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Thema: Quelles sont les retombées économiques et sociales des investissements français en Tunisie ?
Publié dans Le Temps le 12 - 06 - 2012

En janvier dernier, lors de la conférence de presse annuelle de la Chambre de Commerce Tuniso-Française du Commerce et de l'Industrie (CTFCI), l'ambassadeur de la France en Tunisie, monsieur Boris Boillon, avait déclaré que « la France demeure le premier partenaire de la Tunisie » avant de tailler son argumentation par quelques indicateurs, dont voici l'essentiel (synthèse de deux articles in le Temps et la Presse du jeudi 19 janvier):
- 30% des exportations tunisiennes en 2011 sont à destination de la France et 18% de nos importations, pour cette même année, proviennent de l'Hexagone « loin devant tous les autres partenaires » a-t-il ajouté. Les importations tunisiennes auprès de ce pays ont enregistré une croissance de 3.3%, passant ainsi de 6 milliards de dinars à 6,2 milliards ; les exportations, quant à elles, ont enregistré une croissance de 13%, allant de 6,8 milliards de dinars en 2010, à 7.7 milliards de dinars en 2011.
- Fin 2011, nous avons dénombré environ 1 270 entreprises employant près de 120.000 individus.
- Les IDE français ont enregistré une baisse de 9%, passant de 231.3 millions de dinars en 2010, à 210.9 millions de dinars en 2011 « malgré l'investissement en portefeuille du groupe Orange de 35 millions de dinars réalisé en 2011 » a-t-il souligné.
- En 2011, 57 entreprises françaises, ou à participation françaises, ont dû cesser leurs activités en Tunisie. Monsieur Boris Boillon a voulu être rassurant sur ce point en déclarant «Par contre, et lors de nos visites fréquentes aux entreprises (françaises installées en Tunisies ou celles travaillant sur le marché français), nous sommes à chaque fois réconfortés par leurs responsables dont une partie nous confie qu'ils ont l'intention soit de maintenir leurs investissements ou de les étendre».
Qu'en est-il réellement ?
Un taux de couverture à relativiser.... : En 2010 les exportations tunisiennes vers l'hexagone s'élevaient à 6,7 milliards DT (soit un peu plus de 3,5 milliards d'euro) contre 6 milliards DT pour les importations (soit 3,1 milliards d'euros), ce qui s'est traduit par un taux de couverture de 112,3% (109% en 2009). Cependant, il convient tout de suite de relativiser ce constat par le volume des revenus du capital (en gros, c'est les bénéfices) transféré en 2010 de la Tunisie vers la France, qui était presque de 0,4 milliard de dinars, soit 0,21 milliard d'euro (in la balance des paiements, novembre 2011, édité par la BCT, P.75).
Une concentration dans le textile à intensité « travaillistique » : Concernant les 1270 entreprises tous secteurs confondus, employant 120.000 personnes, annoncés par monsieur Boris Boillon, qu'en est-il réellement ? Près de 80% de ces entreprises, comme je l'ai souligné plus haut, exercent dans l'industrie manufacturière, soit environ 1016 unités de production. En filigrane, 796 entreprises sont totalement françaises, les 220 unités restantes sont mixtes. Près de la moitié (52%) de ces entreprises exercent dans le secteur du textile, 11% dans le secteur de l'Industries électriques, électroniques et de l'électroménager, 11,5% dans le secteur de l'Industries mécaniques et métallurgiques, 11,5% dans l'industrie chimique, 5% dans l'Industries du cuir et de la chaussure, 3% dans l'Industries du bois, du liège et de l'ameublement, etc.
Si en regarde de plus près le secteur du textile, pour étudier la répartition des entreprises française par branche d'activité et ainsi appréhender la question de l'apport technologique, nous constaterons une surconcentration des entreprises françaises dans la branche confection. En effet, sur les 435 unités françaises dans le secteur du textile une seule -1- entreprise exerce dans la filature et 5 dans le tissage, ces branchent sont connues par leur intensité capitalistique et donc technologique. Plus de 75% des entreprises françaises sont concentrées dans la branche confection (40%) et la branche bonneterie (35%), qui sont faibles en apport technologique et par conséquent ils se caractérisent par leur intensité « travaillistique » : plus de 85 000 employés sur les 120 000, annoncés par l'ambassadeur de France, majoritairement des femmes faiblement qualifiée, y exercent. (Synthèse élaborée sur la base de nombreux documents sur le site : tunisieindustrie.nat.tn, février 2012). Déjà fin des années 90, j'ai souligné avec force la faiblesse de l'investissement moyen par projet, toutes nationalités confondues, dans ce secteur. En effet, l'investissement moyen par projet était de 0,514 MDT. De facto, l'investissement moyen par personne employé était à peine de 0,007 MDT (in « IDE, partenariat euro-méditerranéen et développement au Maghreb : Le cas de la Tunisie », thèse de Doctorat soutenue en janvier 2000, Université Pierre Mendes France, Grenoble II, P.50 et/ou voir aussi « Les implantations d'entreprises off-shore en Tunisie : quelles retombées sur l'économie ? » in la revue monde arabe maghreb-Machrek, N°160 avril-juin 1998, PP50-68 avec mon directeur de thèse Améziane Ferguène).
Des investissements dans les industries électriques électroniques et de l'électroménager à très faibles apport technologique : Nous dénombrons, dans ce secteur d'activité, 91 unités de production dont seulement 54 totalement françaises les 37 restantes sont des entreprises mixtes qui emploient respectivement 11 911 et 5 587 personnes, soit un total de 17 498 employés. 10 des 91 unités ne sont pas totalement exportatrices et emploi 975 personnes. Il reste donc 81 entreprises offshore dont la production est totalement exportée. Ces unités emploient 16 523 employés dont 9 815 (soit 60%) personnes exercent dans la branche des industries Electriques et plus précisément dans la sous-branche « Fils, câbles isolé et faisceaux de câbles». Il s'agit d'un simple montage très pauvre en apport technologique. Près de 90% des personnes qui y exercent sont des femmes faiblement qualifiées avec des salaires qui permettent seulement de ne pas mourir de faim.
La délocalisation des entreprises française en Tunisie est une opportunité : une véritable bouffé d'oxygène pour les entreprises concernées, elles regagnent en compétitivité et donc en part de marché. D'ailleurs, pour beaucoup d'entreprises françaises, leur survie en France résulte de la « politique salvatrice » qu'a constitué la délocalisation de certaines de leur unité de production vers la Tunisie.
Les services (20% des IDE français) ne sont pas en reste : CLUB MEDITERRANEE dispose de nombreux “villages” en Tunisie ; les grands noms du CAC40 présents en Tunisie s'intéressent directement au marché tunisien, voire algérien et libyen : Comme Air Liquide, Danone, Renault, PSA, Sanofi Aventis, Total (stations-service, lubrifiant et aviation) ou d'autres. Les entreprises s'implantent souvent en partenariat avec des groupes locaux, quitte à n'avoir qu'une participation minoritaire -comme Carrefour et Géant Casino. Les banques françaises (BNP Paribas, Société générale, BPCE) sont présentes, les assureurs aussi -Groupama détient 35 % du capital de la STAR, notre premier assureur. Dans les télécoms, Orange Tunisie a décroché en 2009 la troisième licence de téléphonie mobile et la deuxième de téléphonie fixe (Les échos du 18 janvier 2011). ALSTOM a remporté au printemps 2008 un appel d'offres pour une centrale thermique de 400 mégawatts, contrat alors évalué par l'Elysée à 360 millions d'euros. A ce propos, un responsable, de la chambre Tuniso-Française de commerce et d'industrie (CTFCI), estimait que : «Les grands groupes qui disposaient d'agents pour les avantager dans les appels d'offres publics seront probablement lésés par le changement de régime» (Le Figaro du 27 janvier 2011).
Bilan et quelques pistes d'orientation :
Ainsi, nous venons de constater la faiblesse des investissements français en Tunisie en apport technologique.. Faut-il pour autant blâmer les français ? Evidemment, non ! Les occidentaux d'une manière générale n'ont pas d'amis ; ils ne cherchent que leurs intérêts ; Et ils ont raison. A nous de faire de même, d'être plus habile, ingénieux et ambitieux : Le développement est un état d'esprit, une conscience morale et collective, une volonté d'en découdre, une haute image et estime de soi. Ayons toutes et tous cet état d'esprit, cette conscience morale et collective et cette haute image de soi. Nous avons du génie.
Il convient, en premier lieu, de revoir notre stratégie de ciblage des IDE, notre politique en ce sens devrait être plus élaborée en termes de sélection des technologies importées en privilégiant les firmes porteuses de hautes technologies. Il importe, en second lieu, que le gouvernement reprenne le dossier de la formation professionnelle et de l'apprentissage industriel et mette en chantier une politique éducative plus audacieuse. Parvenir à une meilleure adéquation (quantitative et qualitative) entre, d'une part, le système éducatif et de formation professionnelle et, d'autre part, l'appareil productif constitue assurément la solution de l'avenir. L'introduction de l'enseignement des sciences économiques, dès le Secondaire, pourrait être également envisagée : en effet, familiariser les jeunes dès leur jeune âge avec le monde de l'entreprise et leur environnement socioéconomique et juridique c'est développer et susciter chez eux l'esprit d'entreprendre et de créativité.
En chiffres

* 30% des exportations tunisiennes en 2011 sont à destination de la France et 18% de nos importations, pour cette même année, proviennent de l'Hexagone
* Fin 2011, nous avons dénombré environ 1 270 entreprises employant près de 120.000 individus
* Les IDE français ont enregistré une baisse de 9%, passant de 231.3 millions de dinars en 2010, à 210.9 millions de dinars en 2011
* En 2010 les exportations tunisiennes vers l'hexagone s'élevaient à 6,7 milliards DT (soit un peu plus de 3,5 milliards d'euro) contre 6 milliards DT pour les importations (soit 3,1 milliards d'euros)
* Plus de 75% des entreprises françaises sont concentrées dans la branche confection (40%) et la branche bonneterie (35%), qui sont faibles en apport technologique et par conséquent ils se caractérisent par leur intensité « travaillistique »
Par Dr Ezzeddine Ben Hamida
Professeur de sciences économiques


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