Après une tentative d'organiser en commun un événement unitaire important au niveau des arts plastiques contemporains entre le printemps des arts (10 ans d'âge) et le nouveau venu Carthage Contemporary sous la forme de Printemps Art Fairs, le projet commun semble connaître quelques difficultés à voir le jour. Les deux organisations préfèrent apparemment agir indépendamment l'une de l'autre et retrouvent chacune sa liberté d'action en lançant chacune sa propre initiative.
Khédija Hamdi (violon bleu) et Timon Kaabi-Linke se « retirent » avec le projet Carthage Contemporary, après avoir obtenu l'autorisation provisoire d'exploiter l'espace du musée de Carthage ; ils montent une exposition ultra « contemporaine » toute en installations grandioses. Ce projet, tel qu'il est, semble avoir obtenu l'appui de l'IFC (Institut Français de Coopération) et d'autres organismes financiers et de service… tunisiens.
De l'autre côté, du côté du Printemps des Arts, serviced, la commissaire Meriem Bouderbala et l'homme-lige Sadok Hindaoui, appuyé par Perelli, proposent de relancer le Printemps des Arts de la Marsa remanié mais probablement sans Mach (Mahmoud Chelbi)… du moins pour le moment !
Le divorce entre les deux projets est apparemment consommé. Comment comprendre cela. S'agit-il d'un désaccord d'intérêt immédiat ou à venir ? Peut-être une question de principe ?
La controverse ou le désaccord n'est-il pas au niveau du contrôle du marché futur de l'art qu'on essaye de lancer (hypothétique) bientôt en direction de l'Europe et du Moyen-Orient avec l'aide de l'Europe et de ses institutions en Tunisie ou peut être qu'il ne s'agit que d'une tentative de reprendre le contrôle du marché tunisien de l'art fragilisé par la « Révolution » et qui a quelque peu échappé aux intéressés de la Banlieue-Nord.
En tous les cas, rien n'indique que la controverse soit seulement au niveau des intérêts matériels mais plutôt au niveau de la conception de l'événement ou peut-être des deux !
Le Printemps des arts de la Marsa n'a pas encore publié ses intentions mais il a déjà nommé sa commissaire habituée à l'organisation d'événements artistiques en France : Meriem Bouderbala. Il a également annoncé qu'il travaille déjà avec des Italiens. Cette tendance à travailler avec des Européens est présente dans les deux projets.
Carthage Contemporary est plus explicite et déjà plus avancé au niveau de son organisation que « le Printemps des Arts ». Carthage Contemporary voudrait, en outre, donner un contenu contemporain à son projet.
Dans sa déclaration « Chkoun ahna », du Carthage Contemporary, annonce des positions de principe sur ses intentions. Carthage Contemporary regroupe les galeries les plus importantes de Tunisie. Celles qui sont groupées dans la Banlieue Nord de Tunis.
Sur le plan idéologique, la déclaration de Carthage Contemporary est claire, elle rejette les lectures identitaires réductrices de notre histoire et celle particulièrement musulmane.
La déclaration poursuit et dit : « il y a eu des civilisations berbères et capsiens (sic)… comme si les Capsiens n'étaient pas des berbères... et tout cela écrit en « lettres romaines » pour ne pas dire « latines ». Quand on a l'ambition d'être contemporain on devrait au moins écrire plus convenablement !
Mais trêve de plaisanterie : le programme du Carthage Contemporary est plus riche que sa déclaration puisqu'il comporte des manifestations très intéressantes comme celles auxquelles nous avons assisté à Sabalat Ben Ammar, à Bchira Art Center. L'exposition artistique comporte le travail plastique de Selima Karoua, des photos comme celles de Nicène Kossentini ou celles de Zied Ben Romdhane ou les vidéos de Ala Eddine Slim. L'intérêt de ces photos ainsi que des vidéos est énorme puisqu'elles ont suscite des textes critiques très fournis et très significatifs.
Hamma Hannachi (texte critique et poésie), Hamideddine Bouali et Ismaïl ont fourni des textes d'une grande profondeur esthétique que je relève avec beaucoup de bonheur. Cette compétition peu habituelle à propos de travaux artistiques est une initiative que je salue, également.
Le musée de Carthage présente dans le cadre du programme d'activité du Carthage Contemporary des travaux d'installations assez monumentaux. Nous les avons vus. Mais nous ne les avons pas saisis et compris. Est-ce une question de dimension. Ils sont peut être trop monumentaux pour nous ou trop contemporains !... trop secs, sans vie ! peut-être. La fête est lointaine avec ces structures répétitives rythmant l'espace horizontalement ou verticalement ou même en papillonnant à la surface… si propre du Musée Nationale de Carthage… Des amis pourraient exiger un texte pour comprendre ces installations ! Je pourrais faire partie de ces amis ! L'art a-t-il besoin de textes pour signifier le beau et le sens ? Peut-être, qu'il n'y a ni sens, ni beauté ?
Nous nous posons la question est de savoir si ce trop d'art à la Marsa et à la Banlieue-Nord ne va pas tuer l'art ?