de son capital pour le porter de 25 à 29,8 millions de dinars, en mettant en vente 4 800 000 actions de nominal 1 dinar au prix de 4,2 dinars, du 18 au 24 juillet.
«Nous avons accompagné la Libye lorsque le pays était soumis sous embargo. Aujourd'hui, ce pays est en train de s'ouvrir progressivement sur l'extérieur. C'est pourquoi j'encourage les opérateurs économiques tunisiens à aller dans ce pays», explique Tahar Bayahi. Le manager, qui ne s'attarde sur la success story maghrébine de son propre groupe, cite un autre exemple, celui du groupe égyptien Orascom Télécom en Algérie. Le groupe réalise aujourd'hui 10 milliards de dollars de chiffre d'affaires. A elle seule, l'Algérie lui rapporte près d'un milliard de dollars. Les débuts de l'entreprise dans ce pays étaient pourtant difficiles et elle était même au bord de la cessation de payement. Sa persévérance a fini par payer», explique Tahar Bayahi. A méditer...

***
Champions maghrébins: la note de synthèse de l'Atuge
Nous reproduisons, ici, la note de synthèse de la table ronde intitulée «Champions Maghrébins, retour d'expériences», telle qu'elle nous a été envoyée par les organisateurs du forum.
«1- Pourquoi ont-ils investi en dehors de leur pays d'origine ?
Deux raisons principales ont incité, voir obligé, les champions nationaux à devenir champions maghrébins:
- se développer et atteindre une taille critique viable dans une économie ouverte sur les marchés mondiaux ;
- accompagner les clients internationaux en s´implantant à côté de leurs installations industrielles ou de leurs marchés.

2- Comment ont-ils réussi dans les autres pays ?
Ils ont réussi, malgré les difficultés, en misant sur les fondamentaux du professionnalisme :
- maîtriser son métier et rechercher l´excellence dans le savoir faire
- rechercher des talents, apprendre les gérer et leur donner les moyens d'agir
- connaître son marché, se mesurer aux meilleurs mondiaux et être capables d'emporter des appels d'offres internationaux.

3- Quels enseignements tirer de leurs expériences ?
Les travaux du Forum ont démontré que la dimension maghrébine pour nos entreprises les plus dynamiques n'est plus un choix, encore moins une hésitation, c'est une obligation vitale pour survivre et se développer face à la concurrence mondiale, à l'ouverture prévue de nos frontières économiques avec l'Europe et aux accords de l'OMC.
La bonne nouvelle discutée, précisée et confirmée dans ce Forum est que nous n'avons pas besoin d'attendre d'avoir une carte d´identité nationale maghrébine pour construire un marché maghrébin dans lequel opèrent des entreprises de taille suffisante pour se battre sur le plan mondial.
Il s'agit là d'une excellente nouvelle car lors de ce forum, nous avons écouté, entendu, et retenu les témoignages de nos champions maghrébins qui défrichent les difficultés, montrent le chemin et servent d'exemples.
La question s'était posée de savoir s'il ne fallait pas dès le départ commencer la construction maghrébine au niveau des entreprises, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire.
L'essentiel des difficultés rencontrées touchent aux implantations laborieuses, aux lourdeurs administratives, aux retards sur le plan législatif, aux autorisations des banques centrales, aux formalités douanières, aux autorisations de nombre d'expatriés intra-magrébins par entreprise qui s'installe dans d'autres pays maghrébins, à l'application réelle des accords (de libre échange par exemple) et au foisonnement des conventions et réglementations.
Des progrès sur ces points sont constatés et appréciés, leur importance est inégale d'un pays du Maghreb à l'autre, mais leur rythme est en général jugé incompatible avec la réactivité nécessaire à une économie moderne ouverte à la concurrence mondiale.
Ces difficultés constituent un handicap de taille pour les entreprises maghrébines et donnent, de fait, un avantage concurrentiel aux entreprises établies dans des zones concurrentes du Maghreb. Les administrations sont en général conscientes des difficultés et peuvent aider ponctuellement à accélérer les choses dans des cas critiques.


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